Guatemala : le rôle de l'armée
- Author: Research Directorate, Immigration and Refugee Board, Canada
- Document source:
-
Date:
1 January 1991
« Au Guatemala, la violence l'emporte nettement sur le règne du droit ».
J. Solomon
The Christian Science Monitor
20 novembre 1990
1. INTRODUCTION
1.0 Considérations générales
Selon le groupe anglais Article 19, un organisme de défense des droits de la personne à Londres, « la violence en soi est devenue un principal moyen d'expression politique au Guatemala » (Latin America Regional Report 6 déc. 1990, 4). La violence est telle que certains observateurs la compare à celle qui peut être associée à la guerre (Central America Report 29 juin 1990, 190). On attribue la terreur omniprésente au Guatemala à la violence arbitraire et aux violations des droits de la personne exercées contre ceux qui s'opposent ou qui sont soupçonnés de s'opposer au régime.
L'élection d'un gouvernement civil en 1986 a suscité un regain d'espoir au Guatemala. Toutefois, l'espoir est rapidement devenu illusion : le gouvernement s'est aussitôt révélé incapable (certains observateurs prétendent qu'il n'avait pas la volonté) de mettre un frein aux violations des droits de la personne et aux actes de violence perpétrés, paraît-il, par les forces armées. Un gouvernement nouvellement élu doit entrer en fonctions le 14 janvier 1991. On s'attend à ce qu'il cherche à faire régner une paix interne en prouvant qu'il peut contrôler l'armée. Toutefois, les observateurs demeurent sceptiques et croient que le monologue actuel des militaires doit être remplacé, en tout premier lieu, par un dialogue soutenu.
1.1 Les rapports entre le gouvernement et les forces armées
La Constitution du Guatemala établit clairement que le président de la République est également commandant en chef des forces armées (Blaustein et Flanz 1986, 72). En pratique, toutefois, les forces armées conservent une bonne partie des pouvoirs qu'elles détenaient avant de permettre le retour à un régime civil en janvier 1986. D'après un observateur, en rédigeant l'actuelle Constitution du Guatemala, décrétée en mai 1985, les auteurs auraient pris garde de ne pas dépasser les limites acceptables aux militaires, comme c'était le cas pour les trois constitutions précédentes (Aguilera 1989, 168). Les faits tendent à confirmer que les forces armées constituent la principale force au Guatemala. Avant de permettre le retour à un régime civil avec l'entrée en fonctions du président désigné, Vinicio Cerezo Arevalo, les forces armées ont décrété une amnistie interdisant « toute poursuite judiciaire contre des militaires pour des violations des droits de la personne et des crimes politiques perpétrés entre mars 1982 et janvier 1986 » (Delury 1983, 432). Sous le régime du président Cerezo, deux lois d'amnistie semblables ont été promulguées en octobre 1987 et en juin 1988. Selon Amnesty International, ces amnisties ont contribué à « créer un climat favorable à de nouvelles violations » puisque l'adoption de ces lois revient à légitimer les violations passées (Amnesty International 1990, 104; Latin America Regional Report 6 déc. 1990, 4).
Il est rare que les politiciens et les autorités gouvernementales contredisent ou défient l'appareil militaire sur quelque question que ce soit, préférant se limiter à prendre des mesures qui seront tolérées, à leur avis, par les militaires (Aguilera 1989, 168; The Christian Science Monitor 11 déc. 1990, 8). Selon Americas Watch, organisme de surveillance à New York, l'administration du président Cerezo « a immanquablement toléré et, pire encore, excusé les violations indescriptibles commises par les hommes que le président est censé commander » (Central America NewsPak 18 juin-1er juill. 1990, 3A). Par ailleurs, des diplomates occidentaux estiment que les deux tentatives de coup d'état, organisées par la droite en mai 1988 et mai 1989, ont forcé le président Cerezo à céder la majeure partie de ses pouvoirs aux forces armées, faisant de la présidence « une façade pour la continuation du régime militaire » tout en laissant « de moins en moins d'espace à l'opposition politique légitime » (Ibid.; Inter-Church Committee janv. 1990, 8).
2. VIOLATIONS DES DROITS DE LA PERSONNE : LES FORCES DE SECURITÉ
En dehors des forces armées, personne n'est complètement à l'abri des violations des droits de la personne, que ce soit sur le plan physique ou sur le plan psychologique. Selon des groupes fiables effectuant un suivi de la situation, les personnes suivantes sont vulnérables : enfants, journalistes, réfugiés, personnes déplacées, étudiants universitaires, paysans autochtones et membres d'organisations paysannes, syndicalistes, membres du clergé et travailleurs religieux, témoins de crimes, dirigeants d'organismes de défense des droits de la personne et toute personne soupçonnée de s'opposer au gouvernement. Au cours des 30 dernières années, les forces de sécurité gouvernementales auraient été responsables de la mort de 100 000 personnes et de la disparition de 40 000 autres (Central America NewsPak 27 août-9 sept. 1990, 7). En 1989, le Centre pour la recherche, l'étude et la promotion des droits de la personne [Centre for Human Rights Research, Study and Promotion of Human Rights (CIEPRODH)] a enregistré 1 035 assassinats, 226 enlèvements et 151 disparitions (Inter-Church Committee janv. 1990, 17). Au cours des six premiers mois de 1990, au moins 566 exécutions extrajudiciaires ont été relevées (Central America NewsPak 16-29 juill. 1990, 6).
2.1 Les forces armées
Les forces armées du Guatemala, fortes de 43 000 hommes et composées des armées de terre, de l'air et de mer, sont bien connues pour leur unité, leur esprit combatif, ainsi que pour leur promptitude au combat (Aguilera 1989, 165). Les armées de terre et de l'air sont les plus importantes et les mieux équipées; l'armée de mer est constituée principalement d'une gendarmerie maritime.
En principe, selon la loi, le recrutement par conscription est universel (Aguilera 1989, 165). En pratique, toutefois, les citoyens de la ville de Guatemala et ceux qui ont recours à la corruption pour se soustraire au service ne sont pas incorporés. Les paysans autochtones âgés de 16 à 25 ans sont les recrues préférées (Simon 1987, 45). Selon les procédures de recrutement légales, les recrues doivent être avisées avant de prendre leur service (Central America Report 11 mai 1990, 135). En fait, il semble que le recrutement forcé soit la méthode généralement utilisée. Des rafles auraient été effectuées à la suite de services religieux, sur des chantiers de construction, dans les marchés locaux et à l'occasion de bals communautaires et de matchs de football (Simon 1987, 45). Un porte-parole de l'armée a justifié la procédure de recrutement en affirmant qu'« elle favorisait les jeunes hommes démunis en leur apportant un salaire, de la nourriture et d'autres avantages », et que le recrutement ne touchait que les «économiquement faibles» (Central America Report 11 mai 1990, 135).
Depuis le début des années 1960, les forces armées livrent bataille, dans le cadre d'une guerre interne prolongée, en ayant recours à des tactiques de contre-insurrection modernes et à une terreur systématique, sanctionnée par l'état, contre divers mouvements populaires armés de gauche. En 1982, ces mouvements ont établi un « commandement militaire unifié » dénommé l'Union révolutionnaire guatémaltèque [Guatemalan Revolutionary Unity (URNG)] (Aguilera 1989, 164; Degenhardt 1988, 138).
A la fin des années 1970 et au début des années 1980, l'armée a lancé une campagne de « terre brûlée » dans le but de « priver le poisson [l'insurrection armée] d'eau [une population sympathique] ». D'après l'Inter-Church Committee on Human Rights in Latin America, près de 440 villages ont été détruits, 75 000 personnes assassinées, un million de personnes déplacées à l'intérieur du pays, et plus de 200 000 autres contraintes à demander le statut de réfugié à l'étranger (Inter-Church Committee janv. 1990, 18). Des régions entières ont été abandonnées par le gouvernement aux mains de l'armée (Central America NewsPak 16-29 juill. 1990, 5).
Ce sont surtout les autochtones du Guatemala, représentant plus de 60 p. 100 de l'ensemble de la population, qui ont été le plus sévèrement touchés par cette politique. Certains observateurs les considèrent comme peut-être « la majorité autochtone la plus isolée et la plus opprimée de tout l'hémisphère occidental » (Inter-Church Committee janv. 1990, 18; Central America NewsPak 24 sept.-7 oct. 1990, 7). La répression s'est poursuivie jusqu'à la fin des années 1980, et l'armée a admis avoir bombardé des villages populeux dans la province d'El Quiche (Central America Report 16 fév. 1990, 45). Bien que les activités de l'URNG aient connu un nouvel essor depuis 1989, l'armée guatémaltèque prétend que les insurgés n'ont plus le pouvoir qu'ils avaient (Inter-Church Committee janv. 1990, 5).
Afin de mater la population autochtone, l'armée a établi des « villages modèles » enrégimentés, où tous les paysans sont soumis à un processus de
« réorientation » en trois étapes : interrogatoire, rééducation et réinstallation (Central America NewsPak 27 août-9 sept. 1990, 7). Les villages modèles sont peuplés par des personnes réinstallées de force, qui ont fui la campagne de « terre brûlée » pour trouver refuge dans les montagnes au nord du Guatemala, ainsi que par des réfugiés qui ont été rapatriés volontairement (Inter-Church Committee janv. 1990, 19).
Une fois « réorientés », les villageois sont souvent contraints de participer aux incursions militaires, et tous les hommes âgés de 16 à 60 ans sont obligés de s'engager dans la défense civile (Inter-Church Committee janv. 1990, 19). Les personnes qui sont rentrées au pays pour être réinstallées dans les villages modèles ont retrouvé la même violence qu'elles avaient fui, ce qui a convaincu de nombreux réfugiés, qui avaient été rapatriés, de retourner dans les camps de réfugiés au Mexique, dirigés par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), où vivent environ 35 000 Guatémaltèques (Ibid.; Nations Unies E/CN.4/1990/45, 12 déc. 1989).
Le service de renseignements, connu comme le G-2, est une des institutions les plus répressives de l'armée. C'est un fait notoire au Guatemala que le G-2, doté d'un effectif d'environ 2 000 personnes, a recours à « l'intimidation, l'enlèvement et l'assassinat de guérilleros de gauche, de leurs partisans et d'autres personnes qui ennuient l'armée » (The Washington Post 23 nov. 1990, A19). Il paraît qu'au cours des réunions hebdomadaires des chefs d'état-major, les représentants de G-2 présentent une analyse et une évaluation de la situation politique actuelle, et font ensuite leurs propres recommandations (The New Republic 30 juin 1986, 13). Entre le début et le milieu des année 1980, le G-2 aurait assuré le fonctionnement d'un réseau de centres de détention clandestine qui servaient de prisons secrètes et de centres d'interrogation (Ibid.). Les autorités nient l'existence de telles prisons, bien qu'une religieuse américaine prétende avoir été enlevée et torturée dans un de ces centres en 1989 (Inter-Church Committee janv. 1989, 24). Un jour, le général Benedicto Lucas Garcia, ancien chef d'état-major et frère d'un ancien président, a expliqué que « si le G-2 veut ta mort, il te fera exécuter » (The New Republic 30 juin 1986, 13).
2.2 La police nationale
La police nationale à caractère militaire, forte de 9 500 hommes, est le seul service gouvernemental capable de mener efficacement des enquêtes criminelles (Bonsignore 1990, 54; WOLA 1989, 23). Toutefois, selon le International Human Rights Law Group, à Washington, la police nationale, qui relève directement du ministre de l'Intérieur, « n'est qu'un simple appendice du service de renseignements de l'armée, ayant des liens institutionnels qui pénètrent à tous les niveaux de la hiérarchie, officiellement et officieusement » (Anderson 1989, iv). La complicité entre les deux forces est telle que le service d'enquête de la police nationale n'a jamais
« accumulé de preuves contre aucun membre des forces armées impliqué dans un acte de violence », mais, néanmoins, c'est un fait notoire qu'elle « prend pour cible des opposants politiques et les exécutent » (WOLA 1989, 24, 35). La police nationale est principalement déployée dans la ville de Guatemala, mais des détachements plus petits se retrouvent dans des villes et des centres importants (Anderson 1989, 12). Il y a, outre la police nationale, la police de la Trésorerie et la police municipale qui, d'après certains observateurs des droits de la personne, ont toutes les deux mis sur pied, officieusement, depuis des décennies, des escadrons de la mort de droite (Newsday 7 oct. 1990, 4).
Les enfants de la rue seraient aussi pris pour cibles par les forces policières du Guatemala. Certains officiers considèrent l'assassinat des enfants de la rue comme une « purification sociale » (Newsday 7 oct. 1990, 4). Selon les propres chiffres du gouvernement, près de 225 enfants ont été assassinés de janvier à juillet 1990, bien que ces assassinats n'aient été imputés à aucun groupe en particulier (Ibid.). Amnesty International signale que les enfants font l'objet d'abus sexuels et sont passés à tabac à maintes reprises, et que certains d'entre eux sont torturés et forcés à inhaler de la colle, tandis que de nombreux autres sont exécutés (Central America NewsPak 5-18 nov. 1990, 5). Toujours selon cette source, les responsables seraient des membres des forces policières ainsi que des agents de sécurité privés qui reçoivent leur permis de travail du ministère de l'Intérieur ou de la police nationale (Ibid.).
2.3 La défense civile
Avant le retour à un régime civil, l'armée a officiellement renommé les patrouilles civiles d'autodéfense « Comités d'autodéfense volontaires » (Central America Report 18 mai 1990b). Ces patrouilles ont été établies par l'armée au début des années 1980, initialement dans le but de soutenir ses efforts de contre-insurrection; selon les observateurs, elles sont utilisées par l'armée pour établir « des liens et des contrôles » sur quasiment chaque hameau dans les montagnes du Guatemala (Anderson 1989, 57). Elles sont les yeux et les oreilles de l'armée, lui permettant de consolider son pouvoir et d'institutionnaliser la militarisation du milieu rural (Anderson 1989, 42).
On estime que la défense civile compte près de 700 000 hommes dans ses rangs, bien qu'à peine 10 000 soient armés (Bonsignore 1990, 54). Le décret autorisant la création des patrouilles est reconnu comme constitutionnel, mais les procédures de recrutement sont clairement en contravention de l'article 34 de la Constitution du Guatemala qui déclare que « personne ne peut être contraint de s'associer ou de s'engager dans la défense civile ou dans d'autres groupes ou associations similaires » (Blaustein et Flanz 1986, 33). En réalité, tous les hommes âgés entre 12 ou 15 et 60 ans sont obligés de servir dans une unité de patrouille et, selon le nombre d'hommes dans son village, chacun peut être de service aussi souvent qu'à tous les trois jours pendant 24 heures (Central America Report 18 mai 1990b). Le travail n'est pas rémunéré et, selon un membre du Congrès guatémaltèque, refuser de servir signifie « s'exposer à la mort en tant que "subversif" » (Anderson 1989, 42).
D'après leur code de conduite, les patrouilles « appuient toutes les actions de l'armée guatémaltèque », ce qui illustre clairement l'emprise que l'armée exerce sur elles (Central America Report 18 mai 1990b). Les patrouilles relèvent directement de l'armée pour tout ce qui concerne leurs opérations et elles l'accompagnent ou la remplacent souvent dans le cadre de ratissages militaires (Anderson 1989, 43; Central America Report 18 mai 1990b). Elles sont aussi contraintes parfois de combattre sur le front (Central America Report l8 mai 1990b). Ces opérations font régulièrement des victimes et les rapatriés sont souvent blessés ou abattus, soit par les guérilleros ou, à d'autres occasions, par l'armée, qui les prend pour des guérilleros (Ibid.). Le président Cerezo n'a jamais donné suite à sa promesse d'organiser des consultations populaires afin de décider du sort des patrouilles, préférant plutôt conserver la confiance des militaires en faisant très peu d'efforts pour la contenir (Ibid.).
2.4 Le système judiciaire
Le pouvoir incontesté des forces armées s'explique notamment par l'impunité dont elles jouissent dans l'absence d'un pouvoir judiciaire indépendant. En théorie, la Constitution du Guatemala prévoit un bon nombre des garanties qu'on trouve dans les constitutions de la plupart des démocraties (Anderson 1989, 9). En pratique, toutefois, le système judiciaire est tel qu'après 30 ans et 100 000 assassinats politiques, aucun membre des forces de sécurité du Guatemala n'a été incarcéré, et le président Cerezo, au pouvoir depuis 5 ans, quitte ses fonctions, alors qu'un cas seulement de violence extrajudiciaire, sur 3 000 cas enregistrés, est passé devant le tribunal (Central America NewsPak 10-23 sept. 1990, 5; Central America Report 30 nov. 1990, 361). La Constitution du Guatemala prévoit aussi l'habeas corpus qui, dans la pratique, ne fonctionne que dans les cas de détention légale. Le système judiciaire n'a aucun moyen de connaître le sort d'un individu si les militaires ou les forces policières n'admettent pas l'avoir arrêté ou s'il est détenu dans une prison secrète (WOLA 1989, 16).
De nombreux facteurs contribuent à l'impunité dont jouissent les militaires, dont le fait que la police nationale soit le principal service d'enquête. D'après certains juges au Guatemala, les témoins d'abus et de crimes hésitent à se présenter, craignant des représailles sévères et des attentats de la part des militaires et/ou des guérilleros (WOLA 1989, 12). En général, les officiers supérieurs protègent leurs soldats en dissimulant certains faits ou en gardant tout simplement le silence (Ibid.).
En théorie, tous les militaires et tous les adjoints civils de l'armée doivent être traduits devant un tribunal militaire si l'auteur du délit était de service au moment où il a commis l'infraction et devant un tribunal civil dans le cas contraire (WOLA 1989, 14). Toutefois, le président de la Cour suprême a déclaré que tous les militaires devraient être jugés par un tribunal militaire, peu importe qu'ils aient été ou non de service, et, d'après un autre juge, les adjoints civils de l'armée sont, par hasard, « toujours de service lorsqu'ils commettent un crime » (Ibid., 14, 74). Les membres de la défense civile sont jugés par des tribunaux civils, mais ils jouissent d'une « protection militaire extraordinaire » si leurs crimes ne sont pas dissimulés pour échapper à un procès (Ibid., 14).
3. SITUATION ACTUELLE
Apparemment, les forces armées du Guatemala sont toujours les principaux détenteurs du pouvoir malgré le retour à une démocratie précaire. Elles ont fait peu pour améliorer leur bilan en matière de droits de la personne, et ce malgré la condamnation de la communauté internationale. Le 2 décembre 1990, des sentinelles ont ouvert le feu sur une foule qui protestait contre la tentative d'enlèvement d'un concitoyen par un militaire, faisant environ 15 morts et 20 blessés. La présidence a fait part, par la suite, de la tenue d'une enquête, mais n'a fait aucune mention du rôle de l'armée dans le massacre (Central America Report 7 déc. 1990, 1).
Au Guatemala, la terreur et la violence se manifestent tous les jours. Une délégation de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a déclaré que « la violence générale et les violations des droits de la personne au Guatemala ne peuvent être freinées » (Latinamerica Press 29 mars 1990, 7). La violence perpétrée par les militaires et les forces de sécurité a atteint «un niveau tel que l'autocensure est assurée, surtout en ce qui concerne les abus commis par les militaires» (Latin America Regional Report 6 déc. 1990, 4). La déclaration d'un colonel illustre bien le caractère répressif et l'assurance des forces armées : « Croyez-vous que nous aurions laissé des preuves? En Argentine, il y a des témoins, il y a des écrits, il y a des films, il y a des preuves. Ici, au Guatemala, il n'y a rien de tout cela. Ici, il n'y a pas de survivants » (The New Republic 30 juin 1986, 13). Bien que sa déclaration soit quelque peu exagérée, elle illustre bien le fait que les militaires croient fermement en leur impunité.
La population a payé un fort tribut à la terreur omniprésente au Guatemala et elle semble maintenant « disposée à échanger sa liberté contre sa sécurité » (Central America NewsPak 2-15 juill. 1990, 5). D'après un sondage effectué en mai 1990, 37 p. 100 de la population favorisait un retour au régime militaire, alors que 36 p. 100 préférait un gouvernement civil (Ibid.).
Un spécialiste en matière de droits de la personne de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, Héctor Gros Espiell, a indiqué que, selon lui, le gouvernement ne serait pas directement associé aux violations des droits de la personne. Mais il a critiqué le gouvernement de n'avoir rien fait pour mettre un frein à la violence persistante et l'a accusé de ne pas exercer tous ses pouvoirs constitutionnels afin de garantir et de faire respecter les droits de la personne (Nations Unies E/CN. 4/1990/45, 12 déc. 1989).
La situation n'est peut-être pas aussi simple, ni aussi facile à changer. Si les autorités civiles décidaient d'étudier la possibilité d'effectuer des réformes au sein des forces armées et de mettre un frein à ses abus, elles seraient obligées de tenir compte de l'avertissement lancé par le général Oscar Humberto Mejía Victores, chef du gouvernement au moment de la transition. Le général Mejía a parlé en termes très clairs : « Ce serait une erreur de prendre des mesures contre les intérêts de l'armée. [...] l'armée ne l'accepterait pas » (WOLA 1989, 2).
4. BIBLIOGRAPHIE
Aguilera, Gabriel. 1989. « The Development of Military Autonomy and Corporateness in Central America » in Democracy Under Seige: New Military Power in Latin America. Compilé par Augusto Varas. Westport : Greenwood Press.
Amnesty International. (Al Index: AMR 34/04/87). « Guatemala: The Human Rights Record ».
Amnesty International. 1990. Amnesty International Report 1990. Londres : Amnesty International Publications.
Anderson, Kenneth. 1989. Maximizing Deniability: The Justice System and Human Rights in Guatemala. Washington : The International Human Rights Law Group.
Blaustein, Albert P. et Flanz, Gisbert, H., dir. 1986. « Guatemala » in Constitutions of the Countries of the World. Traduit par P.B. Heller et compilé par Albert P. Blaustein et Gisbert H. Flanz. Dobbs Ferry, New York : Oceana Publications.
Bonsignore, Ezio, dir. 1990. Military Technology 1989-1990. Vol. XIV, no 1, Bonn : Monch Publishing Group.
Central America NewsPak. 18 juin-1er juillet 1990. Vol. V, no 10. Gruson, Lindsey. « Political Violence on the Rise Again in Guatemala, Tarnishing Civilian Rule » in The New York Times, 28 juin 1990.
Central America NewsPak. 2-15 juillet 1990. Vol. V, no 11. Marquis, Christopher. « Among Guatemalans, Lure of Iron Fist Grows » in The Miami Herald, 4 juillet 1990.
Central America NewsPak. 16-29 juillet 1990. Vol. V, no 12. Marquis, Christopher. «Cerezo's Worldly Excesses Disappoint Guatemalans» in The Miami Herald, 15 juillet 1990.
Central America NewsPak. 16-29 juillet 1990. Vol. V, no 12. «Assassinated in Six Months; Business Leaders to Meet with URNG» in Elcelsior, 20 juillet 1990.
Central America NewsPak. 27 août-9 septembre 1990. Vol V, no 15. Larmer, Brook. «Guatemala's Indians Become the Battlefield» in The Christian Science Monitor, 4 septembre 1990.
Central America NewsPak. 10-23 septembre 1990. Vol. V, no 16. Oppenheimer, Andres. «Guatemala's Human Rights Office Looks to Increase Impact» in The Miami Herald, 15 septembre 1990.
Central America NewsPak. 24 septembre-7 octobre 1990. Vol. V, no 17. Oppenheimer, Andres. « Guatemala Indians Alienated from Politics » in The Miami Herald, 30 septembre 1990.
Central America NewsPak. 5-18 novembre 1990. Vol. V, no 20. « Amnesty International Reports Guatemalan Police and Private Security Forces Torture and Murder Street Children » in Excelsior, 10 novembre 1990.
Central America Report. 16 février 1990. Vol. XVII, no 6. « Guatemala: Human Rights Rating at Stake ».
Central America Report. 11 mai 1990. Vol. XVII, no 17. « Army's Forced Recruiting Criticized ».
Central America Report. 18 mai 1990a. Vol. XVII, no 18. « Dialogue is On and so is URNG Pressure ».
Central America Report. 18 mai 1990b. Vol. XVII, no 18. « Special Report: Above the Law? Civil Patrols in Guatemala ».
Central America Report. 29 juin 1990. Vol XVII, no 24. « One Assassination Every Hour ».
Central America Report. 30 novembre 1990. Vol XVII, no 46. « Cerezo's Violent Legacy ».
Central America Report. 7 décembre 1990. Vol. XVII, no 47. « Santiago Massacre Stuns the Country ».
The Christian Science Monitor. 20 novembre 1990. Solomon, Joel. «Dateline Terror: Death Squads Stalk Guatemala Reporter».
The Christian Science Monitor. 11 décembre 1990. Hackel, Joyce. «Guatemala Army Killings Raise National Debate».
Degenhardt, Henry W., dir. 1988. Revolutionary and Dissident Movements: An International Guide. Burnt Mill, Essex : Longman Group UK Ltd.
Delury, George E., dir. 1983. World Encyclopedia of Political Systems and Parties. Second edition. New York : Facts on File, Inc.
Inter-Church Committee on Human Rights in Latin America. Janvier 1990. 1989 Annual Report on the Human Rights Situation in Guatemala. Toronto : Inter-Church Committee On Human Rights in Latin America.
Latinamerica Press [Lima]. 29 mars 1990. Vol. 22, no 11. « Guatemala is a Human Rights Hell ».
Latin America Regional Report: Mexico & Central America Report. RM-90-10, 6 décembre 1990. « Violence a Way of Life in Guatemala ».
Nations Unies, Conseil économique et Social, Commission des Droits de l'Homme. (E/CN.4/1990/45). 12 décembre 1989. Services consultatifs dans le domaine des droits de l'homme : Rapport de M. Héctor Gros Espiell, expert sur le Guatemala, établi en application du paragraphe 9 de la résolution 1989/74 de la Commission.
The New Republic. 30 juin 1986. Nairn, Allan et Jean-Marie Simon. «Bureaucracy of Death: Guatemala's Civilian Government Faces the Enemy Within».
Newsday. 7 octobre 1990. Arce, Rose Marie. « War for the Children; Guatemala Covenant House Confronts Death Squads ».
Simon, Jean-Marie. 1987. Guatemala: Eternal Spring. Eternal Tyranny. New York : W.W. Norton and Company.
The Washington Post. 23 novembre 1990. Hockstaller, Lee. « Critics Fault Murder Probe in Guatemala; U.S. Embassy Seeks Fuller Investigation », p. A19.
Washington Office on Latin America (WOLA). 1989. The Administration of Injustice: Military Accountability in Guatemala. Washington : Washington Office on Latin America.
Disclaimer: This document is published with the permission of the copyright holder and producer Immigration and Refugee Board of Canada (IRB). The original version of this document may be found on the offical website of the IRB at http://www.irb-cisr.gc.ca/en/. Documents earlier than 2003 may be found only on Refworld.
This is not a UNHCR publication. UNHCR is not responsible for, nor does it necessarily endorse, its content. Any views expressed are solely those of the author or publisher and do not necessarily reflect those of UNHCR, the United Nations or its Member States.