Recommandation 1406 (1999) Retour des réfugiés et des personnes déplacées dans leurs foyers en Croatie
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Date:
29 April 1999
1. L'Assemblée parlementaire se félicite du fait que le Gouvernement croate reconnaisse le droit inconditionnel des réfugiés et personnes déplacées qui ont quitté leur foyer en Croatie au cours des conflits en ex-Yougoslavie d'y revenir volontairement, sur la base d'un choix libre et informé, ainsi que leur droit de récupérer leurs biens. L'Assemblée se félicite en outre de la détermination déclarée du Gouvernement croate de soutenir activement ce retour, tant au niveau central que local.
2. L'Assemblée se félicite tout particulièrement de l'adoption par le Gouvernement croate, en 1998, du «programme pour le retour et l'hébergement des personnes déplacées, des réfugiés et des personnes réinstallées», et de la «suite du programme pour la reconstruction des zones d'habitation affectées par la guerre». L'Assemblée fait valoir combien il importe que les autorités croates de tous niveaux continuent à progresser dans la mise en uvre impartiale de ces programmes.
3. L'Assemblée note avec satisfaction que, d'après les dernières statistiques du Gouvernement croate (27 avril 1999), confirmées par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 31 586 réfugiés serbes croates sont revenus de la République fédérale de Yougoslavie et de Bosnie et Herzégovine (Republika Srpska) depuis la fin de l'année 1995 (dont 10 127 à la suite de l'introduction du programme de retour en juin 1998), tandis que, selon les estimations officielles, 26 567 personnes déplacées serbes croates seraient revenues de la région danubienne dans d'autres parties de la Croatie et que 35 367 personnes déplacées de souche croate seraient revenues dans cette région. De plus, quelque 35 000 réfugiés venant de pays extérieurs à la région de l'ex-Yougoslavie sont rentrés en Croatie depuis la fin des conflits.
4. Toutefois, l'Assemblée observe avec inquiétude que, selon les estimations du HCR quant au nombre de réfugiés et personnes déplacées recherchant toujours une solution durable dans la région de l'ex-Yougoslavie à l'heure actuelle, quelque 270 000 réfugiés de Croatie se trouvent dans la République fédérale de Yougoslavie, dont ceux arrivés récemment de la région danubienne croate, ainsi qu'environ 30 000 à 40 000 réfugiés de Croatie en Bosnie et Herzégovine (Republika Srpska). Pour la Croatie, les estimations sont les suivantes: 18 880 réfugiés de souche croate de Bosnie et Herzégovine (20 % de la fédération et 80 % de la Republika Srpska) et de la République fédérale de Yougoslavie. Environ 3 000 Serbes croates et 52 000 Croates ethniques restent déplacés sur le plan interne.
5. De plus, plusieurs milliers de personnes bénéficiant d'un statut de protection temporaire et de réfugiés de Croatie vivent dans des pays extérieurs à la région, principalement l'Allemagne, la Suisse et l'Autriche.
6. L'Assemblée s'inquiète de constater, malgré les progrès qui ont été faits quant au retour des réfugiés et personnes déplacées dans leur foyer en Croatie, que des obstacles au rapatriement demeurent et devraient être traités plus énergiquement par les autorités croates à tous les niveaux.
7. Ces obstacles comprennent l'insécurité persistante dans les régions de retour (surtout dans les anciens secteurs des Nations Unies nord et sud, et dans la région du Danube), notamment en raison d'actes de harcèlement et d'intimidation, et de la présence de mines terrestres; le manque de logements habitables et de possibilités de remplacement pour l'hébergement de ceux qui occupent temporairement les foyers des rapatriés; une situation économique défavorable, marquée par le chômage et la discrimination contre les demandeurs d'emploi appartenant aux groupes ethniques minoritaires; la difficulté, pour ceux qui désirent rentrer chez eux, d'obtenir des autorités croates les pièces d'identité et titres de voyage requis; des programmes d'enseignement orientés vers les besoins du groupe ethnique majoritaire; des menaces de poursuites judiciaires à l'encontre de prétendus criminels de guerre; la confusion entourant la loi d'amnistie; et un climat politique et culturel général qui s'oppose à la réconciliation.
8. L'Assemblée est particulièrement préoccupée par le fait que les ressortissants de la région danubienne d'origine ethnique serbe continuent à partir à l'étranger.
9. L'Assemblée reconnaît les difficultés économiques de la Croatie dans la région du Danube et dans d'autres régions précédemment occupées. Elle note également les efforts considérables fournis par la Croatie pour réparer les dommages dus à la guerre ainsi que l'appel de ce pays au soutien financier international exprimé notamment à l'occasion de la Conférence sur la reconstruction et le développement de la République de Croatie, tenue à Zagreb les 4 et 5 décembre 1998. Dans ce contexte, l'Assemblée note avec préoccupation qu'une législation discriminatoire en matière de reconstruction reste en vigueur.
10. En conséquence, l'Assemblée parlementaire recommande au Comité des Ministres:
i. de prier instamment le Gouvernement croate:
a. de garantir la sécurité des rapatriés par un maintien de l'ordre multiethnique effectif, des enquêtes immédiates et approfondies sur tous les incidents en matière de sécurité, y compris les actes allégués de harcèlement et d'intimidation, et des mesures pour faire en sorte que les délinquants soient rapidement traduits en justice;
b. d'intensifier le programme de déminage, en coopération avec la communauté internationale, en particulier dans les zones de retour;
c. d'amender ou d'abroger, de manière absolument prioritaire, la législation discriminatoire, comme le spécifie le programme de retour, et de garantir une application transparente et non discriminatoire de la législation;
d. de faire en sorte que les commissions du logement établies dans le cadre du programme de retour pour résoudre les difficultés relatives aux biens et aux logements dans les zones visées, y compris le traitement des demandes de restitution, soient clairement chargées de le faire rapidement et de manière impartiale et transparente, et que leur action soit suivie de près et de manière plus efficace par la Commission gouvernementale sur le retour;
e. d'adresser aux commissions du logement des orientations non discriminatoires établissant des normes acceptables pour un hébergement de remplacement pour les occupants temporaires obligés de quitter les foyers de rapatriés;
f. de veiller à ce que les commissions du logement prennent d'urgence des mesures énergiques pour résoudre les cas d'occupations illégales, notamment multiples;
g. de solliciter et de suivre l'avis des experts juridiques du Conseil de l'Europe pour résoudre la question du droit d'occuper les logements anciennement sociaux revendiqué par les réfugiés, personnes déplacées et rapatriés;
h. de mettre des ressources supplémentaires à la disposition de l'Agence de médiation pour les transactions relatives aux biens immobiliers («Banque foncière») et de rendre ses opérations plus rapides et plus transparentes;
i. d'assurer le traitement rapide et impartial de toutes les demandes de rapatriés qui souhaitent une aide financière pour la reconstruction de biens, conformément au Mandat impératif pour la mise en uvre du programme de reconstruction, et d'intensifier la publicité sur ce programme auprès des demandeurs potentiels;
j. d'amender ou d'abroger les dispositions discriminatoires de la loi de 1966 sur la reconstruction;
k. de simplifier et d'accélérer la délivrance des pièces d'identité et titres de voyage requis aux rapatriés potentiels, et de rendre pleinement efficace la loi de 1997 sur la validation;
l. d'accorder à tous les rapatriés, organisés ou non, des «cartes vertes» permettant un accès immédiat aux prestations d'aide sociale et autres;
m. d'offrir beaucoup plus de possibilités aux réfugiés pour qu'ils puissent se rendre en Croatie afin d'évaluer leur situation concernant leur foyer et leurs droits sociaux et économiques, ce qui les aidera à déterminer de manière libre et informée s'ils souhaitent revenir définitivement;
n. de poursuivre le processus de réconciliation de manière beaucoup plus dynamique, en particulier dans les zones de retour, en favorisant un climat politique et culturel de respect, de tolérance et de non-discrimination, par l'application transparente de la loi d'amnistie, et en rendant efficace l'opération des comités pour l'établissement de la confiance aux niveaux national, régional et local;
o. de soumettre des projets au Fonds de développement social du Conseil de l'Europe en vue de financer la construction et la réhabilitation de logements destinés aux rapatriés;
p. de veiller à ce que les réfugiés obtiennent le droit de demander, de l'étranger, la citoyenneté croate, la restitution de leurs biens et une aide à la reconstruction, soit par l'intermédiaire des ambassades ou consulats croates, soit directement auprès des pouvoirs locaux;
ii. d'inviter les Etats membres:
a. à augmenter leur aide financière et leurs apports spécialisés aux fins de déminage, particulièrement dans les zones de retour;
b. d'accroître leur soutien financier à la reconstruction et au développement, notamment pour donner des logements de remplacement à ceux qui doivent quitter des biens temporairement occupés appartenant à des rapatriés.
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