1. Constitution

1.1. Dénomination officielle de l'Etat

Doulat-e Islami-ye Afghanistan = Etat islamique d'Afghanistan

1.2. Armoiries et drapeau de l'Etat

Drapeau: vert - blanc - noir; textes religieux dans la partie blanche.

1.3. Forme de l'Etat

Suite à la chute du régime communiste et à la prise du pouvoir par les Moudjahidins, le 16 avril 1992, l'Afghanistan est une République islamique. En réalité, le pays est divisé en plusieurs zones. La légitimation du gouvernement provisoire, installé à Kaboul, est contestée et il n'existe pour le moment aucun organe étatique reconnu. De ce fait, le pays ne possède actuellement aucune constitution valable. Depuis juillet 1992, une constitution transitoire est en cours d'élaboration. Elle devrait remplacer la constitution de 1987, ainsi que les modifications apportées à cette dernière en mai 1990.

2. Situation sociale et culturelle

2.1. Population

Actuellement, on ne dispose d'aucune donnée démographique fiable. En 1990, la population totale a été estimée par l'ONU à 20,7 millions d'habitants pour une superficie d'environ 648'000 km². De plus, 3,3 millions d'Afghans vivent en tant que réfugiés au Pakistan, 1,3 million en Iran et environ 100'000 dans d'autres pays. En 1993, la capitale du pays, Kaboul, ne comptait plus qu'environ 600'000 habitants comparé à 1,8 million en 1990. Aujourd'hui, on ne recense plus que 200'000 habitants. En revanche, Mazar-e Sharif, la ville la plus importante du nord du pays, a vu sa population passer, ces dernières années, de 70'000 habitants à plus de 2 millions. Les autres villes importantes sont Kandahar, Kunduz, Ghazni, Herat, Djalalabad, Maïmana et Poul-e Khumri. L'Afghanistan est un Etat pluriethnique. Jusqu'en 1979, les Pachtuns (aussi dénommés Afghans ou Pathanes) représentaient le groupe ethnique le plus important. Leur nombre a considérablement diminué dès 1979, suite aux mouvements migratoires de fuite, auxquels les Pachtuns ont participé en majorité. Ainsi en 1987, les Pachtuns ne représentaient plus que le 22% de la population totale, comparativement aux 34% de Tadjiks, 14% d'Hazaras, 14% d'Ouzbeks. Les 16% restant étant formés de Nouristanis, de Baloutches, de Turkmènes, de Kirghiz, de Kazakhs et d'Aymags.

2.2. Langue

Dans les années cinquante, le pachtou et le dari (persan d'Afghanistan, aussi appelé tadjik) sont devenues les langues administratives et scolaires officielles. Le dari, avant tout le parler des Tadjiks, des Farsis, des Hazaras et des Aymags, possède aussi une fonction de langue de communication pour les Pachtuns, les Ouzbeks et les Turkmènes vivant dans des régions pluriethniques. De plus, une multitude de langues, utilisées par des minorités ethniques, telles que l'ouzbek, le turkmène, le baloutche, le nouristani, le pashai etc. ont été officiellement reconnues depuis 1978.

2.3. Religion

98% de la population afghane est musulmane, dont environ 4/5 de sunnites et 1/5 de chiites (les imamites et les ismaéliens). L'Islam sunnite de l'école hanéfite a été déclaré religion d'Etat dans la Constitution de 1987. On compte également quelques groupes d'hindous, de sikhs et de juifs. Officiellement, les chrétiens ne sont pas tolérés. Leur nombre est extrêmement petit en Afghanistan.

2.4. Système éducatif

Le droit à une formation scolaire est inscrit dans la Constitution de 1923. En 1975 fut introduite l'obligation scolaire pour tous les enfants de 7 à 12 ans. Jusqu'en 1979-1980, période d'effondrement du système scolaire étatique, près d'un million d'élèves fréquentaient plus de 5'000 établissements scolaires de tous niveaux. On estimait à environ 90% le taux d'analphabétisme (à savoir 80% pour les hommes et 97% pour les femmes). Dans les zones contrôlées par les Talibans, les jeunes filles n'ont, à l'heure actuelle, pas le droit d'être scolarisées: en 1995, 47'000 d'entre elles se sont vu interdire l'accès à l'école et 135 établissements scolaires ont été fermés. Les écoles supérieures sont situées essentiellement à Kaboul et dans les chefs-lieux des provinces de Herat, Djalalabad, Mazar-e Sharif et Kandahar.

2.5. Infrastructure médicale

A ce sujet, nous ne disposons pas de chiffres actuels. Les dernières informations proviennent des années 80. En 1984, on comptait un médecin pour 10'000 habitants et le 80% des médecins pratiquait dans la capitale. Dans les régions contrôlées par la guérilla (environ le 80-90% du pays), seuls 50 médecins afghans et étrangers pratiquaient en 1984; en 1987, il y en avait environ 150. Durant la guerre, la formation des médecins - qui était dispensée principalement dans les universités de Kaboul et de Djalalabad - était insuffisante par rapport aux besoins. La plupart des jeunes médecins rejoignaient les rangs des Moudjahidins durant leur période de stage obligatoire en clinique. Dans différentes régions du pays, certaines cliniques ont été équipées par les organisations humanitaires étrangères, telles que Médecins Sans Frontières, Médecins du Monde et le Comité allemand d'Afghanistan. Dans les années 80, les maladies les plus courantes étaient la tuberculose, la malaria, le typhus, le choléra et la dysenterie. La sous-alimentation et la mortalité infantile se sont encore accrues: en 1990, le taux de mortalité d'enfants âgés de moins de 5 ans a atteint le chiffre de 292 pour 1'000. L'espérance de vie était de 42,5 ans en moyenne.

3. Femme et famille

D'après un indice d'évolution, déterminé selon le sexe, dans le cadre du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), c'est en Afghanistan que les femmes ont les perspectives les moins prometteuses. Leurs droits sont fortement lésés, en particulier dans les zones contrôlées par les Talibans. Dans ces régions, les femmes n'ont pas le droit de travailler et les jeunes filles ne sont pas autorisées à fréquenter l'école; il est également en partie interdit à la gent féminine de quitter la maison. Cette interdiction est entérinée par une ordonnance de la Cour suprême de justice d'Afghanistan datant du mois de décembre 1993, laquelle fixe l'obligation pour les femmes de se recouvrir entièrement d'un voile et déclare inconvenante l'attitude des femmes qui quittent leur demeure. Toutefois, cette mesure stricte a dû être assouplie dans certaines localités afin de permettre aux femmes d'aller au marché pour approvisionner la famille. Un climat plus libéral règne dans la zone dirigée par M. Dostum, au nord du pays. Même si les femmes ne bénéficient là aussi que de droits très limités, elles ont pu conserver une certaine liberté de mouvement, dans le respect de la tradition islamique et malgré l'opposition du clergé. Il a été impossible d'appliquer l'ordonnance instituant le port du voile dans les villes notamment, où nombre de femmes se promènent sans être voilées, obligées toutefois de porter un foulard. Les écoles de jeunes filles sont restées ouvertes et les écoles supérieures accueillent également des femmes. Ces dernières ont aussi la possibilité d'accéder à des postes de l'Administration: à Chebergan, le quartier général de M. Dostum, travaille la seule femme juge d'Afghanistan ayant encore le droit d'exercer sa profession. Le sort des femmes afghanes à Kaboul est, depuis 1992, marqué en premier lieu par la guerre civile vécue au quotidien. Dans ce contexte, on relève de multiples violations des droits de la personne, telles que tortures, viols et prises d'otages, perpétrées à l'encontre de la population féminine par les groupes moudjahidins rivaux. Les efforts que plusieurs de ces groupements ont déployés pour cloîtrer les femmes à la maison n'ont jusqu'à présent pas abouti à Kaboul, dont les rues sont arpentées par nombre de femmes, habillées en noir la plupart du temps, mais moins voilées qu'à Peshawar par exemple. L'Université de Kaboul est, depuis sa réouverture en avril 1995, fréquentée aussi bien par des femmes que par des hommes. En ce qui concerne la situation en matière d'emploi, la main-d'oeuvre féminine a diminué ces dernières années.

4. Médias

4.1. Agences d'informations

L'agence de presse Bachtar, fondée en 1939, dépend du Ministère de l'Information et publie aussi, depuis le mois d'octobre 1992, un bulletin d'informations en anglais.

4.2. Journaux et revues

A la fin des années 80, les principaux quotidiens étaient le journal du parti, le Haqiqat-e Engelab-e Saur (en dari; tiré à 50'000 exemplaires; paraît depuis 1980), le Anis (en dari et en pachtou; tiré à 25'000 exemplaires; paraît depuis 1927), le Hewad (en dari et en pachtou; tiré à 12'000 exemplaires; paraît depuis 1959) et le Kabul Times (le seul journal de langue anglaise; intitulé, avant le mois d'avril 1988, le Kabul New Times; tiré à 5'000 exemplaires). L'hebdomadaire au tirage le plus important était le Haqiqat-e Sarbaz (en dari et en pachtou; tiré à 18'370 exemplaires; paraît depuis 1979). A cela s'ajoutent divers autres journaux locaux.

4.3. Radio

L'émetteur officiel, Radio Kaboul, dénommé aussi, depuis le mois d'avril 1992, Radio de l'Etat islamique d'Afghanistan, est soumis au contrôle de M. Rabbani. Les dirigeants des régions qui ne sont pas sous l'emprise de M. Rabbani disposent de leurs propres émetteurs, tels que la Radio Message de Liberté de M. Hekmatyar.

4.4. Télévision

La télévision TV Afghanistan de Kaboul est soumise au contrôle de M. Rabbani. Elle émet des émissions deux heures par jour et ne peut être captée que dans un rayon de quelques kilomètres par les rares personnes qui possèdent leur propre générateur électrique. En règle générale, le programme consiste en un bulletin d'informations progouvernemental d'une heure et en la retransmission de la prière du soir. Des dirigeants comme MM. Dostum et Hekmatyar disposent de leurs propres émetteurs.

5. Economie

5.1. Economie politique

Déjà avant l'invasion soviétique en 1979, l'Afghanistan était l'une des nations les plus pauvres du monde. Le secteur agraire qui, jusqu'en 1979, couvrait les 3/4 des exportations et les 2/3 du revenu national et qui assurait l'existence de la majorité de la population, a subi des dommages considérables en raison de la guerre. Les richesses minières (surtout la houille et le gaz naturel) sont très peu exploitées. Par ailleurs, l'exportation de gaz naturel vers l'Union soviétique a cessé à la fin des années 80. L'Afghanistan serait le plus grand producteur mondial de pavot.

5.2. Situation de l'emploi

Aucun chiffre fiable concernant la situation actuelle en matière d'emploi n'est disponible. Traditionnellement, la majeure partie de la population travaille dans le secteur de l'agriculture. Il est probable qu'un certain nombre d'hommes (jeunes essentiellement) s'engagent, comme soldats, au service d'un parti ou d'un groupe, la solde mensuelle offerte, à savoir environ CHF 20.- en 1995, équivalant pratiquement au double du revenu d'un ouvrier. Dans les régions du pays contrôlées par les Talibans, les femmes n'ont plus le droit de travailler.

5.3. Monnaie officielle

L'unité monétaire est l'afghani (Af). 1 afghani équivaut à 100 puls. Le cours officiel de l'afghani est lié à celui du dollar américain. Sont émis des billets de 10, 20, 50, 100, 500, 1'000, 5'000 et 10'000 Af, ainsi que des pièces d'une valeur de 2 et de 5 Af et de 25, 50 et 100 puls. La roupie pakistanaise (kaldar) est aussi utilisée dans certaines provinces comme le Kunar, le Nangarhar et Paktia.

6. Mobilité

6.1. Moyens de communication

La construction du réseau routier a commencé dans les années 20. Les premières routes goudronnées ont été construites vers le milieu des années 50. La voie de communication contournant le massif de l'Hindu Kush a été terminée dans les années 60 et 70 avec l'aide massive de l'Union soviétique et des Etats-Unis. Ainsi, les régions les plus importantes d'Afghanistan sont reliées entre elles, telles les villes de Herat, Kandahar, Ghazni, Kaboul, Poul-e Khumri, Mazar-e Sharif, Chebergan. De plus, le pays a des voies d'accès vers les pays limitrophes. L'ensemble de l'infrastructure routière a une longueur d'environ 20'000 km en 1984, dont 7'000 km sont utilisables pour des véhicules à moteur. L'Afghanistan ne possède pas de chemin de fer. Une liaison ferroviaire reliant Kaboul, Kandahar et Herat jusqu'à la frontière iranienne avait été planifiée en 1977, mais elle n'a jamais été construite. L'infrastructure de Kaboul a été, au fil de ces dernières années, quasiment réduite à néant. Il n'y a plus ni électricité ni téléphone; seuls de rares privilégiés peuvent bénéficier de liaisons téléphoniques par satellites. La poste fonctionne très irrégulièrement, de même que la compagnie aérienne afghane Ariana, qui assure des vols en partance de Kaboul et à destination de Dubai, New-Delhi et Peshawar.

6.2. Papiers de voyage

Actuellement, il existe en Afghanistan en plus de la carte d'identité, cinq passeports différents portant tous la mention "Republic of Afghanistan". Il s'agit du passeport habituel (Passport, bleu), du passeport diplomatique (Diplomatic Passport, noir), du passeport de service (Service Passport, bleu-clair), du passeport d'étudiants (Student's Passport, rouge) et enfin du passeport commercial (Trade Passport, vert). Le passeport gris de la "Democratic Republic of Afghanistan", qui était utilisé auparavant, est encore en circulation. Les représentations afghanes à l'étranger émettent des passeports ordinaires, ainsi que des passeports de transit (laissez-passer) en vue d'un retour en Afghanistan (Transit Pass for returning to Afghanistan). La plupart des visas d'entrée délivrés par des représentations à l'étranger ne sont pas acceptés aux postes de contrôle d'Afghanistan. Il est fréquent que même les visas émis sur le territoire afghan perdent leur validité, dès que le détenteur quitte la zone dans laquelle est situé le bureau émetteur. Ainsi, un visa émanant de l'administration de M. Rabbani est en général sans valeur dans la zone dirigée par M. Dostum; inversement, les visas d'entrée établis dans la zone gouvernée par M. Dostum ne sont pas reconnus à Kaboul.

7. Gouvernement

7.1. Chef d'Etat

Après la chute de M. Najibullah, M. Sibghatullah Mujaddidi est devenu Président intérimaire et chef du Comité exécutif le 28 avril 1992. Suite à l'accord du 28 juin 1992, il a cédé la présidence à M. Burhanuddin Rabbani pour une durée de quatre mois. Selon l'accord de Peshawar du 24 avril 1992, une assemblée électorale (Shura Hal-o-Aqd) aurait dû procéder, fin octobre 1992, à l'élection d'un nouveau chef d'Etat. Comme les membres de la Shura ne purent être nommés dans les délais, le mandat de M. Rabbani à la tête de l'Etat fut prolongé de 45 jours. Le 30 décembre 1992, M. Rabbani, qui figurait lui aussi parmi les candidats à la présidence, fut élu chef de l'Etat afghan pour 18 mois par les 1'300 délégués de la Shura Hal-o-Aqd. Ses opposants, dont M. Gulbuddin Hekmatyar, avaient boycotté les élections. M. Rabbani a depuis lors proclamé plusieurs fois la prolongation de son mandat, refusant sans cesse de se retirer. La légitimation de sa fonction de président d'Afghanistan est contestée.

7.2. Gouvernement national

Le premier cabinet gouvernemental des Moudjahidins se composait de 36 chefs-combattants de la résistance. Tous les grands partis étaient représentés, à l'exception du mouvement Hezb-e Islami de M. Hekmatyar qui boycottait le nouveau gouvernement, ainsi que du mouvement Hezb-e Wahdat. Toutes les fonctions ministérielles, à part celles de M. Ahmed Shah Massoud, ministre de la défense, et de M. Ahmad Shah, ministre de l'intérieur, avaient un caractère provisoire. Par la suite, les membres du gouvernement changeaient souvent. Selon l'accord d'Islamabad du 7 mars 1993, un nouveau gouvernement devait être formé par M. Gulbuddin Hekmatyar, le nouveau premier ministre. Le 19 mai 1993, une liste des membres du cabinet, composée pour la plupart de membres du premier gouvernement intérimaire, fut approuvée. Les fonctions-clés, à savoir le ministère de la défense et de l'intérieur, furent placées durant deux mois sous l'égide de deux commissions présidées par MM. Rabbani et Hekmatyar. Contrairement à l'accord, les postes des ministères de la défense et de l'intérieur ne furent pas occupés après l'expiration du délai de deux mois. En fait, c'est toujours M. Ahmed Shah Massoud qui occupe le poste de ministre de la Défense. Au début de l'année 1995, alors que MM. Arsala Rahmani et Qutbuddin Hilal étaient respectivement Premier ministre et vice-Premier ministre, M. Qara Beg Ezedyar fut nommé ministre de l'Intérieur. Le gouvernement actuel de M. Rabbani ne jouissant plus d'aucune réelle souveraineté territoriale, sa légitimation est contestée.

8. Parlement

Jusqu'en 1992, la Grande Assemblée (Loya Djirga) était l'organe législatif suprême et avait, entre autres, la fonction de nommer le président. Elle était formée de chefs de tribus traditionnelles et de représentants de l'assemblée nationale (Shura-e Melli). Contrairement à cette dernière, la Djirga ne siégeait qu'irrégulièrement. Le fonctionnement de ce parlement a cessé lors de la prise du pouvoir par les Moudjahidins.

9. Administration

L'organisation administrative de l'Afghanistan a comme base la grande réforme du territoire en 1964 qui a amené la division du pays en 28 provinces (Welayat). En 1979 et en 1988, de nouvelles provinces s'y sont ajoutées, à savoir les provinces de Paktika et Sar-e Poul (districts au sud de Djawzjan et Balkh). Le gouverneur (Wali), en tant que chef de l'administration provinciale, est théoriquement soumis au pouvoir du gouvernement central. Mais, dans la pratique, l'administration centrale ne fonctionne pas depuis la prise du pouvoir par les Moudjahidins. (Important! Ne pas effacer ce texte ni la fin de section !!)

10. Elections

Depuis les années 60, il n'y a plus eu d'élections libres en Afghanistan. Des élections générales avaient été prévues pour le mois d'octobre 1993, conformément aux accords de paix d'Islamabad; mais, elles n'ont pas encore eu lieu.

11. Droit et système judiciaire

11.1. Droit

Suite à la prise du pouvoir par les Moudjahidins, le droit islamique, la Charia, a été introduit dans tout le pays, en mai 1992. Les lois et les décisions en contradiction avec ce système juridique ont toutes été abrogées. Actuellement, c'est le Code pénal de 1964 qui est officiellement appliqué, dans la mesure où il ne va pas à l'encontre du droit islamique. Les bases juridiques existantes revêtent, dans la pratique, peu d'importance, puisque la jurisprudence est maigre, l'exercice du droit par les organes de l'Etat rare et que le pays ne possède pas de système juridique uniforme. Dans les différentes régions, la jurisprudence est en premier lieu influencée par le droit tribal ou par les conceptions juridiques des dirigeants locaux. Ainsi, la vie du plus grand groupe ethnique d'Afghanistan que constituent les Pachtuns est régie par la loi tribale pachtune, la pratique du pachtunwali. Les zones contrôlées par les Talibans appliquent strictement le droit islamique, selon des directives fondamentalistes. Pour ce qui est des autres régions, aucune information précise concernant leur jurisprudence et leur organisation judiciaire n'est disponible. Cependant, on doit partir de l'idée qu'il n'est pas possible, d'une façon générale, de parler de procédures dignes d'un Etat de droit au sens européen.

11.2. Tribunaux ordinaires

Etant donné les circonstances, répartir les affaires entre les tribunaux ordinaires, les tribunaux d'exception et les tribunaux militaires est impossible. Dans la plupart des régions et des zones sont instaurés des tribunaux islamiques non étatiques, soumis à l'autorité des dirigeants locaux. Les tribunaux islamiques sont des cours martiales où l'accusé n'a pas le droit de se défendre. Le condamné peut être puni de la peine de mort, de la flagellation ou de l'amputation. La composition des tribunaux, le nombre des juges religieux et les normes juridiques appliquées ne font pas l'objet d'une réglementation uniforme.

11.3. Tribunaux extraordinaires

Voir 11.2.

11.4. Tribunaux militaires

Voir 11.2.

12. Organes de sécurité et forces armées

12.1. Armée

L'armée nationale a été dissoute lors de l'effondrement du régime communiste. Une partie des généraux a quitté le pays. Les autres ont réorganisé les structures de l'armée dissoute en formant, selon des critères ethniques ou politiques, des groupes de combattants et en les amenant sous le contrôle des Moudjahidins au pouvoir. La seule division de l'ancienne armée qui est encore intacte est celle du général Babajan. Elle est située au Nord de Kaboul. Aucun des gouvernements provisoires en place à Kaboul n'est jusqu'ici parvenu à créer une nouvelle armée nationale. Dirigeants et commandants des différentes zones disposent tous de leurs propres troupes.

12.2. Police et gendarmerie

Faute de pouvoir politique central effectif, aucune police nationale n'a pu jusqu'à présent être instituée. Dans les différentes régions, les dirigeants disposent, en règle générale, de leurs propres services d'ordre.

12.3. Milices

Voir chapitre 15.

12.4. Services secrets

L'ancien "Ministère de la Sécurité de l'Etat" fut réorganisé, après l'année 1992, par M. Rabbani et rebaptisé "Ministère de la Sécurité nationale"; ce dernier est rattaché au bureau du président. Dans la plupart des autres zones, les dirigeants disposent de leurs propres services de sécurité. On présume que certains membres de l'ancien service secret KHAD sont aujourd'hui au service des différents partis politiques et groupes armés.

13. Détention et exécution pénale

Depuis la prise du pouvoir par les Moudjahidins, les informations concernant l'incarcération et l'exécution des peines sont rares, les organisations internationales n'ayant qu'un accès très limité aux prisons et aux camps de détention; il est par ailleurs quasiment impossible d'obtenir des renseignements par le biais d'autres sources. Des prisons officielles existeraient en tout cas à Kaboul, Mazar-e Sharif, Djalalabad et Herat, ainsi probablement qu'à Kandahar. A de rares exceptions près, les conditions de détention y seraient mauvaises, voire contraires à la dignité humaine. En outre, tous les groupes armés entretiennent - souvent secrètement - des camps de détention, dans lesquels des personnes sont incarcérées en raison de leurs convictions politiques ou de leur appartenance ethnique ou religieuse. Les violations des droits de l'homme, telles que la torture ou la privation de nourriture jusqu'à ce que mort s'ensuive, semblent y être courantes.

14. Situation générale des droits de l'homme

Lors de son entrée en fonction en avril 1992, le Président intérimaire, M. Mujaddidi, a décrété une amnistie générale pour tous les membres de l'ancien Régime et de l'armée. 6'000 prisonniers, dont 4'000 détenus politiques, ont été libérés. Cependant, cette amnistie n'a pas empêché les membres des différentes milices et groupes de Moudjahidins de liquider des fonctionnaires de l'ancien gouvernement, ainsi que des agents des services secrets. Des actes de torture, de mauvais traitements, ainsi que des exécutions arbitraires ont été perpétrés. Bien que ces actes de vengeance aient été condamnés officiellement, il n'est pas exclu de supposer qu'ils aient été ordonnés par certains membres du gouvernement. Le nouveau gouvernement a pris des mesures qui ont eu pour conséquence une réduction de la liberté d'expression, de la liberté de religion et d'association. En juin 1992, tous les partis non islamistes ont été interdits et tous les livres antireligieux ont été saisis. Les droits que les femmes possédaient sous le régime communiste leur ont été retirés et le principe de l'égalité des sexes, qui était inscrit dans la première constitution, a été abrogé. Les tribunaux islamiques ont été pleinement autorisés à prononcer des peines, telles que la peine de mort et l'amputation.

15. Mouvements politiques et religieux

Avant la prise du pouvoir par les Moudjahidins en avril 1992, le pays était contrôlé par différentes forces politico-militaires: le régime de M. Najibullah représenté par le parti gouvernemental communiste Hezb-e Watan (parti de la patrie), les sept partis en exil dans le Peshawar pakistanais (aussi appelé alliance des Sept ou Groupe de Peshawar) qui entretenaient entre eux des relations conflictuelles, différents groupes chiites proiraniens et enfin, des douzaines de commandants militaires indépendants à l'intérieur de l'Afghanistan. Après le renversement de M. Najibullah, tous les partis non islamistes ont été interdits. Les mouvements politiques actuels peuvent être divisés en trois groupes: les mouvements sunnites (les fondamentalistes et les traditionalistes), les forces chiites et les milices ouzbeks. A la fin de l'année 1994, un nouveau groupuscule, les Talibans, est entré en jeu dans la guerre civile afghane.

15.1. Les sunnites

Les fondamentalistes

Hezb-e Islami Afghanistan (Parti islamique d'Afghanistan). Ce mouvement est dirigé par M. Gulbuddin Hekmatyar (un Pachtun de Imam Saheb, province de Kunduz). Il est un des groupes fondamentalistes les plus radicaux d'Afghanistan. Au début de l'année 1994, M. Hekmatyar conclut une alliance avec son ancien ennemi juré, M. Dostum. Le Hezb-e Islami est aujourd'hui représenté au sein du Conseil de coordination, le "Supreme Coordination Council of the Islamic Revolution of Afghanistan", une alliance formée contre M. Rabbani, dont font également partie le Jabhah-e Nejat-e Melli Mujaddidis, le Hezb-e Wahdat Khalilis, ainsi que les forces armées de M. Dostum. Au mois de mars 1995, M. Hekmatyar, chassé par les Talibans de son quartier général, situé à Charasyab, se réfugia à Sarobi, à quelque 60 kilomètres à l'est de Kaboul. Hezb-e Islami Afghanistan No 2. Le Hezb-e Islami Afghanistan No 2 s'est séparé en 1979 du Hezb-e Islami de M. Hekmatyar. Il est dirigé par le religieux Yunis Khali. Ce mouvement représente l'aile conservatrice de l'Islam; il exige la sauvegarde du système social traditionnel et pense que les élections parlementaires sont anti-islamiques. Le parti est essentiellement formé de Pachtuns. Avec ses sept députés, il constitue le groupe le plus fort au sein du Conseil de Nangarhar, composé de 52 membres, dont le président, M. Hadji Qadir, fait également partie du groupe de M. Khalis. Jamiat-e Islami (Communauté respectivement Société islamique). Le Jamiat-e Islami, dont le dirigeant est l'actuel chef d'Etat M. Burhanuddin Rabbani, est dirigé militairement par le Tadjik Ahmed Shah Massoud qui, jusqu'en mai 1993, était ministre de la défense. Contrairement à M. Hekmatyar, MM. Rabbani et Massoud aspirent à fonder une république islamique, en collaboration avec toutes les forces du pays, y compris celles des chefs combattants et des chiites. Le Jamiat-e Islami s'est séparé du Hezb-e Islami en 1978. Ittehad-e Islami Afghanistan (Parti de l'Unité islamique). Certes, le Ittehad-e Islami Afghanistan, dirigé par le Pachtun Abdulrasul Sayyaf, compte peu de sympathisants, mais il se porte bien financièrement, grâce à ses relations avec l'Arabie Saoudite. M. Abdulrasul Sayyaf, tout comme MM. Gulbuddin Hekmatyar et Yunis Khalis, refuse catégoriquement la reconnaissance politique des minorités, telles que, par exemple, les chiites. L'Ittehad aspire à la constitution d'un Etat islamique, basé sur le Wahabbisme d'Arabie Saoudite. M. Sayyaf est un allié de M. Rabbani.

Les traditionalistes

Harakat-e-Ingelab-e Islami Afghanistan, (Mouvement révolutionnaire islamique d'Afghanistan). Dirigée par M. Mohammad Nabi Mohammadi, cette organisation est formée de Pachtuns provenant des classes sociales supérieures; elle a une tendance fondamentaliste modérée et est orientée vers l'Occident. M. Mohammadi est, depuis le mois d'août 1992, vice-président d'Afghanistan. Jabhah-e Nejat-e Melli Afghanistan (Front national de libération de l'Afghanistan). Ce mouvement est dirigé par le Pachtun Sibghatullah Mujaddidi, intellectuel islamiste libéral. Le front comprend peu de combattants mais beaucoup de sympathisants. Suite au renversement de M. Najibullah, M. Mujaddidi occupa deux mois durant le poste de président intérimaire d'Afghanistan. Le Jabhah-e Nejat-e Melli est aujourd'hui représenté au sein de l'alliance formée contre M. Rabbani, le "Supreme Coordination Council of the Islamic Revolution of Afghanistan". Mahaz-e Melli-e Islami (Front national islamique d'Afghanistan). Il a été fondé par Pir Sajed Ahmed Gailani. Ce parti est soutenu par des nationalistes cultivés, des musulmans modérés, ainsi que par des clans dans les provinces de Nangarhar, Paktia et Kandahar et prône le retour de l'ancien roi Zahir Shah. Pir Sajed Ahmed Gailani étant considéré comme le supérieur de l'ordre Sufi-Qadiriyyah et vénéré comme un saint, il jouit d'une influence surtout politique. L'influence militaire exercée par son parti, par contre, est faible: ce dernier ne règne effectivement sur aucune région.

15.2. Les chiites

Hezb-e Wahdat (Parti unitaire islamique d'Afghanistan). Le Hezb-e Wahdat, parti chiite proiranien qui constitue le groupe le plus important de Hazaradjat, est divisé, depuis le mois de septembre 1994, en deux factions rivales: celle de M. Abdul Ali Mazari est, depuis la mort de ce dernier au mois de mars 1995, dirigée provisoirement par M. Karim Khalili et représentée au sein de l'alliance formée contre M. Rabbani, le "Supreme Coordination Council of the Islamic Revolution of Afghanistan"; l'autre est menée par M. Mohammad Akbari, qui a quitté les rangs de M. Mazari au mois de septembre 1994 pour rejoindre ceux de M. Rabbani. Harakat-e Islami Afghanistan (Mouvement islamique d'Afghanistan). Le Harakat-e Islami Afghanistan, parti chiite dirigé par l'Ayatollah Asef Mohseni et allié de M. Rabbani, est traditionnellement soutenu dans les villes. En été 1994, de violents combats ont éclaté à Kaboul entre le Harakat et le Hezb-e Wahdat en vue du contrôle des quartiers et des banlieues du sud-ouest de la capitale.

15.3. Les milices

Djonbech-e Melli (Mouvement national islamique d'Afghanistan). L'organisation qui chapeaute les forces politiques et militaires du Nord du pays est la Djonbech-e Melli du général Abdul Rashid Dostom, meneur des tribus ouzbeks, comprenant près de trois millions d'individus dans les provinces du Nord. Ces milices comptent des dizaines de milliers de combattants (les données numériques varient entre 15'000 et 160'000 hommes). Elles ont la réputation d'être les mieux équipées d'Afghanistan. M. Dostum a conclu, en 1994, une alliance avec M. Hekmatyar et fait partie de celle formée contre M. Rabbani, le "Supreme Coordination Council of the Islamic Revolution of Afghanistan". Les milices talibanes. Au mois d'octobre 1994 est entrée en jeu dans la guerre civile afghane une nouvelle force militaire avec les milices fondamentalistes talibanes, lesquelles contrôlent aujourd'hui plus de la moitié du territoire, Herat et Kandahar y compris. Les Talibans sont essentiellement recrutés parmi les étudiants des institutions religieuses d'Afghanistan et du Pakistan, auxquels se joignent des membres des anciennes forces armées afghanes, de clans pachtuns, de différents groupes moudjahidins, ainsi que des commandants insatisfaits. Les Talibans n'ont encore jusqu'ici conclu aucune alliance militaire avec d'autres groupuscules.
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