(Gabor) Winter.

REQUÊTE de M. (Gabor) Winter, demeurant à Amberg, République fédérale d'Allemagne tendant à l'annulation du décret du 25 janvier 1979 qui a prononcé son extradition:

Vu la loi du 10 mars 1927; la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés ensemble le protocole relatif au statut des réfugiés du 31 janvier 1967; la Convention franco-allemande d'extradition du 29 novembre 1951; la Constitution du 4 octobre 1958; le code pénal; le code de procédure pénale; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953; la loi du 30 décembre 1977;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 6 paragraphe 3 de la Convention européenne des droits de l'homme par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris: -

CONSIDÉRANT qu'aux termes de l'article 6, paragraphe 3, de la Convention européenne des droits de l'homme «tout accusé a droit notamment à: a) être informé, dans le plus court délai, dans «une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de «l'accusation portée contre lui; c) se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de «son choix…»;

Cons., d'une part, qu'il résulte des pièces du dossier que lors de l'examen de son cas par la chambre d'accusation M. Gavor Winter était accompagné de son avocat et d'un interprète; que le rapport le concernant a été énoncé phrase par phrase afin de permettre sa traduction immédiate; que l'interprète est resté à sa disposition pendant toute la durée de l'audience et pendant la suspension sollicitée par le requérant; que celui-ci n'est dès lors fondé à soutenir que les prescriptions de la Convention européenne des droits de l'homme n'ont pas été respectées;

Cons., d'autre part, que si M. Winter n'a pu être assisté par l'avocat allemand dont il avait sollicité le concours, ce dernier ayant invoqué des dispositions de la loi allemande qui interdisent à un avocat de prendre la défense de plusieurs co-inculpés dans la même affaire, cette circonstance ne saurait être invoquée à l'encontre des autorités françaises qui n'ont en aucune façon fait obstacle au libre choix du défenseur;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 3, alinéa 1er, de la Convention franco-allemande d'extradition du 29 novembre 1951: - Cons. qu'il résulte tant des principes généraux du droit français en matière d'extradition que de la Convention franco-allemande du 29 novembre 1951 que, sauf erreur évidente, il n'appartient pas aux autorités françaises, lorsqu'elles se prononcent sur une demande d'extradition, de connaître de la réalité des charges pesant sur la personne réclamée ou ayant entraîné sa condamnation;

Cons, qu'aux termes de l'article 3, alinéa 1er, de la Convention franco-allemande: «Seront sujets «à extradition: 2° les individus qui sont poursuivis pour des crimes ou délits punis par les lois des «parties contractantes d'une peine d'au moins un an d'emprisonnement»;

Cons, qu'il est reproché à M. Winter d'avoir constitué avec des complices une «association de malfaiteurs», infraction prévue par l'article 129 du code de procédure pénale allemand; que le requérant soutient que les faits articulés ne sont pas constitutifs d'un crime ou d'un délit puni par la loi française;

Cons. qu'aux termes de l'article 265 du code pénal «toutes associations… établies «dans le but «de préparer ou de commettre des crimes contre les personnes et les propriétés constituent un «crime contre la paix publique»; que la demande d'extradition retient contre M. Winter le fait d'avoir créé au printemps 1976 avec 3 complices une association dénommée «Secours noir de Nuremberg» à l'image des «Conseils de détenus» existants dans plusieurs villes allemandes, ceci en vue, selon l'exemple de la «Fraction armée rouge», de combattre l'Etat en soutenant tous ceux qui veulent l'anéantissement de la société existante; que pour parvenir à ce but, ce groupe aurait envisagé de recourir aux procédés de la guérilla urbaine, à savoir confection d'explosifs, acquisitions d'armes à feu, opérations permettant de se procurer des fonds par des vols à main armée, menaces de meurtre etc…; que si aucun de ces projets n'a été mis à exécution, il a été trouvé au domicile et dans le véhicule du requérant des notes précisant les procédés à utiliser tant pour se procurer les armes pour en apprendre le maniement ou pour confectionner des explosifs; qu'une feuille volante également trouvée fait état d'un projet d'opération contre un magasin dans la ville de Furth; qu'ont été encore découverts de possibles constituants d'un mélange explosif et une carte d'identité dérobée; que ces divers éléments établissent l'existence d'une activité constitutive d'une association de malfaiteurs au sens de l'article 265 du code pénal et que doit donc être écarté le moyen tiré de ce que la condition posée à l'article 3, paragraphe 1er, de la Convention d'une double incrimination au regard des lois pénales des deux pays ne serait pas remplie;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 4 de la Convention franco-allemande d'extradition du 29 novembre 1951: - Cons. qu'aux termes de l'article 4 de la Convention «l'extradition ne sera pas accordée si l'infraction pour laquelle elle est «demandée est considérée par la partie requise, «d'après les circonstances dans lesquelles elle aura été commise, comme une infraction «politique ou comme un fait commis pour préparer une telle infraction, l'exécuter, en assurer le «profit, en procurer l'impunité, ou commis en vue de s'opposer à l'accomplissement d'une «infraction politique»;

Cons. que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il est reproché à M. Winter d'avoir constitué une association de malfaiteurs qui se serait proposé de commettre des agressions contre les personnes et les biens; que la circonstance que ces actes, qui ne sont pas politiques par leur objet, auraient eu pour but, selon le mandat d'arrêt, de «promouvoir la révolution» et de «supprimer par la violence l'ordre établi en République fédérale allemande», ne suffit pas, compte tenu de leur gravité, et alors même que les agressions projetées n'ont pas été exécutées, à les faire regarder comme ayant un caractère politique; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article 4 de la convention faisaient obstacle à ce que son extradition soit prononcée;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 5-2° de la loi du 10 mars 1927: - Cons. que, aux termes de l'article 1er de la Convention franco-allemande d'extradition, «les parties «contractantes s'engagent réciproquement à se livrer, selon les règles et sous les conditions «déterminées par les articles suivants, les individus qui sont poursuivis… par les autorités «judiciaires de l'Etat requérant»; qu'il résulte clairement de cette disposition qu'elle ne permet pas au Gouvernement français de subordonner l'extradition à des conditions autres que celles qui sont prévues par la Convention; que si l'article 1er de la loi du 10 mars 1927 dispose que cette loi s'applique aux situations non réglementées par les traités, cette disposition, qui d'ailleurs ne contredit pas celles de la convention, ne saurait prévaloir sur elles; que celles-ci sont plus récentes et ont, en vertu de l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, une autorité supérieure à celle de la loi; que, dès lors, M. Winter n'est pas fondé à se prévaloir de l'article 5, 2° de la même loi du 10 mars 1927 pour soutenir que le Gouvernement français ne pouvait légalement accorder son extradition aux autorités fédérales allemandes…;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés: - Cons. que, en vertu des dispositions du paragraphe A-2 de l'article 1er de la Convention de Genève sur le statut des réfugiés et du paragraphe 2 de l'article 1er du protocole du 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés, le terme «réfugié» s'appliquera à toute personne… qui craignant avec «raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa «nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques… se «trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut «se réclamer de la protection de ce pays»;

Con. que si M. Winter s'est trouvé hors du territoire de la République fédérale d'Allemagne, pays dont il a la nationalité, il ne résulte pas des pièces versées au dossier qu'il n'ait pu se prévaloir de la protection de ce pays au sens de la Convention de Genève ou n'ait pas voulu, en raison des craintes de persécution qu'il aurait éprouvées «avec raison», se réclamer de cette protection; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à prétendre à la qualité de réfugié telle que la définit la même Convention;… (rejet).

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