Conclusions générales Nº 74 (XLV) - 1994

Le Comité exécutif,

a) Se déclare profondément préoccupé par les immenses souffrances et les pertes en vies humaines qui ont accompagné les crises récentes impliquant des flux de réfugiés et autres déplacements forcés;

b) Reste gravement préoccupé par l'ampleur et la complexité des problèmes actuels de réfugiés qui ont rendu plus difficile l'exercice des fonctions cruciales du Haut Commissaire consistant à assurer une protection internationale aux réfugiés et à mettre en œuvre en temps voulu des solutions durables à leur sort;

c) Réaffirme l'importance de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés en tant que pierre angulaire du système international pour la protection des refugiés et souligne le rôle du Haut Commissaire, conformément aux articles 35 et II, respectivement, de ces instruments ainsi qu'aux termes du statut de l'Office, dans le contrôle de leur application;

d) Se félicite de l'adhésion à ces instruments au cours de l'année passée de la Dominique, de l'ex-République yougoslave de Macédoine et du Tadjikistan, ce qui porte à 127 le nombre d'Etats parties à l'un ou l'autre de ces instruments; par ailleurs, constatant que les Etats Membres des Nations Unies sont aujourd'hui au nombre de 189, et étant donné le caractère universel du problème des réfugiés, exhorte les Etats qui ne l'ont pas encore fait à adhérer à ces instruments, et demande à tous les Etats de les appliquer pleinement;

e) Se félicite vivement de l'engagement manifeste des Etats à continuer de recevoir et d'accueillir les réfugiés et, en coopération avec le HCR, de leur accorder une protection internationale;

f) Déplore le fait que dans certaines situations, les réfugiés, les rapatriés et d'autres personnes relevant de la compétence du HCR ont été victimes d'attaques armées, de meurtres, de viols et d'autres violations ou de menaces à la sécurité de leur personne ainsi qu'à l'exercice de leurs autres droits fondamentaux, et que des incidents de refoulement et de déni d'accès à la sécurité se sont produits;

g) Lance un nouvel appel aux Etats pour qu'ils défendent et renforcent l'asile en tant qu'instrument indispensable de la protection internationale des réfugiés, pour qu'ils respectent le principe fondamental du non-refoulement et qu'ils fassent tous les efforts possibles pour assurer la sécurité et le bien-être des réfugiés placés sous leur juridiction;

h) Souligne l'importance de la solidarité internationale et du partage de la charge pour renforcer la protection des réfugiés et prie instamment tous les Etats de prendre une part active, en collaboration avec le HCR, aux efforts déployés pour assister les pays, en particulier ceux qui disposent de ressources limitées, qui accueillent et prennent en charge un grand nombre de réfugiés et de demandeurs d'asile;

i) Réitère l'importance d'assurer l'accès de toutes les personnes en quête d'une protection internationale à des procédures justes et efficaces de détermination du statut de réfugié ou à d'autres mécanismes appropriés, selon le cas, garantissant que les personnel ayant besoin d'une protection internationale sont identifiées et bénéficient de cette protection;

j) Reconnaît que les demandes d'asile déposées par un grand nombre de migrants irréguliers n'ayant pas besoin de protection internationale continuent de poser des problèmes graves dans certaines régions et réitère à cet egard sa conclusion No. 71 (XLIV) (1993), paragraphes j à 1;

k) Note qu'un grand nombre des personnes ayant besoin d'une protection internationale ont été forcées de fuir ou de rester à l'extérieur de leur pays d'origine en raison des menaces que des situations de conflit font peser sur leur vie ou leur liberté;

l) Considère que les personnes qui ne peuvent rentrer dans la sécurité vers leur pays d'origine du fait de situations de conflit, qu'elles puissent ou non être considérées comme des réfugiés aux termes de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967, en fonction de circonstances particulières, n'en requièrent pas moins fréquemment une protection internationale, une assistance humanitaire et une solution à leur sort;

m) Rappelle que l'Assemblée générale des Nations Unies a demandé à plusieurs reprises au HCR d'offrir protection et assistance aux personnes qui ont été forcées de chercher refuge à l'extérieur de leur pays d'origine du fait de situations de conflit, encourage le Haut Commissaire à continuer d'offrir une protection internationale à ces personnes et de chercher des solutions aux problèmes découlant de leur déplacement forcé, conformément aux résolutions pertinentes de l'Assemblée générale, et demande à tous les Etats d'aider le Haut Commissaire et d'appuyer ses efforts à cet égard;

n) Constate qu'en Afrique et en Amérique latine, les instruments régionaux prévoient la protection des réfugiés fuyant le conflit armé et la guerre civile ainsi que des personnes qui craignent la persécution, et que, dans d'autres régions, les personnes qui requièrent une protection internationale mais qui ne sont pas considérées comme des réfugiés aux termes de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 ou qui se trouvent dans des pays qui n'ont pas adhéré à ces instruments, ont néanmoins généralement obtenu protection et assistance humanitaire au titre de mesures spécifiques adoptées par les Etats, avec la pleine coopération du HCR;

o) Déclare que l'étude de nouvelles mesures est souhaitable afin de garantir une protection internationale à tous ceux qui en ont besoin;

p) Est conscient de la valeur de l'harmonisation régionale des politiques nationales pour veiller à ce que les personnes qui ont besoin d'une protection internationale la reçoivent réellement et invite les Etats à consulter le HCR au niveau régional pour atteindre cet objectif;

q) Encourage le Haut Commissaire à continuer de promouvoir la coopération internationale dans la fourniture de la protection internationale à tous ceux qui en ont besoin , et à entamer de nouvelles consultations et discussions sur les moyens d'atteindre cet objectif, pouvant inclure l'élaboration de principes directeurs, y compris pour une action concertée;

r) Estime que la protection temporaire, incluant, selon la définition donnée par le Haut Commissaire dans le contexte de la Réponse globale à la crise humanitaire dans l'ancienne Yougoslavie, l'admission vers la sécurité, le respect des droits fondamentaux de l'homme, la protection contre le refoulement et le retour sûr, lorsque les conditions le permettent, vers le pays d'origine, peut être valable en tant que méthode pragmatique et flexible d'octroi de la protection internationale d'une nature temporaire dans des situations de conflit ou de persécution impliquant un exode massif;

s) Constate avec satisfaction que le Haut Commissaire poursuit l'étude, conformément à la conclusion générale sur la protection internationale de 1993 (A/AC.96/821, par. 19 m), de la protection temporaire comme stratégie d'asile, dans le contexte d'approches régionales globales en vue de la prévention, de la protection et des solutions, et attend avec intérêt de futures discussions entre les gouvernements intéressés sur ce sujet, y compris la durée de la protection temporaire;

t) Note que les bénéficiaires de la protection temporaire peuvent inclure les personnes qui répondent aux critères de réfugié aux termes de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 et d'autres qui peuvent ne pas y répondre, et que les Etats et le HCR ne doivent pas, par l'octroi d'une protection temporaire, réduire la protection accordée aux réfugiés en vertu de ces instruments;

u) Prie instamment le HCR, en étroite coopération avec les gouvernements concernés, de continuer à coordonner et à guider la mise en œuvre de la protection temporaire et d'autres formes d'asile axées vers le rapatriement, dans des situations où le retour dans les foyers est jugé la solution durable la plus appropriée, y compris par des conseils en matière de rapatriement librement consenti et de retour sûr une fois que la protection internationale n'est plus nécessaire;

v) Réaffirme que le rapatriement librement consenti, lorsqu'il est réalisable, constitue la solution idéale aux problèmes de réfugiés et invite les pays d'origine, les pays d'asile, le HCR et la communauté internationale dans son ensemble à faire tout leur possible pour permettre aux réfugiés d'exercer librement leur droit au retour dans la sécurité et la dignité;

w) Note que de nombreux obstacles se sont opposés au rapatriement librement consenti, y compris les menaces à la sécurité des réfugiés rentrant chez eux, tant dans les pays d'asile que dans les pays d'origine, et la persistance ou la recrudescence des conditions ayant provoqué la fuite des réfugiés;

x) Souligne à cet égard la responsabilité des Etats d'origine de réadmettre leurs nationaux et d'assurer leur sécurité et leur bien-être ainsi que celle des pays d'asile d'assurer la sécurité et de préserver les droits fondamentaux des réfugiés, et demande instamment à la communauté internationale d'aider les Etats à assumer leurs responsabilités concernant les réfugiés et les rapatriés;

y) Réitère ses conclusions No.18 (XXXI) (1980) et 40 (XXXVI) (1985) sur le rapatriement librement consenti et souligne le rôle moteur du HCR pour promouvoir, faciliter et coordonner le rapatriement librement consenti des réfugiés en coopération avec les Etats concernés. y compris celui de s'assurer que la protection internationale continue d'être accordée à ceux qui en ont besoin jusqu'à ce qu'ils puissent rentrer dans la sécurité et la dignité dans leur pays d'origine, en favorisant, si nécessaire, le retour et la réintégration des réfugiés rentrant chez eux, et en vérifiant leur sécurité et leur bien-être au retour;

z) Reconnaît l'utilité, dans des circonstances appropriées, des visites de représentants des pays d'origine aux camps de réfugiés dans les pays d'asile, dans le cadre de campagnes d'information pour promouvoir le rapatriement librement consenti, et demande au HCR, en coopération avec les pays d'asile concernés, de faciliter ces visites;

aa) Convient que pour garantir le caractère viable du rapatriement et, par là même, son caractère de solution réellement durable au problème des réfugiés, il est essentiel que le besoin de réhabilitation, de reconstruction et de réconciliation nationale soit couvert de façon exhaustive et efficace, et invite la communauté internationale à continuer d'appuyer les efforts du Haut Commissaire pour promouvoir des approches globales et régionales en vue de la prévention, de la protection et des solutions, en consultation avec les Etats et les organes gouvernementaux et non gouvernementaux, internationaux, régionaux et nationaux, en tant que de besoin;

bb) Réaffirme l'importance de la réinstallation en tant qu'instrument de protection et son usage en tant que solution durable dans des circonstances spécifiques;

cc) Souligne la nécessité, particulièrement dans des situations d'urgence complexes comportant à la fois des opérations humanitaires et des opérations de maintien de la paix, d'assurer le respect du mandat de protection du Haut Commissaire et de préserver le caractère impartial et strictement humanitaire des activités du HCR;

dd) Réitère son appui aux activités du Haut Commissaire en faveur des personnes déplacées à l'intérieur du territoire conformément à la Résolution 48/116 (1993) de 1'Assemblée générale et exprime sa satisfaction pour les débats détaillés et productifs au sein du Sous-Comité plénier sur la protection internationale et dans d'autres instances sur les moyens dont dispose la communauté internationale pour mieux couvrir les besoins de protection et d'assistance des personnes déplacées;

ee) Note avec préoccupation les problèmes persistants des apatrides dans différentes régions et l'émergence de nouvelles situations d'apatridie et, reconnaissant les responsabilités déjà confiées au Haut Commissaire par l'Assemblée générale des Nations Unies concernant la prévention des cas d'apatridie [Résolution 3274 (XXIX) de l'Assemblée générale], invite le HCR à renforcer ses efforts dans ce domaine, y compris par la promotion d'adhésions à la Convention relative à la réduction des cas d'apatridie et à la Convention relative au statut des apatrides, la formation à l'intention du personnel du HCR et des fonctionnaires gouvernementaux ainsi que la collecte systématique d'informations sur la dimension du problème, et à tenir le Comité exécutif informé de ces activités;

ff) Prie le Haut Commissaire de veiller à une participation active du HCR à la Conference mondiale de 1995 sur les femmes et à ses réunions préparatoires régionales afin que la situation des femmes réfugiées reste au premier plan de l'ordre du jour international sur les questions relatives aux femmes;

gg) Exhorte le HCR, en coopération avec les gouvernements, d'autres organisations des Nations Unies, internationales et non gouvernementales, particulièrement l'UNICEF et le CICR, à poursuivre leurs efforts pour accorder une attention particulière aux besoins des enfants réfugiés, veillant en particulier à ce que des dispositions soient prises pour leur prise en charge immédiate et à long terme, y compris la santé, la nutrition et l'éducation et, dans le cas des enfants séparés de leur famille, l'enregistrement rapide, la recherche de famille et le regroupement familial;

hh) Demande aux Etats recevant des réfugiés, en étroite collaboration avec le HCR et d'autres organisations compétentes et conformément aux Principes directeurs du HCR concernant les enfants réfugiés, de préserver la sécurité des enfants réfugiés et de s'assurer qu'ils ne seront pas recrutés dans les forces militaires ou autres groupes armés;

ii) Note avec tristesse les blessures et les décès causés à des réfugiés et des rapatriés, y compris à des femmes et à des enfants mutilés et handicapés en grand nombre, par l'emploi aveugle des mines terrestres, ainsi que l'incidence meurtrière et à long terme de ces armes sur les processus de rapatriement volontaire, de réadaptation et de reprise d'une vie normale pour des millions de réfugiés et de personnes déplacées, et souscrit aux activités du Haut Commissaire pour poursuivre les efforts internationaux visant à réduire ou éliminer la menace que les mines terrestres représentent pour eux;

jj) Apprécie l'importance d'assurer l'accès à une information actualisée et fiable sur les déplacements involontaires afin de promouvoir des solutions à toutes les étapes d'une crise de réfugiés, et réaffirme son appui aux efforts constants du Haut Commissaire pour élaborer à cette fin une politique d'information et des bases de données capables de relever les nouveaux défis grâce à des sources d'information pertinentes;

kk) Note avec satisfaction les activités du HCR concernant la promotion et la diffusion du droit des réfugiés et des principes de protection et invite le Haut Commissaire à continuer d'étendre et de renforcer ses activités de promotion et de formation, avec l'appui actif des Etats et moyennant une coopération accrue avec les organisations des droits de l'homme, les milieux universitaires, l'Institut international du droit humanitaire de San Remo et d'autres organisations compétentes tant au sein du système des Nations Unies qu'à l'extérieur;

ll) Se félicite de la coopération croissante entre le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et le Haut Commissaire aux droits de l'homme et de sa coopération suivie avec le Centre pour les droits de l'homme, et demande au HCR de continuer activement à participer aux travaux de la Commission des droits de l'homme et à coopérer avec elle;

mm) Reconnaît l'utilité des réunions périodiques du Sous-Comité plénier sur la protection internationale et demande au Haut Commissaire de convoquer au moins une de ces réunions pour étudier les questions actuelles en matière de protection et faire état des progrès accomplis dans les délibérations du Comité à sa quarante-sixieme session.

Comments:
45e Session du Comité exécutif. Voir Documents officiels de l'Assemblée générale, Supplément No 12A (A/49/12/Add.1)
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