Recommandation 1414 (1999) Crise au Kosovo et situation en République fédérale de Yougoslavie

1.   L'Assemblée se félicite de l'accord intervenu sur la solution politique à la crise du Kosovo, basé sur les principes proposés par le G8, et du retrait des forces militaires policières et paramilitaires yougoslaves du Kosovo en résultant. Elle se félicite en outre de l'adoption de la Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui décide du déploiement au Kosovo de présences internationales civiles et de sécurité.

2.   L'Assemblée rend hommage aux efforts diplomatiques menés par M. Ahtisaari, Président de la Finlande, en sa qualité de représentant spécial de l'Union européenne, par M. Tchernomyrdine, envoyé spécial du Président russe M. Eltsine, et par M. Talbott, vice-ministre des Affaires étrangères des Etats-Unis. Cependant, elle regrette profondément que les autorités yougoslaves n'aient accepté une solution politique qu'après une utilisation intensive de la force militaire par l'Otan.

3.   L'Assemblée note qu'en vertu de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies la Kfor (Force internationale de maintien de la paix au Kosovo) assure une présence de sécurité, et que le Secrétaire général de l'Onu met en place, sur une base provisoire, une présence civile, la mission d'administration intérimaire de l'Onu au Kosovo (Unmik), dirigée par M. Sergio Vieira de Mello en sa qualité de représentant spécial du Secrétaire général de l'Onu.

4.   L'Assemblée estime que la reconstruction du Kosovo et la mise en place d'institutions démocratiques autonomes sera une tâche immense et difficile, qui exigera un effort énorme et concerté de la part des Etats et des organisations internationales impliqués. Le Conseil de l'Europe se doit d'apporter une contribution importante, de concert avec d'autres organisations telles que le HCR, l'Unifem, l'OSCE et l'Union européenne; il doit donc être représenté comme il convient à l'Unmik.

5.   L'Assemblée considère que le retour et la réintégration volontaires et ordonnés, en toute sécurité, des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur du pays constituent un élément essentiel de la reconstruction du Kosovo. Les efforts déployés par le HCR et d'autres organisations intergouvernementales et non gouvernementales doivent être largement soutenus et généreusement financés par les Etats membres du Conseil de l'Europe.

6.   L'Assemblée exprime son horreur devant les preuves qui s'accumulent d'exécutions de masse et autres atrocités comme les violations systématiques de la dignité des femmes, commises par les forces yougoslaves au Kosovo. Elle soutient pleinement la volonté du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de réunir des éléments de preuve et d'amener les responsables à répondre de leurs actes devant la justice.

7.   L'Assemblée est profondément préoccupée par le départ massif et précipité de la population serbe du Kosovo. Cette population doit se voir garantir une protection adéquate.

8.   L'Assemblée estime qu'il ne peut y avoir de stabilité dans la région tant que de véritables réformes démocratiques ne seront pas intervenues en République fédérale de Yougoslavie. Cela ne sera possible que quand M. Milo?sevi´c et d'autres criminels de guerre inculpés auront quitté le pouvoir. Par conséquent, l'Assemblée appelle le peuple de la République fédérale de Yougoslavie à soutenir ces réformes ouvertement. En plus de l'assistance humanitaire qu'elle fournit, la communauté internationale devrait également soutenir les forces démocratiques et les médias libres.

9.   Dans ce contexte, l'Assemblée approuve et soutient la position courageuse adoptée par le Gouvernement du Monténégro durant le conflit. Comme sa politique doit être un catalyseur du changement à l'intérieur de l'ensemble de la République fédérale de Yougoslavie, le Gouvernement du Monténégro devrait pouvoir compter sur le soutien entier, et sur l'aide matérielle, de la communauté internationale.

10.  L'Assemblée apprécie hautement la contribution politique de l'Albanie et de «l'ex-République yougoslave de Macédoine», pays limitrophes de la République fédérale de Yougoslavie, dans la sauvegarde de la paix et de la stabilité dans la région. Ces pays ont affronté avec un sang-froid et une générosité exemplaires le lourd fardeau de la crise. L'Assemblée suggère que la coopération avec l'Albanie et «l'ex-République yougoslave de Macédoine» et l'aide qui leur sera apportée dans le cadre du Pacte de stabilité de l'Europe du Sud-Est soient prioritaires.

11.  L'Assemblée se félicite de l'adoption à Cologne, le 10 juin 1999, à l'initiative de l'Union européenne, du Pacte de stabilité de l'Europe du Sud-Est, auquel le Conseil de l'Europe participe à part entière. L'Organisation, y compris l'Assemblée parlementaire, doit maintenant jouer un rôle majeur dans sa mise en œuvre, notamment en ce qui concerne la démocratisation et les droits de l'homme.

12.  L'Assemblée note avec satisfaction l'adoption par le Comité des Ministres d'un programme de stabilité pour l'Europe du Sud-Est, qui prévoit à la fois des actions urgentes destinées à aider le retour des réfugiés et des personnes déplacées, et les autres victimes civiles du conflit du Kosovo dans la région, ainsi que des mesures à plus long terme pour la mise en place d'institutions démocratiques.

13.  L'Assemblée estime que le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe a un rôle important à jouer dans l'établissement de structures d'autonomie locale au Kosovo, et accueille avec satisfaction les propositions faites par le Congrès à cet égard.

14.  L'Assemblée appelle l'Armée de libération du Kosovo (UCK) à appliquer dans sa totalité l'accord signé avec la Kfor le 21 juin 1999, exigeant le désarmement de l'UCK dans un délai de quatre-vingt-dix jours. L'Assemblée condamne toute attaque contre la population civile serbe ainsi que les menaces proférées contre les éléments russes de la présence de sécurité. L'UCK doit s'abstenir de tout acte de vengeance et collaborer avec toutes les forces politiques de la population albanaise du Kosovo à la mise en place des institutions démocratiques. Les représentants de la population serbe du Kosovo devraient pouvoir participer pleinement à ce processus et y être encouragés.

15.  L'Assemblée appelle le Tribunal criminel international pour l'ex-Yougoslavie à enquêter sur les crimes qui auraient été commis par des membres de l'UCK et à prendre les mesures adéquates.

16.  En conséquence, l'Assemblée:

A.   décide d'organiser une conférence sur la contribution parlementaire à la mise en œuvre du pacte de stabilité, qui devra se tenir dans la région au cours des mois à venir;

B.   recommande que le Comité des Ministres:

i.    en ce qui concerne la mise en œuvre de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies, garantisse:

a.   que le Conseil de l'Europe est représenté comme il convient à l'Unmik, au niveau du représentant spécial adjoint, et joue un rôle actif dans les domaines relatifs aux droits de l'homme - en particulier aux droits de l'enfant -, à l'autonomie locale, aux affaires juridiques, à la démocratisation, à la réadaptation des femmes victimes de viol, aux affaires civiles - en particulier à la culture et à l'éducation -, aux ressources humaines et à l'administration;

b.   un rôle prépondérant pour le Conseil de l'Europe en ce qui concerne:

-     le suivi de la situation des droits de l'homme;

-     l'établissement d'un bureau du médiateur;

-     le développement des partis politiques;

-     la formation des juges;

-     la réforme des programmes et du système éducatif;

ii.    envisage l'ouverture, dès que possible, d'un Bureau du Conseil de l'Europe à Belgrade, afin de contribuer à la mise en œuvre en République fédérale de Yougoslavie des principes du Conseil de l'Europe;

iii.   adapte son propre programme de stabilité en tenant compte de la situation nouvelle au Kosovo, pour y inclure l'ouverture d'un Bureau du Conseil de l'Europe à Pristina;

iv.   garantisse une contribution majeure du Conseil de l'Europe à la mise en œuvre du pacte de stabilité, notamment en ce qui concerne les tables de travail I (démocratisation et droits de l'homme) et III (sécurité).

Comments:
Discussion par l'Assemblée le 23 juin 1999 (20e et 21e séances) (voir Doc. 8449, rapport de la commission des questions politiques, rapporteurs: MM. Bársony et Bloetzer; Doc. 8451, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: M. Akçali; et Doc. 8452, avis de la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie, rapporteur: M. Iwinski).(Extrait de la Gazette officielle du Conseil de l?Europe - juin 1999)
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