Rwanda: Loi du 1963 portant sur la police de l'immigration et les conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans la République rwandaise
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Date:
15 October 1963
CHAPITRE PREMIER.
DISPOSITIONS GÉNÉRALES CONCERNANT L'ENTRÉE ET LE SÉJOUR DES ÉTRANGERS AU RWANDA.
Article 1.
Sont considérés comme étrangers au regard de la présente loi, tous individus qui n'ont pas la nationalité rwandaise, soit qu'ils aient une nationalité étrangère, soit qu'ils n'aient pas de nationalité connue.
Les étrangers sont, en ce qui concerne leur séjour au Rwanda soumis aux dispositions du présent texte, sous réserve des conventions internationales ou des lois ou règlements spéciaux y apportant dérogation.
Les dispositions qui suivent ne sont pas applicables aux agents diplomatiques, aux consuls de carrière et au personnel régulier de l'Organisation des Nations Unies.
Toutefois, un arrêté du Ministre de l'Intérieur fixera les modalités de délivrance, titre gratuit, d'une carte d'identité diplomatique aux agents des missions diplomatiques se trouvant en poste au Rwanda, ainsi que, éventuellement, aux membres de leur famille.
Article 2.
Tout étranger doit, pour pouvoir entrer au Rwanda, être muni des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur et produire notamment:
1)Un passeport visé par l'Ambassade Rwandaise ou l'autorité diplomatique ou consulaire habilitée à cet effet, du lieu de départ; dans le cas où aucun représentant de la République Rwandaise n'existerait pas dans le pays de départ, le visa devra être demandé directement au Ministre de l'Intérieur du Gouvernement Rwandais. A l'intérieur de la République, les visas sont délivrés par le Ministre de l'Intérieur ou ses délégués;
2)Un extrait du casier judiciaire ou, si la législation de leur pays d'origine ne prévoit pas la délivrance d'un tel document, un certificat de bonnes vie et moeurs ou de non condamnation à une peine privative de liberté ou toute pièce officielle pouvant en tenir lieu; le certificat ou la pièce officielle susmentionnés devant être apostillés par l'autorité diplomatique ou consulaire appelée à délivrer le visa d'entrée, et avoir moins de trois mois de date au moment du visa;
3)Les certificats médicaux de vaccination prescrits par les conventions internationales et établis soit d'après le modèle adopté par l'Organisation Mondiale de la Santé, soit selon les dispositions édictées par le Ministre de la Santé Publique.
Le Ministre de l'Intérieur, pourra dans la mesure qu'il jugera utile, exempter des prescriptions du présent article et faire bénéficier d'un régime spécial d'entrée et de séjour au Rwanda:
a)les catégories de personnes qu'il déterminera;
b)les membres des équipages des aéronefs.
Article 3.
Les citoyens rwandais, de quelque région qu'ils viennent, ainsi que les membres de leur famille, sont admis à rentrer au Rwanda, sans autre formalité que la production d'un passeport national ou d'un document tenant lieu de passeport et sous réserve de l'application des mesures de police sanitaire internationales ou nationales.
Article 4.
Les mêmes facilités d'entrée au Rwanda que celles prévues à l'article 3, sont accordées aux étrangers qui résident en permanence au Rwanda, ainsi qu'aux membres de leur famille, dans le cas où ils se trouvent en possession d'un permis de retour émanant du Ministre de l'Intérieur ou de son délégué.
Pour l'application du présent texte, sont considérés comme membres de la famille, le conjoint et les enfants âgés de moins de 21 ans.
Les personnes bénéficiant des mesures de facilités prévues au présent article, sont toutefois tenues de produire les certificats de vaccination spécifiés au 3) de l'article 2.
Article 5.
Les visas à apposer sur le passeport conformément au 1) de l'article 2 sont de cinq sortes:
1)Le visa de transit qui s'applique aux personnes munies d'un billet de voyage pour une destination autre que le Rwanda et qui, soit à l'aller, soit au retour, sont appelées simplement à transiter en territoire rwandais pendant le temps strictement nécessaire à l'accomplissement normal de leur déplacement;
2)Le visa de voyage correspondant à une autorisation de séjour s'étendant sur une durée de 8 jours à 6 mois;
3)Le visa temporaire correspondant à une autorisation de séjour s'étendant sur une durée de 6 mois à 2 ans;
4)Le visa d'établissement comportant autorisation de séjour d'une durée indéterminée;
5)Le visa diplomatique délivré aux autorités diplomatiques accréditées auprès du Gouvernement Rwandais, ainsi qu'aux membres de la mission diplomatique.
Le Ministre de l'Intérieur ou son Délégué pourra délivrer des visas de transit ou de voyage à des personnes entrées au Rwanda sous le couvert d'un permis provisoire conformément à l'article 17.
Il pourra en outre, sur requête motivée, autoriser les personnes munies d'un visa de transit à séjourner au Rwanda pour une durée de 8 jours au plus et accorder une prorogation de séjour de six mois aux personnes munies d'un visa de voyage.
Le Ministre de l'Intérieur fixe le tarif des droits à percevoir à l'occasion de la délivrance des visas et des autres documents à établir en matière de police de l'immigration.
Article 6.
Sont exemptées de l'obligation d'être en possession d'un visa de transit, mais non d'un passeport national en cours de validité les personnes qui, empruntant la voie aérienne, sont simplement appelées à faire escale en territoire rwandais et notamment:
a)les passagers qui empruntent le même avion à l'arrivée et au départ sur un aérodrome rwandais;
b)les passagers qui se trouvent dans l'obligation d'attendre un ou plusieurs jours sur un aérodrome rwandais le premier avion assurant la correspondance vers leur lieu de destination.
Cette dispense de visa de transit ne sera pas, toutefois, accordée aux passagers qui, délibérément, retardent leur départ pour des raisons personnelles qui n'ont rien à voir ni avec les horaires des lignes aériennes ni avec les conditions météorologiques; elle est exclusivement réservée aux passagers qui, privés d'une correspondance directe, se voient obligés de séjourner en un lieur d'escale, pendant un temps strictement limité dans l'attente d'une première correspondance.
Article 7.
Le visa de voyage est destiné aux touristes, hommes d'affaires et plus généralement aux étrangers qui ne viennent au Rwanda que pour une durée limitée et sans volonté d'y fixer leur résidence ordinaire.
Article 8.
Le visa temporaire est destiné aux personnes venant apporter au Pays du Rwanda, avec l'accord préalable du Gouvernement Rwandais, une assistance technique, sous quelque forme que ce soit et dont la mission est prévue pour une durée égale ou inférieure à deux ans.
Article 9.
Le visa d'établissement vaut autorisation de s'établir au Rwanda. Toute demande de visa d'établissement devra préciser l'activité à laquelle compte se livrer le postulant, la désignation exacte du lieu où il s'établira, ainsi que la nature et le montant des ressources ou moyens d'existence dont il disposera.
Article 10.
Toute personne munie d'un visa de voyage peut demander dans les formes prévues à l'article précédent, à bénéficier d'un visa temporaire ou d'établissement, par requête adressée au Ministre de l'Intérieur ou à son délégué.
De même, toute personne munie d'un visa temporaire peut, suivant la même procédure, demander à bénéficier d'un visa d'établissement.
Article 11.
Tout étranger doit, pour être admis à résider au Rwanda en vertu d'un visa temporaire ou d'un visa d'établissement tels que prévus articles 8 et 9 de la présente loi, consigner une somme d'argent à titre de cautionnement et de garantie pour l'éventualité où il viendrait à tomber à charge de la bienfaisance publique.
Le montant de ce cautionnement ainsi que les modalités de sa consignation, de son utilisation et de son remboursement seront déterminés par le Ministre de l'Intérieur.
Celui-ci peut, dans la mesure qu'il fixera, exempter de cette prescription certaines catégories d'étrangers.
Le Ministre de l'Intérieur peut également désigner les pouvoirs, institutions, organismes, établissements, sociétés, associations qui peuvent remplacer le cautionnement par un titre de garantie en vertu duquel ils s'engagent vis-à-vis du Trésor Rwandais à prendre à leur charge les frais de voyage, d'entretien, d'hospitalisation et de rapatriement de certaines catégories de personnes déterminées par le Ministre de l'Intérieur.
Article 12.
Les compagnies de transport sont responsables vis-à-vis du Gouvernement du [mot illisible] et de l'entretien éventuel au Rwanda des personnes qu'elles auraient transportées au cas où ces personnes ne pourraient établir qu'elles avaient accompli au départ les formalités requises par la présente loi.
Article 13.
Est considéré comme indésirable et ne peut en conséquence pénétrer ou résider au Rwanda quiconque ne pouvant exciper de sa qualité de citoyen rwandais, se trouve dans une des situations énumérées ci-après:
1)ne possède pas les documents spécifiés dans la présente loi et relatifs aux conditions et formalités d'entrée et de séjour;
2)ne peut justifier des moyens réguliers et suffisants d'existence, notamment s'il s'adonne à la prostitution ou au proxénétisme ou s'il n'est pas en mesure, en raison de ses infirmités, de s'assurer des moyens normaux de subsistance;
3)se trouve sous la dépendance d'une des personnes visées au paragraphe précédent;
4)aurait été expulsé du rwanda en application des dispositions prévues au présent texte;
5)serait sous le coup de poursuites ou aurait été condamné au Rwanda ou à l'étranger pour l'une des infractions visées par les Traités d'extradition sauf dans le cas ou la peine infligée est simplement une amende ou une peine privative de liberté égale ou inférieure à deux mois;
6)serait qualifié de voyageur ou résidant indésirable par le Ministre de l'Intérieur;
7)ne jouirait pas de la plénitude de ses facultés mentales;
8)serait atteint d'une des maladies contagieuses déterminées par arrêté ministériel;
9)exercerait une activité économique ou professionnelle pouvant porter préjudice aux intérêts de la République Rwandaise;
10)se livrerait à des actes d'espionnage ou autres manoeuvres de nature à porter atteinte à la sûreté intérieure ou extérieure de la République;
11)troublerait l'ordre public;
12)dont le comportement habituel porterait atteinte aux bonnes moeurs.
Par ailleurs, pourra être déclaré indésirable:
a)quiconque, étant entré au Rwanda, s'établit ou tente de s'établir sans y avoir été autorisé conformément aux dispositions de la présente loi;
b)quiconque est muni d'un titre de voyage qui se trouve dans l'impossibilité d'établir que l'autorité étrangère dont il relève s'engage à renouveler ou à proroger la validité dudit titre de voyage;
c)quiconque, entré au Rwanda sous le [mot illisible] d'un permis provisoire, d'un visa de transit ou d'un visa de voyage ou d'un visa temporaire ne quitte pas le Rwanda à l'expiration du délai correspondant audit permis ou auxdits visas;
d)quiconque, admis au Rwanda conformément aux dispositions de la présente loi s'adonne, sans l'accord préalable du Ministre de l'Intérieur à une activité professionnelle autre que celle en vue de laquelle son établissement a été autorisé.
CHAPITRE II.
DU CONTROLE DE L'IMMIGRATION.
Article 14.
Dès son arrivée sur le territoire de la République Rwandaise, l'immigrant est tenu de se présenter devant l'agent préposé à l'immigration.
Il peut être requis d'administrer la preuve qu'il ne rentre pas dans une des catégories énumérées à l'article précédent et qu'il remplit bien les conditions prévues pour être admis au Rwanda. Il est tenu de se laisser photographier, de laisser prendre ses empreintes digitales et de se soumettre à toute autre mesure d'identification ordonnée par les autorités compétentes.
Il est tenu également de subir un examen médical par un médecin du Gouvernement ou, à défaut, par un médecin agréé par l'Administration.
L'agent préposé à l'immigration pourra requérir toute personne arrivée au Rwanda de comparaître devant lui en vue de l'application éventuelle des dispositions stipulées aux trois paragraphes précédents.
Article 15.
Lorsqu'une enquête s'avérera nécessaire pour déterminer si une personne est indésirable ou pour rechercher si elle a bien rempli les formalités et conditions réglementaires nécessaires à son admission ou à sa présence au Rwanda, l'agent préposé à l'immigration notifiera par écrit à l'intéressée le lieu où elle devra résider et la période pendant laquelle elle devra demeurer à sa disposition, sans que, toutefois, la durée de cette période puisse excéder vingt et un jours.
Pourra être incarcérée dans une maison de détention à la diligence de l'agent de l'immigration toute personne qui n'obtempère pas à une réquisition ou à une injonction dudit agent et au cas où il y aurait des raisons valables de craindre qu'elle ne tente d'échapper ou de se soustraire à l'application des dispositions de la présente loi.
Toute incarcération de cette nature sera notifiée dans les vingt-quatre heures, par l'agent responsable, au Ministre de l'Intérieur ainsi qu'au Ministre de la Justice.
Les personnes incarcérées en application du présent article seront soumises au régime de la détention préventive.
Article 16.
Toute personne qui refusera de se soumettre aux dispositions des article 14 et 15 ou qui est considérée comme indésirable, aux termes de l'article 13, recevra de l'agent préposé à l'immigration notification, par écrit, qu'elle ne peut pénétrer sur le territoire du Rwanda ou qu'elle doit quitter celui-ci dans un délai et suivant un itinéraire déterminé. Un recours contre cette décision pourra être introduit par l'immigrant intéressé auprès du Ministre de l'intérieur et communiqué à l'agent de l'immigration qui a procédé à la notification.
Le Ministre de l'Intérieur statuera sur la suite à donner au recours dans les trois jours de sa réception.
Article 17.
A titre exceptionnel et compte tenu des circonstances, le Ministre de l'Intérieur ou les fonctionnaires qu'il déléguera à cet effet, pourront accorder des permis provisoires pour traverser le Territoire ou y effectuer un séjour dont la durée maximum ne pourra dépasser un mois, à certaines personnes qui ne remplissent pas les conditions requises d'admission ou de séjour au Rwanda ainsi qu'à certains indésirables.
CHAPITRE III.
DE L'EXPULSION, DE L'INTERDICTION DE SÉJOUR ET DE L'ASSIGNATION A RÉSIDENCE.
Article 18.
Le Ministre de l'Intérieur peut, par arrêté motivé, expulser du Territoire de la République Rwandaise, les étrangers considérés comme indésirables ou qui, par leur présence ou leur conduite, compromettraient ou menaceraient de compromettre la tranquillité ou l'ordre publics.
Il peut également, par décision motivée, astreindre les mêmes étrangers à une résidence assignée ou encore leur interdire le séjour dans telle ou telle localité.
Article 19.
Tout étranger frappé par une mesure d'expulsion, d'interdiction de séjour ou d'assignation à résidence, pourra interjeter appel de la décision le concernant, auprès du Président de la République, dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêté ministériel, soit par lettre missive dûment signée, soit par porteur de procuration.
Le Président de la République statuera dans les 12 jours de la réception de la requête.
Article 20.
Les décisions en vertu des articles 16 et 18 fixeront le délai dans lequel elles devront être exécutées et préciseront, éventuellement, l'itinéraire que devra suivre l'intéressé, pour quitter le Territoire.
CHAPITRE IV.
DES SANCTIONS.
Article 21.
a)Sera refoulé du Territoire Rwandais, tout étranger qui ne satisfait pas aux prescriptions de l'article 13 de la présente loi;
b)sera puni d'une servitude pénale de 8 à 15 jours et d'une amende de 1.000 à 5.000 francs ou l'une de ces peines seulement, tout étranger qui aura pénétré illégalement dans le Territoire Rwandais. Il sera toujours expulsé;
c)sera puni d'une servitude pénale de 8 jours à 3 mois et d'une amende de 2.000 à 10.000 francs ou l'une de ces peines seulement:
1)quiconque, en vue de l'aider à se soustraire aux mesures prises en vertu de la présente loi, engage à son service une personne non autorisée à s'établir au Rwanda;
2)quiconque prête son assistance à une personne qu'il sait indésirable pour lui permettre d'échapper à la décision du fonctionnaire compétent lui refusant l'accès au Rwanda, ou le refoulant ou l'expulsant du Territoire;
3)quiconque prête son assistance à une personne qu'il sait avoir été déclarée indésirable et aux fins de lui permettre d'éluder les prescriptions prévues aux articles 15, 16 et 18;
4)quiconque trompe ou abuse l'autorité en vue d'obtenir pour lui ou pour un tiers, la faculté d'entrer au Rwanda ou de continuer à y résider, alors qu'il sait pertinemment que lui-même ou ce tiers est indésirable;
5)quiconque apporte des entraves à l'accomplissement de leurs fonctions, par les agents de l'autorité, agissant pour l'exécution des prescriptions en matière de police de l'immigration et de contrôle des étrangers.
Article 22.
Toute personne qui aura enfreint ou tenté d'enfreindre une décision prise en application des articles 15, 16 et 18 sera mise en état d'arrestation et contrainte à l'exécution de la décision prise à son encontre.
Elle pourra, de ce chef, être poursuivie et être condamnée à 3 mois et à une amende de 2.000 à 10.000 francs ou à une de ces peines seulement.
Toutefois, l'exécution de la sentence intervenue pourra être suspendue à la demande de l'auteur de la décision et ce, en vue de l'exécution forcée et immédiate de cette même décision.
CHAPITRE V.
DISPOSITIONS TRANSITOIRES.
Article 23.
Le Ministre de l'Intérieur est chargé de régulariser la situation en matière d'immigration de tous les étrangers se trouvant présentement au Rwanda, endéans les trois mois qui suivront la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
CHAPITRE VI.
DISPOSITIONS GÉNÉRALES.
Article 24.
Les dispositions réglementaires prises par le Ministre de l'Intérieur en exécution de la présente loi pourront prévoir des sanctions ne dépassant pas 3 mois de servitude pénale principale et 2.000 francs d'amende ou d'une de ces peines seulement.
Article 25.
Sont abrogées toutes dispositions contraires à la présente loi.
Article 26.
La présente loi entre en vigueur le jour de sa signature.
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