AHMADIS DU PAKISTAN : MISE A JOUR DECEMBRE 1991 A OCTOBRE 1993
- Author: Research Directorate, Immigration and Refugee Board, Canada
- Document source:
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Date:
1 January 1994
1. INTRODUCTION
Le présent exposé constitue une mise à jour d'un document sur la situation des Ahmadis du Pakistan publié par le CDCISR en janvier 1992 et intitulé Pakistan: le sort réservé aux Ahmadis qui retournent dans leur pays. Il serait souhaitable de d'abord lire le premier document pour bien saisir le contexte dans lequel s'inscrit cette mise à jour.
Vers la fin de 1992 et au cours de 1993, les autorités pakistanaises ont pris certaines décisions de nature juridique et législative qui semblaient traduire une attitude plus tolérante à l'endroit des minorités religieuses au Pakistan, et notamment à l'endroit des Ahmadis. Toutefois, dans les faits, il semble que ces décisions ne sont pas venues améliorer la situation de la communauté ahmadie. Les lois discriminatoires, et notamment les alinéas 298(b) et (c) (Ordonnance XX) et 295(c) (crime de blasphème) du Code pénal pakistanais sont toujours en vigueur et les Ahmadis continuent d'en faire les frais. Rappelons que les alinéas 298(b) et (c) interdisent aux Ahmadis d'utiliser des vocables réservés aux saints de l'Islam et d'employer les termes Azan et Masjid pour désigner respectivement leurs appels à la prière et leurs lieux de culte, et que l'alinéa 295(c) prescrit la peine capitale pour toute personne reconnue coupable de blasphème à l'endroit du prophète Mahomet [ Pour plus de renseignements sur les dispositions juridiques susmentionnées et la situation des Ahmadis au Pakistan depuis l'indépendance jusqu'en 1991, veuillez consulter les documents suivants : Pakistan : le sort réservé aux Ahmadis qui retournent dans leur pays, publié par le CDCISR en janvier 1992, et Persecuted Minorities and Writers in Pakistan, publié par Asia Watch le 19 septembre 1993.]. Une copie de ces articles de loi se trouve en annexe.
En outre, ces lois alimenteraient un climat de sectarisme religieux au sein duquel la communauté ahmadie, à l'instar d'autres minorités religieuses, continue d'être l'objet d'intimidation, de discrimination et de harcèlement sous le regard passif et parfois complice des autorités pakistanaises.
2. CHANGEMENTS AU NIVEAU LEGISLATIF
En août 1991, le parlement pakistanais votait un amendement à l'alinéa 295(c) du Code pénal, faisant de la peine de mort la seule et unique sentence réservée à quiconque serait reconnu coupable de blasphème à l'endroit du prophète Mahomet. De nombreux Ahmadis ont été et continuent d'être accusés et emprisonnés aux termes des alinéas 298(b) et (c) et 295(c). En outre, des chrétiens et même des musulmans ont fait l'objet d'accusations de blasphème en 1992. Au mois d'août 1993, deux sentences de mort avaient été prononcées en vertu de l'alinéa 295(c), contre un chrétien et un musulman, et les deux causes étaient toujours en appel à cette date (Country Reports 1992 1993, 1160; Amnesty International 1992, 229; HRCP 1993, 46; News From Asia Watch 19 sept. 1993, 1, 11, 21).
En novembre 1992, la cour suprême du Pakistan renversait la décision de la cour supérieure du Pendjab en faveur de Nasir Ahmad, un Ahmadi, accusé notamment de blasphème, en mai 1992, pour avoir inscrit des expressions islamiques sur des faire-part de mariage. Nasir Ahmad a obtenu de la cour suprême la libération sous caution qui lui avait été refusée en première instance par la cour supérieure (selon laquelle il est impossible d'accorder la libération sous caution dans les cas d'infraction à l'alinéa 295(c)). En rendant sa décision en novembre 1992, la cour suprême a déclaré que l'utilisation de certaines expressions islamiques par des Ahmadis ne constituait pas nécessairement un acte blasphématoire et que l'acte en question devait être étudié dans un contexte plus large, qui tient compte notamment des intentions de l'accusé et de ses antécédents religieux (ibid., 20-21; HRCP Newsletter janv. 1993, 4; Dawn 1er déc. 1992).
En février 1993, profitant de ce contexte a priori favorable, les défenseurs de la cause ahmadie ont entrepris de contester devant la cour suprême la constitutionnalité de l'Ordonnance XX, qui selon eux ne respecte pas l'article 20 de la constitution du Pakistan, lequel garantit la liberté de culte de tous les citoyens pakistanais (ibid. 2 févr. 1993; Tale of Persecution juill. 1993, 1-3; The News 4 févr. 1993; Devamithran 1989, 17). Au cours du même mois, l'assemblée nationale adoptait une résolution sur la protection des lieux de culte des minorités (BBC Summary 17 févr. 1993; PTV Television Network 9 févr. 1993). Il semblait aussi que le gouvernement avait remis à plus tard la mention de la confession sur les cartes d'identité, une décision prise en octobre 1992 et qui avait alors soulevé un tollé de protestations (The Washington Post 21 oct. 1992). Selon les organismes de défense des droits de la personne et les observateurs de la scène sociopolitique pakistanaise, ces changements juridiques n'auraient pas amélioré la situation de la communauté ahmadie (Country Reports 1992 1993, 1160; HRCP 1993, 46; HRCP Newsletter janv. 1993, 4; ibid. oct. 1992, 10; Tale of Persecution juill. 1993, 3-6; ibid. avr. 1993, 2; News From Asia Watch 19 sept. 1993, 1, 11, 21; Ali 26 août 1993; Taylor 26 août 1993; Amnesty International 1992, 229).
Nasir Ahmad est, depuis novembre 1992, en liberté sous caution et attend toujours d'être cité à son procès (ibid. 25 août 1993). La commission des droits de la personne du Pakistan (Human Rights Commission of Pakistan - HRCP) souligne dans son rapport trimestriel de janvier 1993 que lorsque viendra le temps d'entendre la cause de Nasir Ahmad, ainsi que d'autres causes de blasphème, l'attitude des juges pakistanais en général risque de différer de celle adoptée par la cour suprême en novembre 1992 (HRCP Newsletter janv. 1993, 4). De fait, selon l'Ahmadiyya Movement in Islam (AMI), quelques semaines après la déclaration de la cour suprême sur l'utilisation des expressions islamiques, un juge de la cour municipale de Rawalpindi, au Pendjab, a rejeté la conclusion de la cour suprême prétextant qu'elle ne s'appliquait pas à la cause qu'il venait d'entendre et a déclaré qu'il serait plus sage d'attendre de connaître la conclusion du procès de Nasir Ahmad avant de le citer en exemple. Le juge a condamné l'accusé, Munawwar Ahmad Qureshi, à trois ans de prison et à une amende de 15 000 roupies (près de 713,00 $ CAN) pour avoir inscrit le symbole de la profession de foi musulmane, le kalima [ Selon un représentant de l'Ahmadiyya Movement in Islam à Ottawa, certains musulmans inscrivent la profession de foi islamique « Il n'y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète » sur des cartes, des calendriers, des bijoux, etc., tout comme certains chrétiens portent une croix, symbole de leur foi chrétienne (AMI 24 sept. 1993). ], sur un calendrier (Tale of Persecution juill. 1993, 5). Enfin, en juillet 1993, la cour suprême a réitéré le « bien-fondé » de l'Ordonnance XX, rejetant de ce fait l'appel de plusieurs Ahmadis dont les cas avaient été cités au cours du débat sur la constitutionnalité de cet acte législatif, débat entrepris en février 1993 (Dawn 4 juill. 1993). Quant à la résolution sur la protection des lieux de culte des minorités religieuses, il semble que cette initiative en soit encore à l'état de projet (Ambassade du Pakistan 22 sept. 1993). Enfin, les renseignements sur l'inscription de la confession sur les cartes d'identité ne semblent pas concordants (voir la section 3.5).
3. SITUATION DES AHMADIS EN 1992 ET 1993
Selon divers groupes de défense des droits de la personne et observateurs de la scène pakistanaise, les Ahmadis, à l'instar d'autres minorités religieuses, sont toujours l'objet de discrimination, d'intimidation et de harcèlement souvent en raison de motifs politiques ou personnels, et les autorités pakistanaises demeurent passives et continuent d'entériner les lois qui entretiennent ce climat d'injustice (Country Reports 1992 1993, 1160; Amnesty International 1992, 229; HRCP 1993, 46; HRCP Newsletter janv. 1993, 4; ibid. oct. 1992, 10; Tale of Persecution juill. 1993, 3-6; ibid. avr. 1993, 2; News From Asia Watch 19 sept. 1993, 1, 11, 21). La HRCP rapporte également qu'une quarantaine de membres de la communauté ahmadie ont été agressés et assassinés en 1992 (HRCP 1993, 46).
3.1 Lahoris et Ahmadis (Qadianis)
A la suite du décès de son fondateur Mirza Ghulam Ahmad en 1908, le mouvement ahmadi s'est divisé en deux groupes : les Ahmadis (Qadianis), majoritaires, et les Lahoris, peu nombreux et moins organisés. Selon l'Ahmadiyya Movement in Islam, il n'existe aucune hostilité entre Lahoris et Ahmadis, et les membres des deux groupes vivent les mêmes tensions à l'extérieur de leur communauté (AMI 24 sept. 1993). La scission s'est d'abord effectuée en raison de dissensions sur le choix d'un calife qui devait reprendre la direction du mouvement. Les Lahoris se sont installés à Lahore; quant aux Ahmadis, ils sont demeurés à Qadian, aujourd'hui ville du Pendjab indien (Encylopaedia of Islam 1986, 301). Influencés par la vague d'anti-impérialisme et de nationalisme islamique qui se levait sur le continent indien en 1910, les Lahoris sont devenus plutôt silencieux quant à leurs différences religieuses avec la communauté musulmane (ibid.; AMI 24 sept. 1993). Les Lahoris n'accordent pas le titre de prophète, mais plutôt de réformateur, à Mirza Ghulam Ahmad et affirment d'ailleurs que ce dernier ne s'est jamais lui-même déclaré prophète (Encyclopaedia of Islam 1986, 302).
3.2 Alinéas 298(b),(c) (Ordonnance XX), alinéa 295(c) (blasphème) du Code pénal
La plupart des accusations déposées contre les Ahmadis en 1992 et 1993 sont formulées en vertu des alinéas 298(b),(c) et 295(c) du code pénal pakistanais (Tale of Persecution avr. 1993, 2; HRCP 1993, 46). Selon le rapport annuel de 1992 de la HRCP, plus de 150 plaintes ont été déposées contre des membres de la communauté ahmadie en 1992 aux termes de ces dispositions juridiques. Les tribunaux pakistanais ont rendu des sentences d'emprisonnement variant de quelques mois à deux ans ou plus (ibid.). Par exemple, le 25 février 1992 à Sargodha, quatre Ahmadis ont été condamnés à huit ans de prison et à une amende de 32 $ pour avoir construit une mosquée ahmadie sur leur propre terrain. Les musulmans qui avaient déposé la plainte ont déclaré que l'existence de ce lieu de culte « non musulman » les avaient offensés (Country Reports 1992, 1993, 1168). Amatullah Saleem s'en est tirée à meilleur compte. Le 4 février 1993, Saleem, professeure ahmadie dans une école du village de Dunyapur dans le district de Londhran au Pendjab, a été accusée d'avoir violé notamment l'alinéa 295(c) en récitant le Coran lors du rassemblement matinal de l'école (Tale of Persecution juill. 1993, 5). Selon Amnesty International, au mois d'août 1993, Saleem avait été acquittée (Amnesty International 25 août 1993, 1).
Le nombre de poursuites judiciaires intentées pour infraction à l'alinéa 295(c) a augmenté considérablement au cours de 1992 et de 1993 (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 10). En novembre 1992, un tribunal pakistanais a prononcé la première sentence de mort pour le crime de blasphème, depuis l'amendement de la loi en août 1991 (ibid., 13-14; The Ottawa Citizen 9 janv. 1993; Country Reports 1992 1993, 1165). L'intimé, un chrétien, accusé d'avoir fait des remarques offensantes à l'endroit du prophète Mahomet (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 12), est depuis détenu au secret « en raison de la nature de son crime » et a porté sa cause en appel en janvier 1993. La cause aurait immédiatement été reportée (SIDH 5 févr. 1993; Amnesty International 1992, 229). Selon Asia Watch, une autre sentence de mort a été prononcée pour infraction à l'alinéa 295(c) en 1992, cette fois-ci à l'endroit d'un musulman. Les deux causes étaient toujours en appel en août 1993 et huit autres causes de blasphème étaient en instance à la même date. Asia Watch ne précise pas cependant l'appartenance religieuse des inculpés dans ces causes (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 11).
En outre, plusieurs éditeurs et imprimeurs ahmadis ont fait l'objet de plaintes et se sont fait confisquer des publications en 1992 (HRCP 1993, 32, 46). L'Ahmadiyya Movement in Islam dénonce des cas d'Ahmadis accusés aux termes de l'alinéa 298(c) au début de 1993 et souligne que dans tous ces cas les accusations avaient été formulées sous les instructions du juge de la cour de district (Tale of Persecution juill. 1993, 5).
3.3 Discrimination en milieu de travail et dans l'accès aux études supérieures
Le Département d'Etat des Etats-Unis réitère dans son rapport pour l'année 1992 que les Ahmadis ont peu de chances d'accéder à des postes de responsabilités dans l'administration publique (Country Reports 1992 1993, 1171). En fait, selon la HRCP, une trentaine de fonctionnaires ahmadis ont été congédiés en 1992 (HRCP 1993, 46). De même, les jeunes Ahmadis éprouvent de plus en plus de difficulté à se faire admettre aux institutions d'enseignement supérieur reconnues, ce qui en oblige plusieurs à poursuivre leurs études à l'étranger (Country Reports 1992 1993, 1171). Le Département d'Etat signale en outre qu'en mars 1992, une maison d'enseignement de Lahore, au Pendjab, a émis un avis public demandant à tous les candidats à un cours de soins infirmiers de présenter une déclaration écrite établissant qu'ils n'étaient pas ahmadis (ibid., 1168). Enfin, les bulletins trimestriels de l'Ahmadiyya Movement in Islam font état de cas de harcèlement envers deux professeurs ahmadis à Islamabad et d'un cas d'agression à l'endroit d'un étudiant ahmadi en mai 1993 à Abbotabad, dans la Province frontière du Nord-Ouest (Tale of Persecution juill. 1993, 5-6).
3.4 Liberté de culte
En 1992, la police a continué de fermer des lieux de culte ahmadis (Country Reports 1992 1993, 1167). Des mosquées ont été attaquées, d'autres, en cours de construction, ont été frappées d'interdiction, des tombeaux ont été profanés et des cimetières ont été interdits par les autorités (HRCP 1993, 46). L'Ahmadiyya Movement in Islam fait état d'un cas semblable survenu en juin 1993 dans le district de Toba Takesingh, au Pendjab. Une escouade policière, accompagnée du juge de la cour municipale, a empêché des Ahmadis d'inhumer la dépouille d'un de leurs coreligionnaires dans un cimetière où reposaient nombre de leurs ancêtres (Tale of Persecution juill. 1993, 6). En outre, des Ahmadis ont été arrêtés, parfois traduits en justice et même emprisonnés pour avoir pratiqué leur foi (Amnesty International 1992, 229; Country Reports 1992 1993, 1167). Le Département d'Etat des Etats-Unis rapporte que lors d'un événement de ce genre à Kotri, dans le Sindh, au début de 1992, des Ahmadis arrêtés au moment où ils récitaient leurs prières ont été emmenés au poste de police où certains d'entre eux auraient été battus (ibid.). Deux semaines plus tard, ils étaient remis en liberté sous caution, en attendant d'être cités à leur procès pour le crime de blasphème (Amnesty International 1992, 229-230).
En février 1993, l'assemblée nationale pakistanaise a adopté une résolution sur la protection des lieux de culte des minorités religieuses au Pakistan (BBC Summary of World Broadcasts 17 févr. 1993; PTV Television 9 févr. 1993). Selon un représentant de l'ambassade du Pakistan à Washington, cette résolution n'en est toujours qu'à l'état de projet (Ambassade du Pakistan 22 sept. 1993). Le 10 juillet 1993, à Karachi, une mosquée ahmadie, la Masjid Noor, a été attaquée par une quinzaine de personnes. Un employé ahmadi a été grièvement blessé au cours de l'incident. Selon l'Ahmadiyya Movement in Islam, l'attaque aurait été complotée dans les bureaux de l'organisation Khatme Nubuwwat (« association pour la protection de la finalité du prophète Mahomet »), situés dans une mosquée non loin de la Masjid Noor (Tale of Persecution juill. 1993, 3). Enfin, le rapport pour l'année 1992 du Département d'Etat des Etats-Unis fait état de la conversion forcée de femmes de la communauté ahmadie (Country Reports 1992 1993, 1167). Toutefois, la DGDIR n'a pu corroborer ces derniers renseignements.
3.5 Cartes d'identité
Le 13 octobre 1992, le gouvernement paskistanais prenait la décision de mentionner la confession sur les cartes d'identité pakistanaises (Keesing's oct. 1992, 39146; IPS 23 déc. 1992). Selon les autorités, cette mesure était nécessaire puisque l'électorat est défini selon l'appartenance religieuse des électeurs (ibid.; HRCP 1993, 43) et que les cartes d'identité doivent être présentées lors des scrutins (National Democratic Institute 1989, 36; Ambassade du Pakistan 22 sept. 1993).
Cette décision a soulevé un tollé de protestations à l'échelle du pays, surtout de la part de la minorité chrétienne, au cours de l'automne 1992 (The Washington Post 21 oct. 1992; Reuters 16 nov. 1992; IPS 23 déc. 1992; UPI 9 nov. 1992). Les minorités religieuses considèrent que l'inscription de la confession sur les cartes d'identité constitue une mesure discriminatoire dans un pays où la constitution ne définit pas ses citoyens en fonction de leur religion (ibid.). Les Pakistanais doivent, entre autres, produire leur cartes d'identité devant les tribunaux, lors d'une demande d'emploi, lors de l'admission à un établissement d'enseignement supérieur et lors de vérifications policières (IPS 23 déc. 1992). Selon ceux qui s'opposent à cette mesure, les nouvelles cartes d'identité viendraient encourager la discrimination, notamment dans l'emploi et l'éducation (The Washington Post 21 oct. 1992; UPI 9 nov. 1992; Los Angeles Times 6 avr. 1993). Selon Hamid Khan, président de la Lahore High Court Association, plusieurs membres des minorités religieuses qui ont adopté un nom aux consonances musulmanes au cours des dernières années pour échapper à la discrimination n'auront aucun recours si leur religion est indiquée sur leur carte d'identité (IPS 23 déc. 1992). Cette même source rapporte que selon des observateurs de la scène pakistanaise, cette décision vise à éliminer de l'administration gouvernementale les citoyens non musulmans, et notamment les Ahmadis (ibid.). De fait, selon l'agence United Press International, les autorités islamiques ont affirmé devant des manifestants chrétiens, en novembre 1992, que ce règlement ne visait pas les chrétiens, mais plutôt les membres de la communauté ahmadie (UPI 9 nov.1992).
En novembre 1992, dix membres de l'Assemblée nationale, représentants de diverses minorités religieuses, ont menacé de démissionner si la résolution sur les cartes d'identité était adoptée et près d'une vingtaine de membres des assemblées provinciales s'y sont ouvertement opposés. Au Sindh, l'assemblée a voté, à l'unanimité, contre cette mesure (Reuters 23 nov. 1992; HRCP 1993, 43). Selon Amnesty International, le gouvernement pakistanais est allé de l'avant avec les nouvelles cartes d'identité partout au Pakistan, sauf dans le Sindh (Amnesty International 25 août 1993). Toutefois, selon un représentant de l'ambassade du Pakistan à Ottawa, la résolution sur les cartes d'identité a été rejetée par l'assemblée nationale à l'automne 1992 (Ambassade du Pakistan 22 sept. 1993). De son côté, la HRCP rapporte qu'environ deux millions de nouvelles cartes ont été émises en 1992 avant l'interruption des émissions en novembre de la même année (HRCP 1993, 43). Un article publié dans Asia Link indique que le gouvernement pakistanais aurait effectivement reconsidéré la question devant les pressions exercées par les protestataires (Asia-Link janv.-févr. 1993, 20).
3.6 Khatme Nubuwwat
Majlis Tahaffuz Khatme Nubuwwat (« association pour la protection de la finalité du prophète Mahomet ») (Kumar 1977, 93) a vu le jour sous le nom de Majlis-e-Ahrar (AMI 24 sept. 1993), un petit parti politique musulman qui s'opposait, sous le régime britannique des Indes, à la création d'un Etat islamique indépendant (Syed 1982, 80; Rehman 1993, 5). Le groupe aurait changé de nom au cours des années 1970, pour se rendre plus attrayant aux musulmans orthodoxes (ibid., 7; AMI 24 sept. 1993). Il est aujourd'hui couramment appelé Khatme Nubbuwat.
Les mullahs au sein de l'organisation exercent des pressions pour que soit interdit l'usage d'expressions coraniques dans les lieux de culte ahmadis, et auraient même, dans le passé, été de connivence avec les autorités pakistanaises, notamment dans la destruction de mosquées ahmadies (ibid. 1987, 94; Petrén et al. 1987, 108, 112). De même, selon la HRCP, le gouvernement pakistanais aurait encouragé les activités du Khatme Nubuwwat lors des événements qui ont précédé les émeutes de Nankana Sahib, notamment en leur confiant le maintien de l'ordre lors de ce qui devait être une simple manifestation (HRCP 1989, 9-12). En janvier 1990 dans la Province frontière du Nord-Ouest, des membres de l'aile jeunesse de l'organisation fondamentaliste ont dénoncé un groupe de jeunes Ahmadis qui s'étaient réunis pour réciter leurs prières. Cinq de ces jeunes Ahmadis ont été arrêtés, puis détenus plus de trois mois avant d'être remis en liberté (Amnesty International sept. 1991, 6). Asia Watch signale en outre qu'en mars 1992, l'émir de la mosquée de Khatme Nubuwwat située à Dera Ghazi Khan a déposé une plainte auprès du juge de district contre deux professeurs ahmadis qui avaient publié à Londres une traduction du Coran (News From Asia Watch sept. 1993, 19) dans une langue régionale, le seraiki (HRCP 1993, 46). Les deux hommes, accusés d'avoir profané le Coran et le nom de Mahomet ont été par la suite traduits en justice pour infraction aux alinéas 295(a),(b),(c) (ibid.). La DGDIR ne possède pas à l'heure actuelle de renseignements sur le suivi du cas de ces deux ahmadis.
Selon la HRCP, Khatme Nubuwwat fait partie des organisations qui ont encouragé l'adoption de la résolution sur les cartes d'identité (ibid., 120). La HRCP rapporte en outre le cas d'un Ahmadi d'Abbotabad que des membres de l'aile jeunesse du groupe extrémiste auraient kidnappé et torturé en novembre 1992, avant de le faire incarcérer en portant de fausses accusations contre lui (Slogan janv. 1993, 29).
L'Ahmadiyya Movement in Islam signale de plus dans son bulletin trimestriel d'avril 1993 la tenue d'une conférence de Khatme Nubuwwat à Rabwah, au cours de laquelle les conférenciers auraient notamment appelé les participants à exercer des pressions pour que le mouvement ahmadi soit interdit et que les Ahmadis, qu'ils ont qualifiés de « traîtres », soient mis à mort (Tale of Persecution avr. 1993, 2-3). En outre, des membres de l'organisation auraient agressé un étudiant ahmadi à Abbotabad en mai 1993. Bien que l'incident ait été dénoncé à la police, les agresseurs étaient toujours en liberté en juillet 1993 (ibid. juill. 1993, 5-6). Enfin, selon l'Ahmadiyya Movement in Islam, les membres du groupe radicaliste auraient comploté l'attaque d'une mosquée ahmadie à Karachi en juillet 1993 (ibid., 3). L'organisation ahmadie ajoute que Khatme Nubuwwat est appuyé par l'Arabie Saoudite et a étendu ses activités au-delà des frontières pakistanaises, et notamment en Angleterre (AMI 24 sept. 1993).
3.7 Répartition des incidents impliquant des Ahmadis sur le territoire pakistanais
Selon un représentant de la HRCP à Lahore, si le fait de vivre au sein d'une communauté ahmadie importante peut apporter un sentiment de sécurité, par contre, le fait d'être en grand nombre attire l'attention et peut être davantage « gênant » pour les autorités religieuses. Un Ahmadi qui vit à l'écart des grandes concentrations ahmadies peut plus facilement passer inaperçu (HRCP 27 sept. 1993). D'après Mujeeb-ur Rehman, avocat de la cour suprême du Pakistan, le degré de harcèlement dont sont l'objet les Ahmadis dépend surtout de la population et de l'administration en place dans le milieu où ils vivent. Selon Rehman, la communauté ahmadie de Rabwah a été la plus touchée des communautés ahmadies au Pakistan (Rehman 26 sept. 1993, 2). (La carte à la page iii indique la répartition des grandes concentrations d'Ahmadis sur le territoire pakistanais.)
La majorité des cas documentés par la HRCP, le Département d'Etat des Etats-Unis et les organismes de défense des droits de la personne ont été signalés, en 1992, dans les villes de Sargodha, de Rabwah, de Nankana Sahib et de Vehari au Pendjab et dans la ville de Kotri dans le Sindh et, en 1993, dans les villes de Rabwah, de Rawalpindi, de Faisalabad, et de Londhran au Pendjab et dans la ville d'Abbotabad dans la Province frontière du Nord-Ouest (Amnesty International 1992, 229; Country Reports 1992 1993, 1161, 1167-1168; HRCP Newsletter janv. 1993, 4; ibid. oct. 1992, 10; AMI 19 avr. 1993; Tale of Persecution juill. 1993, 3-5; Tale of Persecution avr. 1993, 2; News From Asia Watch 19 sept. 1993, 11-21). [ Pour plus de renseignements sur les poursuites judiciaires intentées contre des Ahmadis (et des membres d'autres minorités religieuses du Pakistan), veuillez consulter ces documents. Vous pouvez vous procurer ces documents à la bibliothèque de la DGDIR à Ottawa.]
4. RECOURS JURIDIQUES
Les amendements constitutionnels adoptés sous les régimes de Zulfikar Ali Bhutto et de son successeur Zia Ul-Haq au cours des années 1970 et 1980 ont ouvert la voie à l'ingérence gouvernementale dans le système judiciaire pakistanais (Petrén et al. 1987, 44-45; Asia Watch et le WRP 1992, 99-102). Encore aujourd'hui, le pouvoir judiciaire est généralement subordonné au pouvoir exécutif, surtout au niveau des cours inférieures (ibid., 101-102; News From Asia Watch 19 sept. 1993, 5; HRCP Newsletter janv. 1993, 9). En outre, l'appareil juridique pakistanais comprend depuis 1980 deux systèmes parallèles, l'un hérité des colonisateurs britanniques, l'autre issu des traditions coraniques. L'introduction de la Sharia (loi islamique) dans le système judiciaire pakistanais est venue limiter davantage l'autorité des tribunaux pakistanais de toutes les instances (Asia Watch et le WRP 1992, 99).
Rappelons que les cas d'infraction aux alinéas 298(b) et (c) sont entendus et instruits par les juges de première classe des cours inférieures de premier niveau, les magistrates courts, et les cas d'infraction à l'alinéa 295(c) par les cours inférieures de troisième niveau, les session courts (Jilani 23 déc. 1991, 1; Syed 16 sept. 1993; Rehman 26 sept. 1993, 1). Les appels sont interjetés devant les cours inférieures, les cours supérieures et la cour suprême (HRCP 27 sept. 1993).
Les gouvernements provinciaux ont le pouvoir notamment de nommer les juges des cours inférieures et de les démettre de leurs fonctions. Les juges des cours supérieures sont nommés par le président du Pakistan en collaboration avec le juge en chef de la cour suprême et le gouverneur de la province où se trouve la cour supérieure. Le président peut en tout temps transférer les juges des cours supérieures d'un district à un autre pour une période maximale de deux ans. Un juge qui refuse n'a d'autre choix que de prendre sa retraite. Si l'on reconnaît aux cours supérieures un certain degré d'indépendance, les cours inférieures sont par contre fortement influencées par les autorités provinciales et la police (Asia Watch et le WRP 1992, 102; Country Reports 1992 1993, 1163).
L'influence des autorités religieuses est venue davantage grever l'indépendance du système judiciaire pakistanais. La Federal Shariat Court (FSC), créée en mai 1980, est chargée de faire en sorte que les procédures et décisions législatives et juridiques soient toujours conformes à la Sharia. La FSC a le pouvoir d'exiger la révision des lois nationales en tout temps et ses décisions ont préséance sur celles des cours supérieures et des cours inférieures. Les membres de la FSC, qui ne sont pas toujours des juges, sont nommés par le gouvernement et peuvent être démis par ce dernier en tout temps. En outre, en vertu d'une loi promulguée par Nawaz Sharif en 1991, la Sharia a préséance sur la Constitution (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 5; Keesing's avr. 1991, 38152; ibid. mai 1991, 38193).
Selon Hina Jilani, avocate de la cour supérieure et membre de l'AGHS Associates Legal Aid Cell de Lahore, les autorités juridiques ont tendance à se ranger du côté des « agresseurs » quand le préjudice a été commis au nom des principes défendus par les intégristes religieux (Jilani 6 déc. 1991). De même, un représentant de la HRCP reconnaît qu'il est fort possible que l'impartialité des juges soient influencée par la présence des autorités religieuses dans les tribunaux (HRCP 27 sept. 1993). Rehman, avocat de la cour suprême du Pakistan, ajoute que les juges subissent l'influence des fondamentalistes du clergé musulman non seulement par leur présence aux audiences, mais également à l'extérieur de la cour. Devant des foules qu'ils ont eux-mêmes rassemblées et parfois devant des journalistes, ils accusent d'« anti-islamisme », d'« hérésie » ou de « pro-qadianisme » les juges qu'ils considèrent trop tolérants (Rehman 26 sept. 1993, 2). Selon Rehman, c'est le cas d'un juge de la cour supérieure de Peshawar qui a condamné des Ahmadis à des peines d'emprisonnement [traduction] « sans avoir respecté la procédure juridique et en rédigeant une décision lacunaire. La cour supérieure a sommé le juge de comparaître en personne pour expliquer cette lourde faute. Le juge a simplement répondu qu'en raison de la présence d'une foule à l'extérieur de la cour et de membres du clergé à l'intérieur, il a voulu trancher l'affaire au plus vite » (ibid.).
Rehman souligne que l'influence des autorités religieuses fondamentalistes se fait de plus en plus sentir à la cour suprême (ibid.).
Selon Asia Watch, les juges statuant sur les causes de « blasphème » doivent être musulmans (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 10). En outre, comme l'alinéa 295(c) ne définit pas clairement l'expression « remarques offensantes », la preuve de l'innocence repose sur une interprétation arbitraire de l'acte qui fait l'objet de l'accusation. Or, il n'existe pas dans la loi pakistanaise de recours contre la partialité politique et le caractère arbitraire auxquels sont soumises les décisions judiciaires (ibid., 3, 10).
La lenteur des procédures ajoute aux difficultés qui se posent aux Ahmadis devant la justice pakistanaise. Les accusés sont parfois détenus pendant de longues périodes avant que leur arrestations ne soit même signalée au tribunal (Asia Watch et le WRP 1992, 74). La libération sous caution est accordée plus fréquemment dans les cas d'infraction aux alinéas 298(b) et (c) que dans les cas d'infraction à l'alinéa 295(c), où elle est généralement refusée. La durée de la détention préalable, au poste de police ou en prison, varie selon le cas (Rehman 26 sept. 1993, 2). En outre, en raison de procédures juridiques désuètes, du nombre considérable de causes reportées et d'une pénurie de juges, les causes peuvent demeurer en instance pendant plusieurs années (Country Reports 1992 1993, 1163; HRCP 1993, 6). Asma Jahangir, avocate de la cour supérieure de Lahore, présidente de la HRCP et membre du comité de rédaction du mensuel Slogan, indique dans un article de cette publication que l'instruction des causes criminelles s'étale généralement sur deux ans et les causes peuvent demeurer en appel devant les cours supérieures pendant plus de quatre ans avant d'être entendues (Slogan avr. 1992, 4-5). Selon Amnesty International, aucune des causes de blasphème présentées devant les tribunaux en 1992 n'avaient été instruites à la fin de la même année (Amnesty International 1992, 229). L'organisation Asia Watch souligne qu'en vertu de la loi, les accusations de blasphème inspirées par des motifs politiques et personnels peuvent se traduire par des arrestations même si ces accusations sont peu ou pas corroborées. C'est-à-dire qu'à la suite d'une accusation de blasphème émanant d'un seul témoin, l'accusé peut être détenu pendant plusieurs années en attendant d'être cité à son procès (News From Asia Watch 19 sept. 1993, 11).
5. POSSIBILITES DE FUITE INTERIEURE
Selon Rehman et le Département d'Etat des Etats-Unis, les Pakistanais peuvent se déplacer librement à l'intérieur du pays (Country Reports 1992 1993, 1168; Rehman 26 sept. 1993). Toutefois, il est généralement impossible d'échapper à la justice pakistanaise (HRCP 27 sept. 1993) à moins de demeurer dans la clandestinité (Syed 16 sept. 1993) ou de se réfugier dans les zones tribales où la juridiction pakistanaise intervient moins facilement qu'ailleurs au Pakistan (HRCP 27 sept. 1993). Par contre, selon un représentant de l'Ahmadiyya Movement in Islam, s'il est vrai que le pouvoir d'intervention du gouvernement est limité dans ces régions du pays, il n'en reste pas moins que les zones tribales ne constituent pas un lieu de refuge pour les Ahmadis, en raison de l'hostilité qui y règne à l'égard des membres de la communauté ahmadie (AMI 12 oct. 1993). La police a son propre système d'échange d'information, sous la forme par exemple de contacts réguliers entre le commissaire de district et les postes locaux (Syed 16 sept. 1993). En outre, selon la loi, les services de police ont le devoir de s'entraider d'une province à l'autre; ainsi, la validité des mandats d'arrestation dépasse le cadre provincial (ibid.; HRCP 27 sept. 1993; Rehman 26 sept. 1993).
6. DROIT DE SORTIE ET DE RETOUR
Tout citoyen pakistanais qui quitte le Pakistan sans passeport ou omet ou falsifie des renseignements dans le but d'obtenir un passeport s'expose à des sanctions qui sont énoncées dans la loi sur les passeports (Passport Act) de 1974 (Jilani 23 déc. 1991, 1). Une copie des clauses pertinentes de cette loi se trouve en annexe.
Selon des renseignements obtenus au cours d'un récent entretien téléphonique avec un représentant de la HRCP à Lahore, si les Ahmadis peuvent s'attendre à des représailles des autorités pakistanaises pour avoir omis ou falsifié des renseignements dans le formulaire de demande de passeport, il en est autrement de leurs coreligionnaires. La communauté ahmadie est bien au fait des pressions exercées sur les Ahmadis au Pakistan, de sorte qu'elle ne tiendrait pas à l'écart un Ahmadi qui se serait déclaré « non musulman » pour obtenir un passeport (HRCP 27 sept. 1993). Par ailleurs, selon Rehman, la déclaration de profession de foi qui figure sur les passeports est formulée de telle sorte que les Ahmadis ne peuvent la signer (voir la copie du formulaire de demande de passeport en annexe). Les Ahmadis se font donc délivrer un passeport dans lequel la case « ahmadi » de la rubrique « religion » est cochée, et bien que leur appartenance à l'Islam constitue un principe fondamental de la religion ahmadie, l'utilisation de ces passeports ne vient en rien offenser les autres membres de leur communauté (Rehman 26 sept. 1993, 2). Pour plus de renseignements sur les passeports, veuillez consulter le document intitulé Pakistan : le sort réservé aux Ahmadis qui retournent dans leur pays.
En vertu de l'Exit from Pakistan (Control) Ordinance No. XLVI de 1981, le gouvernement pakistanais se réserve le droit de refuser à quiconque de quitter le pays, et ce sans intervention judiciaire aucune, même si la personne possède tous les documents de voyage pertinents et valides (Hannum 1987, 81) [ Selon Rehman, cette loi est probablement toujours en vigueur (26 sept. 1993). La DGDIR attend toujours une confirmation officielle de Rehman et de l'ambassade du Pakistan à Ottawa à ce sujet.]. En outre, les autorités pakistanaises possèdent une liste de contrôle qui leur permet d'effectuer des vérifications sur certains individus (HRCP 27 sept. 1993). Selon les Country Reports on Human Rights Practices for 1992, cette liste, dont les gouvernements précédents s'étaient servis pour contrôler les voyages à l'extérieur, n'aurait été utilisée par le gouvernement de Sharif que dans des cas criminels (1993, 1168). Elles ont ainsi interdit à des trafiquants de drogue de quitter le pays en 1993 (HRCP 27 sept. 1993). Enfin, il demeure difficile, voire impossible, de sortir du Pakistan sans éviter les postes frontières, étant donné les conflits frontaliers avec l'Afghanistan et l'Inde. Quant à la frontière iranienne, elle demeure, en vertu d'un traité d'extradition pakistano-iranien, fortement gardée (Gouvernement de l'Iran 5 juin 1991) [ Selon Rehman, ce traité est probablement toujours en vigueur (26 sept. 1993). La DGDIR attend toujours une confirmation officielle de Rehman et de l'ambassade du Pakistan à Ottawa à ce sujet.].
Selon Rehman et un représentant de la HRCP, la loi pakistanaise ne prévoit pas de sanctions pour ceux qui ont demandé l'asile dans un autre pays au cours d'un séjour à l'extérieur du Pakistan. Toutefois, il pourrait y avoir du harcèlement (au niveau politique et religieux) de la part des autorités pakistanaises si la situation devenait gênante pour le gouvernement (Rehman 26 sept. 1993, 2; HRCP 27 sept. 1993). Cependant, rien ne permet d'affirmer qu'un citoyen pakistanais qui retourne au Pakistan après avoir revendiqué le statut de réfugié dans un autre pays se fera arrêter par les autorités pour cette raison à son retour (HRCP 27 sept. 1993). Le quotidien ourdou Dawat-E-Amal a rapporté en mai 1993 le cas d'un Ahmadi qui aurait été déporté au Pakistan après s'être vu refuser le statut de réfugié au Canada et qui aurait été arrêté quelque temps après son retour au Pakistan. L'article précise toutefois que la personne en question aurait été arrêtée pour avoir prêché sa religion (Dawat-E-Amal 10 mai 1993; Calgary Herald 20 avr. 1993).
L'Ahmadiyya Movement in Islam affirme cependant qu'un Ahmadi qui demande l'asile dans un autre pays risque de se faire arrêter par les autorités à son retour au Pakistan, notamment pour avoir enfreint l'Ordonnance XX, c'est-à-dire pour s'être déclaré musulman (AMI 24 sept. 1993) et sera très probablement l'objet de harcèlement de la part d'éléments radicaux du clergé musulman et de groupes tels que Khatme Nubuwwat et Jamaat-e-Islami (ibid. 7 déc. 1993).
7. PERSPECTIVES D'AVENIR
Selon les observateurs de la scène sociopolitique pakistanaise, la situation des droits de la personne et notamment des minorités religieuses pourrait peut-être s'améliorer avec le retour au pouvoir de Benazir Bhutto (Taylor 26 août 1993; Ali 26 août 1993; Syed 30 août 1993). Toutefois, si Bhutto est sortie victorieuse du scrutin national du 6 octobre, elle devra manoeuvrer de façon à maintenir l'appui des petits partis et des candidats indépendants qui ont rendu possible son élection au poste de premier ministre (The Ottawa Citizen 20 oct. 1993, A8). En outre, Bhutto, comme les autres leaders politiques pakistanais, ne peut se permettre, dans le contexte actuel, d'amender ou d'abroger les lois relatives à la minorité ahmadie (Ali 26 août 1993; Syed 30 août 1993), même si l'idée de revenir à un électorat uni [ En 1978, le gouvernement de Zulfikar Ali Bhutto a divisé l'électorat pakistanais en deux entités distinctes, l'une musulmane, l'autre non musulmane (Rehman 1993, 13).] a été l'un des éléments de la plate-forme électorale de son parti, le Parti du peuple pakistanais (PPP) (The Pakistan Observer 2 sept. 1993). Selon Salamat Ali, correspondant du Far Eastern Economic Review à Islamabad, s'il y a une amélioration, elle se fera sentir dans la vie de tous les jours mais sera difficilement reflétée dans des lois (Ali 26 août 1993).
8. ANNEXES
8.1 Libellé de l'alinéa 295(c) du Code pénal pakistanais
Tel qu'adopté en 1986:
Tel qu'amendé en avril 1991:
Source : Jilani, Hina. 23 décembre 1991. Lettre adressée à la DGDIR.
8.2 Libellé des alinéas 298(b),(c) ajoutés au Code pénal pakistanais en 1984
Source: Gualtieri, Antonio R. 1989. Conscience and Coercion. Montréal : Guernica.
8.3 Formulaire de demande de passeport du gouvernement du Pakistan
Déclaration que doivent signer les demandeurs musulmans
Source: Gualtieri, Antonio R. 1989. Conscience and Coercion. Montréal : Guernica.
8.4 Libellé des articles 1 à 6 de la loi sur les passeports de 1974
Source : Jilani, Hina. 23 décembre 1991. Lettre adressée à la DGDIR.
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