Suisse: Loi fédérale sur les mesures de contraintes en matière de droit des étrangers du 18 mars 1994

L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse,

vu l'article 69ter de la constitution;

vu le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993[1]

arrête:

I - La loi fédérale du 26 mars 1931[2] sur le séjour et l'établissement des étrangers est modifiée comme suit: 

Art. 13a

Afin d'assurer le déroulement d'une procédure de renvoi, l'autorité cantonale peut ordonner la détention d'un étranger qui ne possède pas d'autorisation régulière de séjour ou d'établissement en détention pour une durée de trois mois cau plus, pendant la préparation de la décision sur son droit de séjour si cette personne:

a. Refuse, lors de la procédure d'asile ou de renvoi, de décliner son identité, qu'elle dépose plusieurs demandes d'asile sous des identités différentes ou qu'à réitérées reprises, elle ne donne pas, sans raisons valables, suite à une convocation;

b. Quitte une région qui lui est assignée ou pénètre dans une zone qui lui est interdite en vertu de l'article 13e;

c. Enfreint une interdiction d'entrée et ne peut être renvoyée immédiatement;

d. Dépose une demande d'asile après une décision d'expulsion administrative entrée en force en vertu de l'article 10, 1er alinéa, lettre a ou b, ou d'une expulsion judiciaire inconditionnelle;

e. Menace sérieusement d'autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et que, pour ce motif, elle fait l'objet d'une poursuite pénale ou a été condamnée.

Art. 13b

1. Si une décision de renvoi ou d'expulsion de première instance a été notifiée, l'autorité cantonale compétente peut, aux fins d'en assurer l'exécution, prendre les mesures ci-après: 

a. Maintenir la personne concernée en détention lorsque celle-ci est détenue en vertu de l'article 13a;

b. La mettre en détention lorsqu'il existe des motifs aux termes de l'article 13a, lettres b, c ou e

c. La mettre en détention lorsque des indices concrets font craindre qu'elle entend se soustraire au refoulement, notamment si son comportement jusqu'alors mène à conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités.

2. La durée de la détention ne peut excéder trois mois; si des obstacles particuliers s'opposent à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion, elle peut, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de six mois au maximum.

3. Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder. 

Art. 13c

1. La détention est ordonnée par l'autorité du canton qui est compétent pour l'exécution du renvoi ou de l'expulsion. 

2. La légalité et l'adéquation de la détention doivent être examinées dans les 96 heures au plus tard par une autorité judiciaire au terme d'une procédure orale.

3. Lorsqu'elle examine la décision de détention, de maintien ou de levée de celle-ci, l'autorité judiciaire tient compte, outre des motifs de détention, en particulier de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention. Il est exclu d'ordonner la mise en détention de phase préparatoire ou en vue du refoulement à l'encontre d'enfants et d'adolescents de moins de quinze ans révolus. 

4. L'étranger en détention peut déposer une demande de levée de détention un mois après que la légalité de cette dernière a été examinée. L'autorité judiciaire se prononce dans un délai de huit jours ouvrables, au terme d'une procédure orale.

Une nouvelle demande de levée de détention peut être présentée après un délai d'un mois si la personne est détenue en vertu de l'article 13a et de deux mois lorsqu'elle est détenue en vertu de l'article 13b.

5. La détention est levée dans les cas suivants:

a. Le motif de la détention n'existe plus ou l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles;

b. La demande de levée de détention est admise;

c. La personne détenue doit subir une peine ou une mesure privative de liberté.

6. L'autorité compétente doit prendre sans retard une décision quant au droit de séjour de l'étranger en détention.

Art. 13d

1. Les cantons veillent à ce qu'une personne désignée par le détenu et se trouvant en Suisse soit prévenue et que l'intéressé puisse s'entretenir et correspondre avec son mandataire. 

2. La détention doit avoir lieu dans des locaux adéquats. Il faut éviter de regrouper les personnes à renvoyer avec des personnes en détention préventive ou purgeant une peine. Les personnes arrêtées doivent pouvoir dans la mesure du possible, s'occuper de manière appropriée. 

Art. 13e

1. L'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger qui n'est pas titulaire d'une autorisation de séjour ou d'établissement et qui trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics, notamment en vue de lutter contre le trafic illégal de stupéfiants, de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée. 

2. La compétence d'ordonner ces mesures incombe au canton qui doit exécuter le renvoi ou l'expulsion. L'interdiction de pénétrer dans une région déterminée peut aussi être prononcée par le canton dans lequel est située cette région.[3] 

3. Ces mesures peuvent faire l'objet d'un recours auprès d'une autorité judiciaire cantonale. Le recours n'a pas d'effet suspensif. 

Art. 14

1. L'autorité cantonale peut refouler dans un Etat désigné par ses soins un étranger lorsque celui-ci: 

a. A laissé expirer le délai imparti pour son départ; 

b. Peut être renvoyé ou expulsé immédiatement; 

c. Se trouve en détention en vertu de l'article 13b et que la décision de renvoi ou d'expulsion est entrée en force . 

2. Si la personne a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs Etats, elle sera refoulée dans le pays de son choix. 

3. Durant une procédure de renvoi ou d'expulsion, l'autorité cantonale peut soumettre à la fouille un étranger et ses biens pour mettre en sûreté des documents de voyage ou d'identité. La fouille ne peut être effectuée que par une personne du même sexe.

4. Si une décision de première instance a été rendue, l'autorité judiciaire peut ordonner la perquisition d'un appartement ou d'autres locaux lorsqu'il est présumé qu'un étranger faisant l'objet d'une décision de renvoi ou d'expulsion s'y trouve caché.

Art. 14a, 1er al.

1. Si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée, l'Office fédéral des refugiés décide d'admettre provisoirement l'étranger.

Art. 14b, 1er et 2e al.

1. L'admission provisoire peut être proposée par l'Office fédéral des étrangers, le Ministère public de la Confédération ou l'autorité cantonale de police des étrangers. 

2. L'admission provisoire doit être levée lorsque l'exécution est licite, qu'il est possible à l'étranger de se rendre légalement dans un Etat tiers ou de retourner dans son pays d'origine ou dans le pays de sa dernière résidence et qu'on peut raisonnablement l'exiger de lui. Cette mesure prend fin lorsque l'étranger quitte la Suisse de son plein gré ou obtient une autorisation de séjour.

Art. 14d

Abrogé

Art. 14e

1. La Confédération peut financer en tout ou en partie la construction et l'installation d'établissements cantonaux de détention affectés exclusivement à l'exécution de la détention de phase préparatoire et de celle en vue du refoulement. Pour la procédure, les dispositions des paragraphes 2 et 5 à 8 de la loi fédérale du 5 octobre 1984 [4] sur les prestations de la Confédération dans le domaine de l'exécution des peines et des mesures s'appliquent par analogie. 

2. La Confédération participe à raison d'un forfait journalier aux frais d'exploitation des cantons pour l'exécution de la détention de phase préparatoire et de celle en vue du refoulement. Le forfait est alloué pour:

a. Les requérants d'asile;

b. Les réfugiés et étrangers dont la détention est en relation avec la levée d'une admission provisoire;

c. Les personnes dont la détention a été ordonnée en relation avec une décision de renvoi de l'Office fédéral des réfugiés;

d. Les réfugiés qui sont expulsés en vertu de l'article 44 de la loi sur 1'asile du 5 octobre 1979.[5]

Art. 15, 4e al., première phrase

4. L'Office fédéral des réfugiés est compétent pour ordonner des mesures d'admission provisoire, à moins que cette tâche n'incombe aux cantons en vertu de la présente loi.... 

Art. 20, al. 1bis

Abrogé 

Art. 23a 

Quiconque n'observe pas les mesures ordonnées en vertu de l'article 13e sera puni d'une peine d'emprisonnement d'un an au plus des arrêts[6], s'il s'avère que l' exécution du renvoi ou de l'expulsion est impossible pour des raisons juridiques ou matérielles. 

Art. 24, 1er al., première phrase

1. La poursuite et le jugement des infractions prévues aux articles 23 et 23a sont du ressort des cantons.... 

II - La loi sur l'asile du 5 octobre 1979[7] est modifiée comme suit: 

Art. 12b titre médian, 1er al., let. b, et 5e al. 

Obligation de collaborer et perquisition

1 Quiconque demande l'asile est tenu de collaborer à la constatation des faits. Le requérant doit en particulier: 

b. Remettre ses documents de voyage et ses pièces d'identité dès son arrivée au centre d'enregistrement; 

5. Si le requérant est hébergé dans un centre d'enregistrement ou dans un logement collectif, l'autorité compétente peut fouiller sa personne et ses biens, afin de mettre en sûreté des documents de voyage, des pièces d'identité ou des objets dangereux. La fouille ne peut être effectuée que par une personne du même sexe. 

Art. 17a, 1er al., let. b et d, ainsi que 2e al. 

1. La décision de renvoi mentionne:

b. La date et l'heure auxquelles le requérant doit avoir quitté le territoire suisse. En cas de décision prévoyant l'admission provisoire, la date est fixée au moment où cette mesure est levée; 

d. Le cas échéant, la désignation des Etats dans lesquels le requérant ne doit pas être renvoyé. 

2. Lorsque des décisions sont prises en vertu de l'article 16, 1er et 2e alinéas, l'exécution immédiate peut être ordonnée. 

Art. 18, 1er à 3e al.

1. Si l'exécution du renvoi n'est pas possible, est illicite ou ne peut pas être raisonnablement exigée, l'office fédéral règle les conditions de résidence conformément aux dispositions légales sur l'admission provisoire des étrangers. 

3. S'il s'avère que le renvoi ne peut pas être exécuté malgré l'usage de moyens de contrainte, le canton demande à l'office fédéral d'ordonner l'admission provisoire.

Art. 47, titre médian, al. 1, 2 et 2bis

Effet suspensif et exécution immédiate

1. Si le renvoi peut être exécuté immédiatement, l'étranger peut déposer dans les 24 heures une demande de restitution de l'effet suspensif. Il doit être informé de ses droits. 

2. L'autorité compétente doit traiter dans les 48 heures les demandes de restitution de l'effet suspensif. 

2bis. Le recourant peut être arrêté pendant une durée maximale de 72 heures par l'autorité compétente jusqu'à ce qu'une décision soit prise au sujet de sa demande. 

III - Dispositions finales

Article premier Exécution

1. Les cantons édictent les dispositions d'introduction nécessaires à l'exécution de la présente loi.

2. Jusqu'à leur promulgation, mais pendant deux ans au maximum, les gouvernements cantonaux sont compétents pour édicter les dispositions nécessaires. 

Art. 2 Dispositions transitoires

Les procédures pendantes au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi sont régies par le nouveau droit. Est toutefois exclue toute décision prévoyant une détention en phase préparatoire, une détention en vue du refoulement ou une fouille sur la base de faits intervenus avant l'entrée en vigueur de la présente loi. 

Art. 3 Référendum et entrée en vigueur

1. La présente loi est sujette au référendum facultatif. 

2. Le Conseil fédéral fixe la date de l'entrée en vigueur. 

Conseil national, 18 mars 1994 

Conseil des Etats, 18 mars 1994

Résultat de la votation populaire et entrée en vigueur 

1. La présente loi a été acceptée par le peuple le 4 décembre 1994 [8]

2. Elle entre en vigueur le 1er février 1995. 

20 janvier 1995 Au nom du Conseil fédéral suisse:

Le président de la Confédération, Villiger

Le chancelier de la Confédération, Couchepin



[1] FF 1994 I 301

[2] RS 142.20

[3] Rectifié par la Commission de rédaction de l'Ass. féd. (art. 33 LREC).

[4] RS 341

[5] RS 142.31

[6] Rectifié par la Commission de rédaction de l'Ass. féd. (art. 33 LREC).

[7] RS 142.31

[8] FF 1995 I 290

Comments:
This law is no longer in force.
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