Recommandation 1404 (1999) Situation humanitaire des réfugiés et des personnes déplacées du Kosovo
- Document source:
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Date:
28 April 1999
1. L'Assemblée parlementaire se réfère à ses Recommandations 1376 (1998), 1397 (1999), 1400 (1999) et 1403 (1999), ainsi qu'à sa Résolution 1182 (1999) sur la crise au Kosovo et la situation en République fédérale de Yougoslavie, et à sa Recommandation 1385 (1998) sur la situation des réfugiés, des demandeurs d'asile et des personnes déplacées du Kosovo. Elle souligne que la tragédie humanitaire qui se déroule actuellement dans la région est inextricablement liée aux causes politiques de la crise et qu'elle nécessite une solution politique urgente.
2. L'Assemblée parlementaire est extrêmement préoccupée par le sort des personnes déplacées prises au piège au Kosovo et qui n'auraient guère, sinon pas du tout, d'abri, de protection ni d'assistance, et elle considère qu'il faut donner la priorité aux secours à leur apporter. Etant donné la vulnérabilité croissante de ces personnes, il faut envisager d'urgence la possibilité d'effectuer des parachutages au Kosovo, voire d'assurer la protection militaire des convois humanitaires.
3. L'Assemblée souligne que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), les personnes qui fuient le Kosovo vers les pays voisins sont des réfugiés au sens de la définition de la Convention de Genève de 1951 et qu'elles doivent bénéficier du libre accès à ces pays, et être protégées et traitées en conséquence.
4. L'Assemblée est gravement préoccupée par la situation des réfugiés et des personnes déplacées originaires du Kosovo dans les régions et les pays voisins, notamment en Albanie, dans "l'ex-République yougoslave de Macédoine" et au Monténégro, où leur nombre considérable (environ 10 % de la population) constitue une sérieuse menace pour la stabilité politique, économique et sociale. Il faut tout faire pour s'assurer que la présence des réfugiés et l'assistance qui leur est apportée ne créent pas de tensions avec la population locale.
5. L'Assemblée exprime sa satisfaction à l'égard des efforts entrepris par les gouvernements et les organisations humanitaires de ces pays et régions pour la protection et l'assistance qu'ils ont apportées, et elle estime que les Etats membres du Conseil de l'Europe qui ne l'ont pas encore fait devraient, d'urgence, annoncer et faire pleinement suivre d'effet, en coordination avec le HCR, leur engagement à accueillir sur leur territoire des réfugiés du Kosovo.
6. L'Assemblée exprime tout son soutien aux efforts déployés par les organisations nationales et internationales qui participent aux activités de protection et de secours au nom des réfugiés et des personnes déplacées du Kosovo, et elle reconnaît leur besoin urgent d'un financement adéquat à cet effet. L'Assemblée considère que l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (Otan) devrait intensifier sa précieuse contribution aux efforts d'assistance en ce qui concerne le soutien et l'aide logistiques, et que des conférences de presses régulières devraient être tenues sur les activités humanitaires de cette organisation. Il est cependant indispensable que l'opération humanitaire reste bien sous contrôle civil et que le HCR conserve son rôle de chef de file de la coordination, sans préjudice de la situation particulière du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
7. L'Assemblée se félicite que le Fonds de développement social ait annoncé qu'il ferait un don aux institutions des Nations Unies qui apportent leur aide aux réfugiés et aux personnes déplacées du Kosovo, et elle l'encourage à faire encore davantage dans cet esprit en attendant la définition et la mise en uvre de projets de prêts. Les Etats membres qui ne l'ont pas encore fait devraient maintenant adhérer au fonds pour témoigner de leur solidarité dans la mesure où celui-ci commence à jouer un rôle dans le règlement de la crise.
8. L'Assemblée se félicite aussi de l'appel lancé par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe pour aider les réfugiés du Kosovo grâce à des partenariats entre des villes européennes et des communes qui accueillent des réfugiés en Albanie et dans "l'ex-République yougoslave de Macédoine".
9. L'Assemblée souligne que l'aide d'urgence devrait être suivie d'une assistance financière à très vaste échelle de la communauté internationale en vue de la reconstruction et du relèvement du Kosovo - qui est une des conditions essentielles du retour des réfugiés - et du reste de la région. Le Conseil de l'Europe devrait participer à l'élaboration d'un plan global plurisectoriel à cet effet.
10. L'Assemblée recommande au Comité des Ministres:
i. de demander instamment aux autorités serbes et yougoslaves:
a. de respecter pleinement le droit humanitaire en ce qui concerne tant la population civile en général que les personnes privées de liberté;
b. de permettre aux organisations humanitaires d'accéder sans aucun obstacle à toutes les régions du Kosovo, et de garantir la sécurité de toutes les personnes qui apportent leur aide sur le terrain;
c. de maintenir leurs frontières ouvertes et d'établir les conditions nécessaires au retour sans risque des réfugiés;
ii. de demander instamment aux autorités du Monténégro:
de continuer à aider la population déplacée du Kosovo et de garantir sa sécurité;
iii. de demander instamment aux Gouvernements de l'Albanie et de "l'ex-République yougoslave de Macédoine":
a. de respecter intégralement les principes de la Convention de Genève de 1951 et les lignes directrices du HCR à l'égard des réfugiés du Kosovo, notamment d'assurer leur accueil en toute sécurité;
b. d'accélérer l'enregistrement et la fourniture de documents d'identité aux réfugiés, en coopération avec le HCR, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Conseil de l'Europe;
c. de prendre des dispositions en vue du transfert ultérieur des réfugiés, s'il y a lieu, loin des zones frontières, en coordination avec le HCR et d'autres organisations humanitaires, et d'assurer que les évacuations soient effectuées avec le plein accord des intéressés et en tenant dûment compte du principe de l'unité familiale;
d. de faciliter la tâche des organisations humanitaires, notamment en ce qui concerne la réunification des familles, les recherches, l'enregistrement et l'évacuation humanitaire;
iv. de demander instamment aux Etats membres du Conseil de l'Europe, et en particulier aux pays de l'Otan:
a. d'intensifier leur soutien aux gouvernements des pays voisins, en particulier à l'Albanie et à "l'ex-République yougoslave de Macédoine", dans le cadre des efforts que ceux-ci déploient pour apporter aide et protection aux réfugiés et aux personnes déplacées du Kosovo, notamment en proposant de mettre sur pied, d'approvisionner et de gérer des camps de réfugiés, et en augmentant l'aide financière et matérielle fournie aux familles qui accueillent des réfugiés;
b. d'intensifier le financement par des dons en réponse à l'Appel interagences consolidé et à l'Alerte aux donneurs, lancés par les Nations Unies, et à l'Appel intégré du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge pour les victimes de la crise des Balkans;
c. de répondre avec générosité à l'appel lancé par le HCR pour assurer la protection temporaire des réfugiés du Kosovo en établissant un plan global de partage de la charge et d'accélérer les admissions sur leur territoire en respectant, et le cas échéant en augmentant, leurs engagements;
d. de se conformer aux lignes directrices du HCR sur la protection temporaire des personnes déplacées, en tenant compte aussi de la Recommandation 1348 (1997) de l'Assemblée relative à la protection temporaire de personnes obligées de fuir leur pays;
e. de veiller à ce que l'évacuation humanitaire de la région s'effectue avec le plein accord des intéressés, après enregistrement en bonne et due forme, en tenant dûment compte de l'unité familiale et dans les meilleures conditions sanitaires possibles;
f. de reconnaître le droit imprescriptible pour une femme violée de recourir, si elle le désire, à une interruption volontaire de grossesse, ce droit étant la contrepartie du viol subi;
g. sans oublier les autres victimes du conflit, de tout mettre en uvre pour que les femmes réfugiées - qui ont le plus souvent subi des atteintes à leur intégrité physique durant leur fuite et dans les lieux d'asile, ont fait l'objet de viols, de violence et de torture - bénéficient d'un soutien spécifique tel que le droit à la sécurité, des soins médicaux, un suivi psychologique, l'accès prioritaire à la nourriture et des abris adéquats.
11. L'Assemblée recommande en outre au Comité des Ministres:
a. de lancer l'élaboration d'un plan global plurisectoriel pour la reconstruction future du Kosovo en coopération avec les institutions financières et les organisations internationales compétentes;
b. d'intensifier, en coopération avec les autres organisations internationales concernées, sa contribution à l'identification et à l'enregistrement des réfugiés, à la délivrance de documents d'identité à ces derniers, au rassemblement de preuves de crimes contre l'humanité commis au Kosovo et à l'aide dans le domaine de la santé, de l'éducation, des loisirs et du sport pour les enfants et les jeunes, qui constituent une grande proportion de la population dans les camps de réfugiés;
c. d'envisager des moyens permettant d'identifier et d'enregistrer les biens des réfugiés et des personnes déplacées du Kosovo;
d. de renforcer son bureau en Albanie et d'aider le pays à faire face aux énormes problèmes économiques et sociaux par des prêts du Fonds de développement social;
e. d'accorder une assistance substantielle au Gouvernement de "l'ex-République yougoslave de Macédoine" pour combattre le désastre humanitaire, économique et social qui se profile, y compris des prêts d'urgence du Fonds de développement social, et d'intensifier la coopération intergouvernementale avec ce pays dans tous les domaines pertinents liés aux difficultés actuelles;
f. d'élaborer un programme concret de grande envergure destiné à instaurer la confiance entre les communautés, à renforcer la société civile et à lutter contre les préjugés et l'intolérance dans la région, notamment en fournissant une aide juridique et un soutien aux organisations non gouvernementales et à la démocratie locale.
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