La situation actuelle
- Author: Research Directorate, Immigration and Refugee Board, Canada
- Document source:
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Date:
1 May 1993
GLOSSAIRE
ADPO Association démocratique du peuple oromo
FDRPE Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien
FILO Front islamique de libération des Oromos
FLAO Front de libération Abo Oromo
FLO Front de libération oromo
FPLE Front populaire de libération de l'Erythrée
FPLT Front populaire de libération du Tigré
FULPO Front uni de libération du peuple oromo
ODPO Organisation démocratique du peuple oromo
PTE Parti des travailleurs éthiopiens
1. INTRODUCTION
En juillet 1991, après des siècles de pouvoir impérial et dix-sept années de dictature militaire sous le régime de Mengistu Haïlé Mariam, l'Ethiopie s'est dotée d'un nouveau gouvernement de transition dirigé par le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE), coalition dominée par le Front populaire de libération du Tigré (FPLT). Le FDRPE a pu former ce nouveau gouvernement à l'issue de pourparlers de paix présidés par les Etats-Unis (ODR janv. 1992; Amnesty International Ethiopia nov. 1991, 1). Un conseil de représentants du FDRPE, composé de 87 membres, est alors entré en fonction à la suite d'un accord conclu entre les différents groupes ethnico-politiques (Amnesty International Ethiopia nov. 1991, 1).
Une conférence nationale de paix s'est tenue des 1er au 5 juillet 1991, à Addis-Abeba, au cours de laquelle les 24 organisations politiques présentes ont décidé de remplacer la Constitution de 1987 par une charte « comportant 20 articles et formant la base d'une nouvelle Constitution » (ODR janv. 1992, 1). Cette charte reconnaît la Déclaration universelle des droits de l'homme comme loi suprême du pays (News from Africa Watch 8 mai 1992, 1).
En février 1992, le Conseil des représentants établit une commission électorale chargée de l'élection au suffrage universel des députés régionaux et nationaux (BBC Summary 3 févr. 1992). En juin de la même année, des élections ont été tenues dans le but de former des conseils locaux et régionaux. Les élections se sont déroulées en présence d'observateurs internationaux, chapeautés par le Joint International Observer Group (JIOG) (NDI/AAI 1992 1,6,7). Selon le gouvernement de transition, aucun incident n'aurait été constaté lors des élections (Le Devoir 22 juin 1992). Toutefois, un groupe d'observateurs de la Heindrich Boll Foundation auraient constaté des irrégularités dont certaines formes de harcèlement ainsi que des problèmes administratifs (NDI/AAI 1992 6-7). De plus, les élections ont été retardées dans les régions de l'Afar, de Somalie et de Harar, en raison de l'insécurité qui y règne par la présence de plusieurs groupes armés (New African nov. 1992a, 40; Le Devoir 22 juin 1992).
Le nouveau régime en place, recueillant l'héritage du dictateur déchu Mengistu Hailé Mariam, et faisant face à la complexité ethnico-politique des forces en présence, a du mal à établir son autorité. Le traitement que les nouveaux dirigeants réservent aux anciens dignitaires du régime de Mengistu, que l'on ne peut qualifier encore de « chasse aux sorcières », montre clairement la carence du système judiciaire et témoigne de la capacité du nouveau gouvernement à limiter les droits civiques de ses opposants (Country Reports 1992 1993, 86). Le fragile équilibre éthiopien a de nouveau été ébranlé par la chute du régime de Mengistu, laissant le champ libre aux aspirations autonomistes de certains groupes, en particulier les Oromos (Le Monde 30 déc. 1992). Ces derniers, tout d'abord alliés au nouveau gouvernement, sont entrés en conflit ouvert avec celui-ci au cours de l'année 1992 et se sont retirés de la coalition gouvernementale (Le Monde 25 juin 1992). La question « oromo » constitue un brandon de discorde dans le processus de démocratisation en Ethiopie (New African nov. 1992b, 42-43).
L'Erythrée, ancienne province éthiopienne à qui la Conférence de paix de juillet 1991 avait officiellement reconnu le droit de déterminer son avenir politique, a massivement voté pour son indépendance lors du référendum tenu en avril 1993. Toutefois, ce n'est que le 24 mai 1993 qu'aura lieu la déclaration formelle d'indépendance, date du second anniversaire de la prise d'Asmara, la capitale, par les forces du Front populaire de libération de l'Erythrée (FPLE) (La Presse 26 avr. 1993).
2. LE TRAITEMENT RESERVE AUX DIGNITAIRES, SOLDATS ET POLICIERS DE L'ANCIEN REGIME
2.1 Les membres du Parti des travailleurs éthiopiens (PTE) et les dignitaires
Le Parti des travailleurs éthiopiens (PTE), parti unique sous Mengistu, a été qualifié d'« institution criminelle » et interdit par le nouveau gouvernement de transition (News from Africa Watch 8 mai 1992, 10). A la fin mai 1991, des milliers de civils, pour la plupart des dignitaires de l'ancien gouvernement ont été mis en détention, sans inculpation, par les nouvelles autorités éthiopiennes (Country Reports 1992 1993, 86). A la fin de 1992, entre 1 500 et 2 000 d'entre eux se trouvaient toujours en détention, quoique dans des conditions plutôt bonnes, semble-t-il (ibid.; Human Rights Watch 1993, 14).
Au cours de l'année 1992, les anciens membres du PTE ont été victimes des carences du système judiciaire. La paralysie de l'appareil judiciaire empêche la tenue de leur procès, pourtant promis par le FDRPE lors de la chute de Mengistu (Human Rights Watch 1993, 14; Country Reports 1992 1993, 86). De plus, les juges et les procureurs de l'ancien régime ont tous été démis de leurs fonctions (ibid.). Ce n'est qu'en août 1992 qu'un procureur spécial a été nommé pour s'occuper des cas des anciens dignitaires du régime de Mengistu (Amnesty International 16 févr. 1993b, 3; Country Reports 1992 1993, 86). Toutefois, le gouvernement transitoire a promis des procès justes et la présence d'organisations internationales pour s'assurer de l'équité des sentences (Amnesty International 16 févr. 1993b, 1).
Depuis 1991, les anciens membres du PTE ont été frappés par des restrictions de voyage, levées en août 1992 (Horn of Africa Bulletin sept.-oct. 1992, 11). D'autres droits fondamentaux, comme le droit au travail, ont également été restreints en 1991, mais néanmoins restaurés au cours de l'année 1992 (Human Rights Watch 1993, 14). De plus, on a retiré aux anciens membres du PTE le droit de vote et celui de se présenter comme candidats aux élections (News from Africa Watch 8 mai 1992, 10-11).
2.2 Les membres des forces armées
En mai 1991, lors de la chute de Mengistu, l'armée éthiopienne, autrefois la plus importante d'Afrique, a été mise en déroute par les efforts conjugués des forces rebelles, regroupées au sein du FDRPE (The Christian Science Monitor 5 août 1991, 6). Des centaines de soldats, par peur de représailles de la part des nouvelles autorités, ont trouvé refuge à l'étranger (Xinhua 3 juill. 1991). Peu après, la plupart d'entre eux ont été rapatriés de Djibouti, du Kenya et du Soudan (IPS 12 août 1991; The Indian Ocean Newsletter 31 août 1991). Le peu de programmes d'aide pour la réintégration des ex-soldats (au nombre de 400 000) à la vie civile, n'ont pu répondre adéquatement à leurs besoins (News from Africa Watch 8 mai 1992, 3). Le retour de certains dans leurs régions d'origine a ajouté un poids économique supplémentaire aux régions rurales (The Christian Science Monitor 5 août 1991, 6).
Certains dirigeants de l'armée, toujours en détention, sont accusés par le gouvernement de transition d'avoir commis des crimes de guerre ou des abus de pouvoir, et sont donc promis à des sentences sévères (Amnesty International 16 févr. 1993b, 1). Le gouvernement de transition a cependant accepté que les procès qui auront lieu se déroulent en présence d'observateurs internationaux comme Amnesty International (ibid.).
2.3 Les membres du corps policier et des Kebelés
Après la chute de Mengistu, les officiers de police ont été congédiés « en bloc », la plupart pour corruption (News from Africa Watch 8 mai 1992, 3). L'absence de policiers compétents a donné lieu à des arrestations arbitraires (Country Reports 1992 1993, 86). Ce n'est qu'en avril 1992 que le nouveau gouvernement éthiopien a pris des mesures pour le rétablissement d'une véritable force policière (ibid.). Bien que les agents de la circulation aient peu après repris du service, les policiers réguliers, quant à eux, ont dû passer par une phase de « réhabilitation » (ibid.; News from Africa Watch 8 mai 1992, 3). Il n'en demeure pas moins que l'absence d'une force policière efficace en Ethiopie représente toujours un problème majeur pour le gouvernement en place (Country Reports 1992 1993, 86;News from Africa Watch 8 mai 1992, 3).
Les Kebelés constituaient la plus petite unité de la structure administrative éthiopienne à l'époque de Mengistu. Elle faisait office de véritable station de police au niveau local et servait d'organe de renseignements (NDI/AAI 1992, iv; Country Reports 1991 1992, 118). Officiellement dissous et rebaptisés Comités pour la paix et la stabilité par le gouvernement de transition, ces organes continuent à jouer un rôle déterminant dans le système de sécurité éthiopien (Amnesty International 16 févr. 1993a, 2; Country Reports 1991 1992, 118). La direction de ces comités a toujours le pouvoir d'arrêter des individus et de leur imposer des restrictions (Amnesty International 16 févr. 1993a). Les personnes recherchées par les forces de sécurité sont souvent reférées aux Kebelés pour les interrogatoires (ibid.).
Deux ans après la chute de Mengistu, la situation, tant au niveau de l'appareil judiciaire qu'au niveau de la sécurité, demeure incertaine en Ethiopie, le gouvernement hésitant entre un certain laxisme et une approche plus sévère face aux personnes associées à l'ancien régime.
3. LE CONFLIT OPPOSANT LES OROMOS AU NOUVEAU GOUVERNEMENT
Les anciens dignitaires de Mengistu n'ont pas été les seuls à devoir s'adapter, parfois douloureusement, au nouveau régime éthiopien. Les Oromos, forts de leur nombre, ont vu dans la chute du régime et dans l'installation du gouvernement de transition une occasion de faire valoir leurs revendications politiques. Cependant, leurs rapports avec le nouveau gouvernement n'ont cessé de se détériorer depuis la chute de Mengistu.
3.1 Historique du conflit
Les Oromos, connus aussi sous le nom de Gallas (littéralement « esclaves », même s'ils rejettent cette appellation qui leur a été donnée surtout par les Amharas) constituent le groupe ethnique le plus nombreux en Ethiopie (Documentation-Réfugiés 31 août-9 sept. 1990, 10). On les retrouve principalement au sud, au sud-est et sud-ouest du pays ainsi que dans les hauts plateaux éthiopiens (ibid.). Les Oromos vivent de l'agriculture et sont pour la plupart des musulmans sunnites. Un certain nombre d'entre eux sont chrétiens ou animistes (ODR janv. 1992, 1).
Vers la fin du XIXe siècle, les Oromos ont été conquis par l'empereur des Amharas, Mélénik, qui a annexé leurs territoires à l'empire amhara (Documentation-Réfugiés 31 août-9 sept. 1990, 17; New African nov. 1992b, 42-43). Depuis ce temps, les colonisateurs amharas (les « neftegna ») sont venus les déloger de leurs terres traditionnelles et leur ont imposé leur langue (New African nov. 1992b, 42-43). Les propriétaires amharas ont procédé également au massacre des Oromos qui résistaient aux politiques d'assimilation de l'empire éthiopien (ibid.; Documentation-Réfugiés 31 août-9 sept. 1990, 17).
3.2 Mouvements et factions chez les Oromos
Dès la chute de l'empereur Hailé Sélassié en 1975, les Oromos se sont engagés dans une « lutte de libération » en formant le Front de libération oromo (FLO) (Documentation-Réfugiés 31 août-9 sept. 1990, 17; New African nov. 1992b, 42-43). Tout d'abord, le FLO a mené la lutte contre le régime de Mengistu aux côtés du Front populaire de libération de l'Erythrée (FPLE) et du Front populaire de libération du Tigré (FPLT) (ibid.). Toutefois, dans la lutte finale ayant mené à la chute de Mengistu, des divergences d'opinions sont apparues concernant le droit à l'autodétermination, entre le FLO et le FPLT, principale composante du Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE) au pouvoir (New African nov. 1992b, 42-43).
Ce désaccord a créé des divisions parmi les Oromos. Une faction du FLO a formé un nouveau groupe, l'Organisation démocratique du peuple oromo (ODPO), qui s'est joint à la coalition gouvernementale (ibid.). En novembre 1992, des membres de l'ODPO ont toutefois été arrêtés dans la province de Wollega (dans l'ouest de l'Ethiopie), à Dire Dawa (dans l'est), à Ambo et à Asella (près de la capitale). Ces arrestations témoignent des conflits grandissants entre les Oromos et le gouvernement du FDRPE (The Indian Ocean Newsletter 21 nov. 1992).
A la fin des années 1980, le Front islamique de libération des Oromos (FILO) voit le jour (Gilkes juill. 1992, 19). Le FILO s'est rapproché du FLO au cours de la première moitié de 1992, les deux groupes luttant activement contre un ennemi commun, le FDRPE (ibid., 20). En mars 1992, le FLO et le FILO ont été accusés par le FDRPE d'avoir conjointement comploté la prise d'Harrar (ibid.). Deux autres groupes oromos, le Front uni de libération du peuple oromo (FULPO) et le Front de libération Abo Oromo (FLAO) ont des représentants au parlement éthiopien de l'après-Mengistu (ibid.).
3.3 Rupture entre le FLO et le gouvernement
Le FLO n'est pas resté longtemps au sein du gouvernement transitoire mis en place à la suite de la Conférence nationale de juillet 1991. En effet, bien que le FLO ait tout d'abord eu quatre ministres dans le gouvernement de coalition et douze sièges à l'Assemblée provisoire, la situation s'est rapidement dégradée entre les Oromos et le pouvoir central (Le Monde 25 juin 1992; Journal de Genève 26 juin 1992). Le FLO a entamé une lutte armée d'autodétermination dans diverses régions du pays. Nombre de ses sympathisants ont été emprisonnés et certains seraient même morts en prison, en raison des conditions rigoureuses de détention (News from Africa Watch 8 mai 1992, 6). En janvier 1992, deux dirigeants du Front islamique de libération des Oromos (FILO), allié au FLO, ont été tués par les forces du FDRPE à Dire Dawa dans l'est du pays (ibid.). En mars de la même année, lors d'une manifestation interdite organisée par le FLO dans la ville de Weter, dans l'est du pays, les forces du FDRPE ont fait feu en direction de la foule (AFP 31 mars 1992). Selon la radio nationale, 24 personnes auraient trouvé la mort lors de ces affrontements (Human Rights Watch 1993, 11). Toutefois, le FLO a pour sa part indiqué que 90 personnes étaient mortes et 300 autres blessées au cours de cette manifestation (AFP 31 mars 1992).
La rupture définitive entre le gouvernement de transition et le FLO a suivi de peu les élections locales et régionales qui ont eu lieu en juin et juillet 1992 (Le Monde 25 juin 1992; Journal de Genève 26 juin 1992). A la suite de l'arrestation de certains de ses candidats et de la fermeture de ses bureaux à Addis-Abeba, le FLO a décidé de boycotter les élections locales et régionales (Horn of Africa Bulletin juill.-août 1992, 24). Plusieurs sympathisants du FLO ont par la suite été détenus par le FDRPE et, selon un récent rapport de Human Rights Watch, au moins 1 000 Oromos étaient toujours emprisonnés en octobre 1992 (Human Rights Watch 1993, 12). Après le retrait définitif des représentants du FLO du gouvernement provisoire, les dirigeants ont été contraints à l'exil volontaire ou au retour dans les régions contrôlées par leur mouvement (ibid., 11). Selon Amnesty International, les Oromos soupçonnés de faire partie du FLO n'ont actuellement aucune alternative de fuite intérieure en Ethiopie, même dans la région oromo (Région 4), peuplée d'Oromos et contrôlée par l'Association démocratique du peuple oromo (ADPO), alliée au gouvernement (16 févr. 1993a, 1).
3.4 Violations des droits de la personne par le FLO
Le FLO a toutefois été lui aussi à l'origine de violations de droits de la personne. En décembre 1991, des cadres du FLO ont incendié des villages et tué quelque 144 chrétiens, essentiellement Amharas, à Arga Guugu et Harerghe (Human Rights Watch 1993, 11). En avril 1992, le FLO aurait attaqué et tué 150 civils, des Amharas pour la plupart, à Bedeno dans la région de Harerghe (ibid.). Nombre des victimes auraient été forcées de sauter du haut de falaises (ibid.). Selon un bulletin de la radio nationale émis en mai 1992, les violences politiques menées par le FLO avaient alors pris de l'ampleur dans les régions du Balé, du sud du Shoa et du Sidamo (AFP 11 mai 1992).
Le FDRPE et le FLO ont toutefois signé, en avril 1992, un accord de cessez-le-feu sous les auspices des Etats-Unis et du gouvernement provisoire érythréen. Cet accord précisait que les forces des deux camps devaient être cantonnées dans leurs bases respectives (The Indian Ocean Newsletter 18 avr. 1992, 3).
La lutte armée entre le FLO et le FDRPE a continué néanmoins, comme ce fut le cas dans la région du Balé, où des combats entre ces deux forces ont fait rage à la fin juin 1992 (Marchés Tropicaux 10 juill. 1992, 1851). A nouveau, en novembre 1992, des combats se sont déroulés dans les provinces du Balé, de Wollega, de Kaffa, de Gojjam et à Begemder; les conditions de sécurité restent toujours précaires dans ces régions (The Indian Ocean Newsletter 28 nov. 1992).
Les relations conflictuelles des Oromos, forts de leur nombre, avec certains autres groupes ethniques ne se limitent pas qu'aux Ahmaras, l'ancien groupe dominateur, et aux Tygréens, fortement représentés dans le nouveau gouvernement transitoire. D'autres combats interethniques, notamment à Dire Dawa en juillet 1991, ont fait une vingtaine de morts au cours d'affrontements entre milices issas (somalis) et oromos (BBC Summary 12 juill. 1991).
4. PERSPECTIVES D'AVENIR
La violence qui perdure dans les diverses régions de l'Ethiopie prend racine dans la rivalité entre certaines organisations ethnico-politiques, alimentées par des aspirations autonomistes, comme c'est le cas chez les Oromos (Human Rights Watch 1993, 12). Les revendications autonomistes des divers peuples de l'ancien empire éthiopien semblent porter atteinte à la stabilité future de l'Etat éthiopien (Le Monde 30 déc. 1992). Les nouvelles autorités doivent relever le défi du respect des droits des peuples et des individus, tout en préservant l'unité nationale et en maintenant le consensus politique. Un autre facteur important de stabilité est le redressement de l'économie nationale, ravagée par plus de trente années de guerre civile. Le passage d'une économie de guerre civile à une économie de paix ne se présente pas sans douleur dans le contexte actuel, comme en témoigne le recrutement de soldats sans emploi par les milices ethniques et les divers groupes se livrant au banditisme (Human Rights Watch 1993, 12). La montée du chauvinisme ethnique a été alimentée par l'instauration d'un fédéralisme ethnique, par les aspirations autonomistes, et par le sécessionisme érythréen. Selon Amnesty International, tous les groupes ethniques vivant dans une région où ils sont minoritaires sont actuellement vulnérables (Amnesty International 16 févr. 1993a, 1). Lors d'une visite du Secrétaire général des Nations Unies, Boutros Boutros Ghali, en janvier 1993, des étudiants ont même manifesté leur désaccord de l'appui onusien au référendum de l'Erythrée.
Il est difficile pour le moment d'évaluer les conséquences des élections de juin 1992 sur l'avenir de la démocratie en Ethiopie. Bien que ces élections avaient pour but ultime de résoudre les conflits armés entre les groupes ethniques, elles n'ont pu y mettre fin dans les régions méridionales du pays (NDI/AAI 1992, 2,4).
Bien que sectorielles, ces élections furent la première occasion fournie aux Ethiopiens de choisir démocratiquement leur avenir politique (Third World Report 12 août 1992, 1). Elles ont démontré la volonté des nouveaux dirigeants d'inclure dans le processus de démocratisation la majorité des Ethiopiens, y compris les dignitaires de l'ancien régime, les forces d'opposition et les divers groupes ethniques qui composent la complexe mosaïque éthiopienne (plus de 80 ethnies) (Country Reports 1992 1993, 90).
Malgré les difficultés actuelles, le nouveau régime éthiopien émerge tout de même de 17 années de totalitarisme et de siècles de féodalisme sous le régime impérial. Seul l'avenir nous dira si l'introduction d'un système démocratique se fera avec succès ou si les problèmes ethniques et politiques de ce vaste pays créeront des obstacles majeurs à la démocratisation.
5. REFERENCES
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