Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - République Centrafricaine

Contexte politique

En 2007, les conditions de sécurité dans la capitale Bangui se sont stabilisées, notamment grâce à la présence de la Force multinationale en Centrafrique (FOMUC) de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) et du détachement français "Boali". Cependant, la situation s'est détériorée dans le nord-ouest du pays, où des mouvements de rébellion armés se sont confrontés aux forces gouvernementales du Général François Bozizé, exposant les populations civiles à de multiples exactions. Echappant au contrôle des forces de sécurité du Gouvernement, et exposée au grand banditisme et aux coupeurs de route, cette région a en effet vu arriver les anciens membres de la garde présidentielle de l'ancien Président Patassé, déçus de l'exclusion de celui-ci du processus électoral, qui ont rejoint l'Armée populaire pour la restauration de la République et la démocratie (APRD).

Dans la région dite "des trois frontières" (Tchad, Soudan et République centrafricaine), au nord-est, les forces de sécurité du Gouvernement ont continué de s'opposer aux rebelles du Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC) et de l'Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR). Après avoir pris le contrôle de la région en novembre 2006, ces derniers ont été repoussés par les forces armées centrafricaines, soutenues par l'armée française.

En vertu des accords entre le Gouvernement et les rebelles signés en février 2007 à Syrte et à Birao en avril 2007, le Président a nommé deux chefs rebelles – MM. Zakaria Damane et Abdoulaye Miskine – conseillers à la présidence, ce dernier étant pourtant l'auteur présumé de crimes internationaux perpétrés en 2002 pouvant relever de la compétence de la Cour pénale internationale. Le 22 mai 2007, le procureur de la CPI a en effet annoncé l'ouverture d'une enquête sur les crimes graves commis en République centrafricaine (RCA) entre 2002 et 2003, notamment des violences sexuelles à large échelle.

En outre, signe de la crispation des autorités, en mai 2007, le Ministre d'État chargé de la Communication et de la réconciliation nationale a été limogé suite à la projection du film sur l'assassinat du capitaine burkinabè Thomas Sankara, projeté à l'Assemblée nationale dans le cadre du festival international du film des droits de l'Homme, sous le prétexte que le film pouvait être dommageable à la relation du pays avec le Burkina Faso.

Le 25 septembre 2007, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté la résolution 1778 autorisant la création de la Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad dans le cadre d'une opération multidimensionnelle destinée à restaurer les conditions de sécurité nécessaires au retour volontaire et durable des réfugiés et personnes déplacées par les conflits dans cette région.1 Cette mission est complétée par une force de l'Union européenne, l'EUFOR Tchad/RCA, qui a pour mission de contribuer à la protection des civils en dangers, en particulier les réfugiés et les personnes déplacées, de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire en améliorant la sécurité dans la zone d'opérations, et de contribuer à la protection du personnel et des infrastructures des Nations unies. Son déploiement devrait commencer en février 2008.

Menaces contre les défenseurs des victimes de crimes internationaux

De manière générale, les défenseurs des droits de l'Homme, du fait de leur travail de dénonciation des violations, sont soumis aux pressions et à des actes de harcèlement et d'intimidation de la part du pouvoir en place qui, pour les dénigrer, les assimilent à des opposants politiques. Plus particulièrement, celles et ceux qui défendent le droit des victimes de crimes internationaux commis en RCA depuis 2002 et veulent donner une place aux victimes dans le dialogue politique ont été exposés à de graves menaces qui ont également touché leurs familles. Les défenseurs sont également accusés de ternir l'image du pays à l'étranger en divulguant des informations sur les violations des droits de l'Homme. La présidente de l'Organisation pour la compassion et le développement des familles en détresse (OCODEFAD), Mme Bernadette Sayo, a ainsi été contrainte à l'exil en début d'année. En effet, le 1er février 2007, des inconnus en civil l'ont accostée dans la rue et l'ont menacée de la tuer, ainsi que Me Nganatouwa Goungaye Wanfiyo, avocat et président de la Ligue centrafricaine des droits de l'Homme. De même, Me Matthias Morouba, qui défend de nombreux défenseurs ainsi que des victimes de violations des droits de l'Homme, a subi toutes sortes de pressions tout au long de l'année, en particulier des appels téléphoniques le menaçant et lui demandant de se retirer de certains dossiers. Des menaces ont également été proférées à l'encontre de membres de sa famille. Me Morouba a notamment été accusé de défendre ses clients "contre le pouvoir".

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).


1 Cette mission est le pendant de la MINUAD, mission hybride des Nations unies et de l'Union africaine au Darfour (Soudan).

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