AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COMMISSION DES RECOURS DES REFUGIES

demeurant:

4 rue de la Croix du Val

 

92190 MEUDON

ledit recours

enregistré le 13 mai 1993

au secrétariat de la Commission des Recours des Réfugiés et tendant à l'annulation de la décision par laquelle le directeur de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (O.F.P.R.A)

a rejeté le 14 avril 1993 sa demande d'admission au statut de réfugiée;

Par les moyens suivants:

La requérante a été arrêtée le 26 août 1990 à proximité du siège du Parti socialiste bulgare qui venait d'être incendié par des manifestants anticommunistes; conduite au commissariat, elle a été longuement interrogée et appelée à témoigner par écrit; reconvoquée pour le lendemain, elle s'est vu poser les mêmes questions; lors de nouvelles convocations en mars et avril 1991, elle a refusé d'identifier des manifestants sur des films et des photographies qui lui étaient présentés; elle a été contrainte d'abandonner ses études en raison de pressions policières; après avoir refusé en juin 1991 de signer des documents vierges ou prérédigés, elle a été licenciée de son emploi; à la suite d'un nouveau refus de fournir un faux témoignage, elle a dû aller reprendre au commissariat sa fille âgée de trois ans, que la police était allée chercher à la crèche; à cette occasion, elle a accepté de signer les documents qui lui étaient présentés par crainte pour la sécurité de son enfant; en mars 1992, elle a découvert lors d'une émission télévisée qu'elle était citée comme témoin dans le cadre du procès des incendiaires; ayant reçu des menaces sur sa vie si elle ne confirmait pas devant le tribunal la véracité des témoignages qui lui avaient été extorqués, elle s'est résolue à fuir son pays;

Vu la décision attaquée;

Vu, enregistrée comme ci-dessus le 27 mai 1993,

la demande d'admission au statut de réfugiée présentée par l'intéressée au directeur de l'O.F.P.R.A. et communiquée par celui-ci sans observations;

Considérant que les pièces du dossier et les déclarations faites en séance publique devant la Commission permettent de tenir pour établi que Mle Tzetka DELTCHEVA, qui est de nationalité bulgare, a subi, de la part des autorités, des persécutions en raison de son refus de fournir de faux témoignages au sujet de l'incendie du siège du Parti socialiste bulgare par des manifestants anticommunistes le 26 août 1990; qu'en raison de pressions policières constantes, elle a dû interrompre ses études et a été licenciée de son emploi; qu'elle a reçu des menaces touchant tant à la sécurité de sa fille, âgée de trois ans, qu'à sa propre vie; qu'ainsi, en dépit des changements politiques intervenus en Bulgarie, elle peut à bon droit se prévaloir, dans les circonstances particulières de l'espèce, du bénéfice des stipulations de la Convention de Genève; que, dès lors, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le directeur de l'O.F.P.R.A. a rejeté sa demande d'admission au statut de réfugiée;

DECIDE

ARTICLE 1er : La décision du directeur de l'O.F.P.R.A. en date du 14 avril 1993 est annulée.

ARTICLE 2 : La qualité de réfugiée est reconnue à Mme DELTCHEVA Tzetzka

ARTICLE 3 : La présente décision sera notifiée à Mme DELTCHEVA Tzetzka et au directeur de l'O.F.P.R.A.

Délibéré dans la séance du 29 octobre 1993 où siégeaient:

M. de BRESSON, Président de la Commission des Recours des Réfugiés, Président;

M. BOUGON, Conseiller Maître Honoraire à la Cour des Comptes;

M. RAVANEL, Conseiller d'Etat Honoraire;

MM. ALLAND, CHAMBAULT, Mme LANXADE, Représentants du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

MM. DELOCHE de NOYELLE, GAUDIN-CAGNAC, COURSAUT-DURAND, Représentants du Conseil de l'O.F.P.R.A.

Lu en séance publique le 24 novembre 1993

Le Président: J.J. de BRESSON

Le Secrétaire Général de la Commission des Recours des Réfugiés: R. COLLIER

POUR EXPEDITION CONFORME: R. COLLIER

La présente décision n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat qui, pour être recevable, doit être présenté par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la cour de Cassation. Il doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Aucune autre voie de recours n'est ouverte contre les décisions de la Commission des Recours des Réfugiés.

Disclaimer:

This is not a UNHCR publication. UNHCR is not responsible for, nor does it necessarily endorse, its content. Any views expressed are solely those of the author or publisher and do not necessarily reflect those of UNHCR, the United Nations or its Member States.