COMMISSION EUROPEENNE DE DROITS D'HOMME

SUR LA RECEVABILITE DE
La requête présentée par ALI contre la SUISSE (No.: 24881/94)

REF. NO:

ORIGIN: COMMISSION (Deuxième Chambre)

TYPE: DECISION (Finale)

PUBLICATION:

TITLE: ALI contre la SUISSE

APPLICATION NO.: 24881/94

NATIONALITY: Somalienne

REPRESENTED BY: MONFERINI, René, avocat, Fribourg

RESPONDENT: Suisse

DATE OF INTRODUCTION: 19940914

DATE OF DECISION: 19960228

APPLICABILITY:

CONCLUSION: Partiellement irrecevable ; Partiellement recevable

ARTICLES: 5-1-f

RULES OF PROCEDURE:

LAW AT ISSUE:

STRASBOURG CASE-LAW:

Cour Eur. D.H. Arrêt Guzzardi du 6 novembre 1980, série A n° 39, pp. 25-27, par. 71-72

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête N° 24881/94 présentée par Samie ALI contre la Suisse La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 28 février 1996 en présence de MM.H. DANELIUS, Président S. TRECHSEL MmeG.H. THUNE MM.G. JÖRUNDSSON J.-C. SOYER H.G. SCHERMERS F. MARTINEZ L. LOUCAIDES J.-C. GEUS M.A. NOWICKI I. CABRAL BARRETO J. MUCHA D. SVÁBY P. LORENZEN MmeM.-T. SCHOEPFER, Secrétaire de la Chambre ; Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 14 septembre 1994 par Samie ALI contre la Suisse et enregistrée le 3 novembre 1994 sous le N° de dossier 24881/94 ; Vu les rapports prévus à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ; Vu la décision de la Commission, en date, du 17 mai 1995, de communiquer la requête au Gouvernement défendeur quant aux griefs tirés de l'article 5 par. 1 et 2 de la Convention et de la déclarer irrecevable pour le surplus ; Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur le 1er septembre 1995 et les observations en réponse présentées par le requérant le 24 octobre 1995 ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, de nationalité somalienne, né en 1975 à Mogadiscio, séjourne actuellement à Fribourg (Suisse). Devant la Commission, il est représenté par Maître René Monferini, avocat à Fribourg. Les faits de la cause, tels qu'il ont été présentés par les parties, peuvent se résumer comme suit. A.Circonstances particulières de l'affaire Après son entrée en Suisse le 17 novembre 1991, le requérant introduisit le 18 novembre 1991 auprès des autorités administratives une demande d'asile politique. Il bénéficiait déjà d'une autorisation de séjour en Italie, sous le nom de Jean Bourgeois Samawel, ressortissant djiboutien. A partir de juillet 1992, le requérant fit l'objet de plusieurs procédures pénales. Par jugement rendu le 27 août 1992 par la chambre pénale des mineurs du canton de Fribourg, il fut reconnu coupable de vol et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Le 16 mars 1993, il fut condamné par la même autorité pour vol, complicité de faux dans les titres, ivresse au volant, conduite de moto sans permis et contravention à la loi fédérale sur les transports publics. Le 14 juillet 1993, il fut condamné pour avoir passé illégalement la frontière. Par ailleurs, en mars 1993, il se livra à des actes de violence sur une collaboratrice de la Croix-Rouge, qu'il avait insultée et menacée avec un marteau. Les peines infligées furent une amende et/ou un emprisonnement avec sursis. Le 17 août 1993, l'Office fédéral des réfugiés rejeta la demande d'asile politique du requérant et prononça son renvoi de Suisse. Les nombreux délits qu'il avait déjà commis depuis son arrivée en Suisse conduisirent l'autorité administrative à considérer que la primauté de l'intérêt public à une exécution rapide du renvoi avait justifié le retrait de l'effet suspensif à un recours. Le 18 août 1993, la police cantonale des étrangers de Fribourg mit le requérant en détention en vue de son refoulement. Toutefois, faute de documents de voyage, le renvoi étant impossible, le requérant fut relâché le 9 septembre 1993. En septembre 1993, une plainte pénale fut déposée à l'encontre du requérant pour menaces contre deux fonctionnaires de la police des étrangers. Le 28 octobre 1993, la Commission suisse de recours en matière d'asile raya du rôle un recours du requérant contre la décision de refus d'asile et de renvoi, le requérant n'ayant plus de domicile connu. Dès lors, la décision du 17 août 1993 acquit force de chose jugée. Dès novembre 1993, le requérant fit de nouveau l'objet de deux plaintes pénales, l'une pour obtention frauduleuse d'une prestation et l'autre pour menaces. Le 9 décembre 1993, il fut placé en détention provisoire dans la prison centrale de Fribourg. Sa détention aurait dû durer jusqu'au 21 janvier 1994. Le 14 décembre 1993, la police cantonale des étrangers de Fribourg proposa, en application de l'article 14 b) et d) de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE), l'internement du requérant, considérant d'une part que l'expulsion du requérant avait été provisoirement impossible et que sa présence dans les structures d'accueil habituelles n'avait plus été envisageable au vu des risques encourus par les personnes appelées à le côtoyer et relevant d'autre part que le requérant avait mis gravement en danger l'ordre public au vu des nombreuses infractions qu'il avait commises. Le requérant avait été entendu à ce propos, le 13 décembre 1993, lors d'une audition au cours de laquelle il avait déclaré s'opposer à son internement et souhaiter obtenir un délai pour quitter la Suisse. Par décision du 24 décembre 1993, notifiée au requérant le 24 janvier 1994 à la prison centrale, l'Office fédéral des réfugiés ordonna son internement jusqu'au 23 juin 1994, sous réserve d'une levée anticipée, notamment si un document de voyage pouvait être obtenu. L'Office considéra que la succession des délits commis par le requérant depuis son arrivée en Suisse et son comportement en général indiquaient que par sa présence il avait mis gravement en danger l'ordre public. Il releva par ailleurs que le requérant n'avait pas fait valoir d'objection à son internement susceptible d'être retenue et qu'en effet son comportement antérieur avait empêché d'accorder tout crédit à ses déclarations concernant son départ de Suisse de son plein gré. Le 10 février 1994, agissant par la voie du recours de droit administratif, le requérant, sans consulter d'avocat, demanda au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 24 décembre 1993, déclarant vouloir quitter la Suisse au plus tôt. Le 16 février 1994, l'Office fédéral des réfugiés conclut au rejet du recours. Le requérant fut invité à se déterminer au regard de ces conclusions. Le 25 février 1994, l'avocat choisi par le requérant déposa une requête en prolongation de dix jours du délai pour déposer le mémoire. Le 1er mars 1994, le Tribunal fédéral, relevant que dans des affaires de ce genre il devait statuer rapidement, prolongea jusqu'au 8 mars 1994 le délai imparti au requérant pour produire ses conclusions en réponse à celles de l'Office fédéral des réfugiés. Le 8 mars 1994, l'avocat intervint au nom du requérant et déclara que ce dernier renonçait à se déterminer à cet égard. Il déposa en même temps une demande d'assistance judiciaire circonstanciée dans laquelle il fit valoir que l'internement ordonné à l'encontre du requérant n'était pas justifié au sens de l'article 5 par. 1 f) de la Convention, que son droit à s'exprimer oralement devant un tribunal découlant de l'article 5 par. 4 de la Convention avait été violé et que le principe de la publicité des débats garanti par l'article 6 par. 1 de la Convention n'avait pas été respecté. Par arrêt du 14 mars 1994, le Tribunal fédéral rejeta le recours comme étant manifestement mal fondé. Il considéra d'abord que les conditions légales, prescrites par l'article 14 LSEE pour prononcer l'internement du requérant, étaient réunies et que l'internement était justifié au sens de l'article 5 par. 1 f) de la Convention. Il releva en particulier que l'exécution de la décision de renvoi prononcée le 17 août 1993 apparut provisoirement impossible et que le requérant s'était montré incapable de respecter les règles de la vie sociale et de s'adapter à la vie en Suisse à cause de ses difficultés personnelles. Ceci était établi en raison des nombreuses infractions que le requérant avait commises. En ce qui concerne le grief tiré d'une part de la violation du droit à s'exprimer oralement devant le tribunal au sens de l'article 5 par. 4 de la Convention et d'autre part du non-respect du principe de la publicité des débats garanti par l'article 6 de la Convention, le Tribunal releva que : "Les articles 5 par. 4 et 6 CEDH visent tous deux des procédures judiciaires ... L'internement est une mesure administrative ... [Il] ne constitue ainsi pas une sanction, mais une mesure de substitution pour le cas où l'exécution du renvoi n'est momentanément pas possible ... D'ailleurs, le recourant pourrait lui-même mettre fin à son internement de manière prématurée en dévoilant sa véritable identité et en collaborant à la délivrance des papiers nécessaires à son départ. Ainsi, l'internement ne représente pas une sanction pénale, mais une détention administrative aux fins d'expulsion au sens de l'art. 5 par. 1 lettre f CEDH. En l'espèce, il s'agit d'un contrôle judiciaire de la légalité d'une détention au sens de l'art. 5 par. 4 CEDH et non d'un contrôle du bien-fondé d'une accusation en matière pénale. L'art. 6 CEDH n'est donc pas applicable ... Il n'est pas nécessaire que la procédure soit la même dans tous les cas pour lesquels la Convention exige un tribunal ; la procédure de l'art. 5 par. 4 CEDH ne commande en particulier pas le respect des mêmes garanties formelles que la procédure prévue par l'art. 6 par. 1 CEDH ... L'étranger interné peut en tout cas déduire de l'art. 5 par. 4 CEDH le droit d'être entendu. Il peut en outre exiger que la procédure judiciaire se déroule de manière suffisamment contradictoire, ce qui implique notamment le droit de répliquer de manière convenable. En revanche, l'art. 5 par. 4 CEDH ne confère pas de droit inconditionnel à la publicité des débats. Par ailleurs, à la différence du paragraphe 3 de l'art. 5 CEDH ..., le paragraphe 4 ... ne prévoit pas la comparution de l'intéressé à l'audience. En règle générale, il n'est pas non plus nécessaire que l'intéressé puisse s'exprimer oralement devant le tribunal. Le recourant a eu l'occasion de prendre position sur l'internement déjà lors du dépôt de son recours. Par ailleurs, il a eu la possibilité de se déterminer sur la prise de position de l'Office fédéral des réfugiés. Par acte du 8 mars 1994, il a déclaré renoncer à répliquer au motif que la réponse dudit office ne contenait aucun élément nouveau. En revanche, dans sa demande d'assistance judiciaire datée du même jour, il s'est exprimé de manière détaillée sur les conditions juridiques de l'internement. Il n'existe en l'occurrence aucune question de fait ou de droit qui ne puisse être résolue que par l'audition personnelle du recourant. La présente procédure a donc été aménagée de manière suffisamment contradictoire. Il n'existe pas davantage de motifs d'ordonner des débats publics. La procédure écrite est donc suffisante en l'espèce. A noter encore ... que le recourant a eu l'occasion de s'exprimer oralement sur son internement devant les autorités cantonales de police des étrangers." Le dispositif de l'arrêt fut notifié au requérant le 15 mars 1994 et les motifs le 16 mai 1994. Par jugement du 24 avril 1994, le juge de police de l'arrondissement de la Sarine condamna le requérant à une peine de quarante-quatre jours d'emprisonnement sans sursis ainsi qu'au paiement d'une amende de 50 FS. pour menaces et infractions à la loi fédérale sur le transport public. Par lettre du 21 juin 1994, le service de la police des étrangers et des passeports communiqua au requérant qu'il serait libéré le 23 juin 1994, en lui rappelant son obligation de "tout mettre en oeuvre en vue de se conformer à la décision fédérale de renvoi de Suisse, qui avait été maintenue" et "que la poursuite de son séjour en Suisse ne pouvait pas être tolérée plus longtemps que nécessaire". B.Droit interne pertinent Loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE) Art. 14 "L'étranger qui a laissé expirer le délai imparti pour son départ ou dont le renvoi ou l'expulsion ne souffre d'aucun retard peut être refoulé sur ordre de l'autorité cantonale compétente. Si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger est exécutoire et s'il y a de fortes présomptions pour que celui-ci entende se soustraire au refoulement, il peut être mis en détention ..." Art. 14a) "Si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée, l'Office fédéral des réfugiés décide d'admettre provisoirement l'étranger ou de l'interner ..." Art. 14b) "L'admission provisoire ou l'internement peuvent être proposés par ... l'autorité cantonale de police des étrangers. L'étranger est entendu avant d'être interné. L'admission provisoire et l'internement doivent être levés lorsque l'exécution est licite, qu'il est possible à l'étranger de se rendre légalement dans un Etat tiers ou de retourner dans son pays d'origine ou dans le pays de sa dernière résidence et qu'on peut raisonnablement l'exiger de lui. Ces mesures prennent fin lorsque l'étranger quitte la Suisse de son plein gré ou obtient une autorisation de séjour ..." Art. 14d) "L'internement peut être prononcé pour une période de six mois. L'Office fédéral des réfugiés peut en prolonger la durée, à chaque fois pour six mois au maximum. La durée de l'internement ne doit toutefois pas excéder deux ans ; à cette échéance, au plus tard, il doit être remplacé par une admission provisoire. L'Office fédéral des réfugiés interne un étranger dans un établissement approprié, s'il a. Compromet la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse ou la sûreté intérieure d'un canton ; b.Met gravement en danger l'ordre public par sa présence ..."

GRIEFS

1.Le requérant se plaint que l'internement prononcé à son encontre par les autorités administratives suisses, en application de l'article 14 LSEE, ne répondait pas aux exigences de l'article 5 par. 1 f) de la Convention. 2.Il fait aussi valoir qu'il n'aurait été informé de la mesure prise à son encontre que le 24 janvier 1994, alors que la décision d'internement avait été prise le 24 décembre 1993. Il invoque à cet égard l'article 6 par. 3 a) de la Convention. 3.Le requérant se plaint également que l'internement constituait une distinction fondée sur l'origine nationale dans la mesure où il ne pouvait être prononcé qu'à l'encontre d'un étranger, au mépris de l'article 14 de la Convention.

PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

La requête a été introduite le 14 septembre 1994 et enregistrée le 3 novembre 1994. Le 17 mai 1995, la Commission a décidé de communiquer la requête au Gouvernement défendeur, en l'invitant à présenter par écrit ses observations sur la recevabilité et le bien-fondé des griefs tirés de l'article 5 par. 1 f) et 2 de la Convention. Le Gouvernement a présenté des observations le 1er septembre 1995 ; le requérant y a répondu le 24 octobre 1995. Le 5 décembre 1995, la Commission a décidé d'accorder au requérant le bénéfice de l'assistance judiciaire.

EN DROIT

1.Le requérant se plaint que l'internement prononcé à son encontre par les autorités administratives, en application de l'article 14 LSEE, ne répondait pas aux exigences de l'article 5 par. 1 f) (art. 5-1-f) de la Convention qui dispose : "1.Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales: (...) f.s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours." Le Gouvernement défendeur plaide à titre principal le nonépuisement des voies de recours internes. Le requérant combat cette thèse. La Commission rappelle que les voies de recours internes sont considérées comme épuisées lorsque le requérant a soumis aux autorités nationales compétentes le grief qu'il fait valoir devant la Commission (cf. mutatis mutandis, Cour eur. D.H., arrêt Guzzardi du 6 novembre 1980, série A n° 39, pp. 25-27, par. 71-72). En l'espèce, il n'est pas douteux que le requérant a soumis ses griefs relevant de l'article 5 (art. 5) de la Convention au Tribunal fédéral qui y a répondu. Dans ces circonstances, la Commission estime que le requérant a satisfait à la condition de l'épuisement des voies de recours internes. L'exception soulevée par le Gouvernement ne saurait dès lors être retenue. Le Gouvernement estime ensuite que ce grief est manifestement mal fondé. Il expose que l'internement du requérant, fondé sur les articles 14a) et 14d) de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE), a été ordonnée "selon les voies légales", ce que le Tribunal fédéral a confirmé dans son arrêt du 14 mars 1994. Le Gouvernement souligne qu'au sens de l'article 14a) LSEE, l'internement est subordonné à la condition que le renvoi ne soit pas possible ou pas licite ou ne puisse être raisonnablement exigé. En outre, il ressort de la jurisprudence du Tribunal fédéral que l'on ne saurait parler de procédure d'expulsion en cours lorsqu'il est établi que l'exécution de la mesure de renvoi n'est guère possible dans un avenir prévisible. Le Gouvernement fait valoir que le fait que le renvoi du requérant n'ait finalement pas pu être effectué ne signifie pas que cette mesure soit apparue impossible déjà au moment où le Tribunal fédéral a rendu son jugement à l'encontre du requérant. A cet égard, il souligne le fait que les autorités suisses ont libéré le requérant aussitôt qu'il leur a semblé qu'une expulsion ne pourrait avoir lieu dans un proche avenir. Le Gouvernement note également que l'internement du requérant avait été motivé par le nombre des délits commis par celui-ci ainsi que par son comportement qui mettait gravement en danger l'ordre public. Le requérant conteste les conclusions du Gouvernement. Il admet que la mesure d'internement dont il a fait l'objet se fonde sur les articles 14 et suivants LSEE, mais il allègue que le texte de ces dispositions n'est pas compatible avec l'article 5 par. 1 f) (art. 5-1-f) de la Convention dans la mesure où il donne la possibilité aux autorités nationales d'interner une personne "si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible". Le requérant estime que dans ces circonstances, un tel internement n'est pas une mesure destinée à faciliter l'expulsion d'un étranger. La Commission estime, à la lumière de sa propre jurisprudence et de celle de la Cour européenne des Droits de l'Homme, que cet aspect de la requête pose de sérieuses questions de fait et de droit qui ne peuvent être résolues à ce stade de l'examen de la requête, mais nécessitent un examen au fond. Dès lors, cette partie de la requête ne saurait être déclarée manifestement mal fondée, en application de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention. La Commission constate en outre que ce grief ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. 2.Le requérant se plaint ensuite qu'il n'aurait été informé de la mesure prise à son encontre que le 24 janvier 1994, alors que la décision d'internement avait été prise le 24 décembre 1993. Il invoque à cet égard l'article 6 par. 3 a) (art. 6-3-a) de la Convention. A titre principal, le Gouvernement soutient que le requérant n'a pas épuisé les voies de recours internes. Il constate que la prétendue violation du droit d'être informé, dans le plus court délai des raisons de son arrestation, n'a jamais été porté par le requérant devant le Tribunal fédéral dans le cadre de son recours de droit public. Le requérant s'oppose à cette thèse. La Commission considère que ce grief relève de l'article 5 par. 2 (art. 5-2) de la Convention. Elle rappelle qu'aux termes de l'article 26 (art. 26) de la Convention, elle ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes, tel qu'il est entendu selon les principes de droit international généralement reconnus et que selon sa jurisprudence constante, les voies de recours internes sont considérées comme épuisées lorsque le requérant a soumis, au moins en substance, aux autorités nationales compétentes le grief qu'il formule devant la Commission (cf. arrêt Guzzardi précité). La Commission constate que ce grief n'a été porté, ni au regard de l'article 6 par. 3 a) (art. 6-3-a) ni au regard de l'article 5 par. 2 (art. 5-2) de la Convention, devant les autorités judiciaires suisses compétentes et notamment, en dernier instance, devant le Tribunal fédéral, alors qu'il était loisible au requérant de le faire. Il s'ensuit que le requérant n'a pas épuisé les voies de recours dont il disposait en droit suisse et que ce grief doit être rejeté, conformément à l'article 27 par. 3 (art. 27-3) de la Convention. 3.Le requérant se plaint encore de ce que l'internement constituait une distinction fondée sur l'origine nationale, en violation de l'article 14 (art. 14) de la Convention, dans la mesure où il ne pouvait être prononcé qu'à l'encontre d'un étranger. La Commission constate que les faits invoqués à l'appui de la violation du principe de non-discrimination sont les mêmes que ceux qui sont à l'origine du grief tiré de la violation de l'article 5 par. 1 (art. 5-1) de la Convention. Dès lors, le grief ne saurait être rejeté en l'état. Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité, DECLARE LE RESTANT DE LA REQUETE IRRECEVABLE pour autant que le requérant se plaint de n'avoir pas été informé dans le plus court délai de la mesure d'internement prise à son encontre, RECEVABLE pour le surplus, tous moyens de fond réservés. Le Secrétaire de la Le Président de la Deuxième Chambre Deuxième Chambre (M.-T. SCHOEPFER) (H. DANELIUS)
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