Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Bahreïn

Contexte politique

Suite aux améliorations en matière des droits de l'Homme qu'a connues le Bahreïn en 2002, année marquée par la libération de tous les prisonniers politiques et la reconnaissance du droit de vote des femmes, les appels de la société civile au cours de l'année 2007 pour la poursuite des réformes sont demeurés vains. Ainsi, les partis politiques demeurent illégaux au Bahreïn. En conséquence, des "groupes" politiques, puissants et bien organisés, sont apparus comme des substituts aux partis et sont autorisés à participer aux élections. En outre, la frontière entre les associations politiques et les associations de défense des droits de l'Homme est parfois ténue, dans la mesure où l'interdiction de créer des partis politiques conduit certains leaders politiques à intervenir dans le cadre d'associations de défense des droits de l'Homme. Une reconnaissance pleine et entière des partis devrait permettre de surmonter cette ambivalence.

L'ouverture relative, rendue possible par une modification de la Constitution et de la loi électorale en 2002, a permis aux partis islamistes chiites et sunnites de remporter des sièges au Parlement. Cependant, les amendements apportés à la Constitution et la nouvelle loi électorale – qui viseraient à diluer le poids du vote chiite et de l'opposition – restent fortement contestés.

Bien que la Constitution de 2002 prévoit l'indépendance du pouvoir judiciaire, en pratique le pouvoir exécutif continue d'exercer des pressions importantes sur le judiciaire. De surcroît, l'annonce de la création d'une institution nationale indépendante de promotion et de protection des droits de l'Homme en novembre 2007, qui a notamment pour objectif d'accompagner le Gouvernement dans la mise en place de politiques en matière de droits de l'Homme, n'a toujours pas conduit à une amélioration des conditions dans lesquelles les défenseurs des droits de l'Homme exercent leurs activités. Ainsi, l'exercice des libertés d'association, d'expression, de réunion et de rassemblement pacifique reste sévèrement restreint.

Refus d'enregistrer des organisations indépendantes de défense de droits de l'Homme

La Loi n° 21 sur les associations de 1989 prévoit que toute organisation de la société civile doit être soumise à l'approbation du ministère des Affaires sociales, et interdit aux associations de s'impliquer dans la politique. Elle prévoit également un large spectre d'interférence gouvernementale dans leurs activités, tel que le contrôle de leurs finances. En 2007, le ministère des Affaires sociales a rédigé une nouvelle loi sur les organisations de la société civile qui, fin 2007, n'avait pas encore été transmise au Conseil de la Shura et à la Chambre basse (les deux assemblées parlementaires). Si elle comporte des améliorations par rapport à la loi existante, plusieurs articles sont également contraires aux normes internationales. Le Ministre des Affaires sociales conservera par exemple le pouvoir de fermer administrativement toute organisation pour une durée allant jusqu'à 60 jours, sans obligation de motivation.

Par ailleurs, plusieurs ONG continuent de se heurter au refus des autorités d'être enregistrées. Ainsi, le Centre bahreïni des droits de l'Homme (Bahrain Center for Human Rights – BCHR) n'a toujours pas pu obtenir son réenregistrement en 2007, et demeure fermé depuis 2004. D'autres groupes, comme le Comité des chômeurs et des mal payés (Unemployed and Underpaid Committee – UUC) et la Société des jeunes bahreïnis pour les droits de l'Homme (Bahrain Youth Human Rights Society – BYHRS), attendent depuis 2005 l'autorisation d'enregistrement du ministère des Affaires sociales. Dans ce contexte, M. Mohammed Al-Maskati, directeur de la BYHRS, a été accusé en novembre 2007 d'avoir "fait fonctionner une association non enregistrée avant notification de la déclaration d'enregistrement". Le procès de M. Al-Maskati a été ajourné au 21 janvier 2008. Quelques jours avant son arrestation, les membres de la BYHRS avaient reçu une notification du ministère des Affaires sociales, leur demandant de mettre fin à leurs activités sous peine de poursuites.

Actes de harcèlement à l'encontre des défenseurs des droits de l'Homme

En 2007, plusieurs défenseurs des droits de l'Homme ont été accusés de menacer la sécurité nationale, et les actes de harcèlement judiciaire et les poursuites abusives ont continué. Par ailleurs, certains défenseurs ont été victimes d'attaques physiques et d'enlèvements vers des lieux inconnus, où ils ont été frappés et arbitrairement détenus. Des militants d'associations indépendantes et leurs familles ont en outre été surveillés et soumis de façon répétée à des visites à leur domicile. Ils ont été harcelés par téléphone et par courriels, comme par exemple M. Nabeel Rajab, vice-président du BCHR, à partir du 1er juillet 2007. Leurs moyens de communication sont également sous surveillance, et leur équipement et leurs documents sont régulièrement endommagés ou confisqués. D'autre part, ils se heurtent parfois à des obstacles lorsqu'ils souhaitent communiquer avec leurs partenaires internationaux.

Répression brutale d'une manifestation pacifique débouchant sur des arrestations arbitraires de militants des droits de l'Homme

Le 17 décembre 2007, au cours d'une manifestation pacifique commémorant les victimes des violations des droits de l'Homme du passé, M. Ali Jessim Meki, un défenseur des droits de l'Homme proche du mouvement Al-Haq pour les libertés et la démocratie, aurait été attaqué par les forces spéciales de sécurité alors qu'il manifestait pacifiquement. Il est décédé peu après être rentré chez lui. Des émeutes ont suivi la mort du jeune homme. Les autorités semblent alors avoir profité de cette agitation pour mener, entre le 21 et le 28 décembre 2007, une grande campagne d'arrestation d'une soixantaine de militants, y compris des défenseurs des droits de l'Homme membres de la BYHRS et du UUC qui n'avaient participé ni à la manifestation du 17 décembre ni aux émeutes qui ont suivi, mais qui avait participé à diverses manifestations publiques ces dernières années pour réclamer le respect des droits économiques et sociaux, et contester des restrictions aux libertés fondamentales. Les forces spéciales de sécurité ont pénétré de force au sein des domiciles des militants, menacé leurs familles et confisqué leurs ordinateurs. Ces défenseurs ont été soumis à des détentions au secret, leurs avocats n'ont pas pu assister aux interrogatoires, et ils ont subi des mauvais traitements et des actes de torture. Fin 2007, dix d'entre eux restaient détenus.

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).

Disclaimer:

This is not a UNHCR publication. UNHCR is not responsible for, nor does it necessarily endorse, its content. Any views expressed are solely those of the author or publisher and do not necessarily reflect those of UNHCR, the United Nations or its Member States.