RAPPORTS SUR LES DROITS DE LA PERSONNE: LES FEMMES EN SOMALIE

 

ACRONYMES

CICR       Comité international de la Croix-Rouge

CSU        Congrès de la Somalie unifiée

FDSS      Front démocratique socialiste somalien

HCR        Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

MNS       Mouvement national somalien

ONUSOM              Opération des Nations Unies en Somalie

PNUD     Programme des Nations Unies pour le développement

SWDO   Somali Women's Democratic Organization

UNITAF                Force d'intervention unifiée en Somalie

USCR     United States Committee on Refugees

1.                INTRODUCTION

La guerre civile qui a commencé en Somalie peu après le renversement de Mohammed Siad Barre en janvier 1991 sévit toujours dans certaines régions, en dépit de l'intervention internationale de 1993. Un représentant de World Vision Australia (une organisation non gouvernementale) a déclaré au cours d'une interview radiophonique en septembre 1993 que, à l'exception de Mogadiscio, le pays avait retrouvé un certain calme (NPR 10 sept. 1993). Selon des articles récemment publiés, la famine semble s'être résorbée, sauf à Mogadiscio, bien que le processus de rétablissement et de reconstruction n'en soit qu'à ses débuts (ibid.; The Ottawa Citizen 13 sept. 1993). Dans la république autoproclamée, mais non reconnue, du Somaliland (le Nord de la Somalie), un gouvernement de fait est en place depuis environ deux ans.

Le conflit a fait beaucoup de victimes dans toutes les couches de la population somalienne, mais le bilan serait particulièrement élevé chez les femmes (Shire 1993, 70). Du fait de leur sexe, elles ont été la cible d'actes de violence. Ainsi, les cas de viol sont très fréquents, tant en Somalie que dans les camps de réfugiés en frontière du pays (The Ottawa Citizen 13 sept. 1993; Calgary Herald 13 sept. 1993).

La situation des femmes dans les zones de conflits armés ainsi que le rôle des femmes dans la société somalienne sont des questions qui ont attiré l'attention des groupes de défense des droits humains et des observateurs de la scène somalienne. On note toutefois un manque d'information sur certains problèmes qui touchent les femmes, comme les cas de viol, la violence conjugale et les recours à la disposition des victimes de violence. Plusieurs organismes internationaux de défense des droits de la personne et des équipes médicales travaillent actuellement en Somalie, mais ils sont difficiles à contacter.

2. LE STATUT LEGAL DES FEMMES

2.1      Les instruments constitutionnels et internationaux

En 1979, la République démocratique de Somalie a adopté une nouvelle constitution établissant officiellement l'existence d'un régime socialiste à parti unique (Ganzglass nov. 1981, 1-2). Bien que certains articles de la constitution garantissent les droits sociaux, culturels et politiques, dont l'égalité des sexes (ibid.), les observateurs de la situation des droits de la personne signalent régulièrement que ces garanties constitutionnelles ne sont pas respectées (Amnesty International 1988, 3; News From Africa Watch 12 sept. 1990, 5; Aden 20 nov. 1993).

La guerre a également eu des répercussions sur les droits conférés par la loi, et notamment les droits des femmes. Vu l'absence d'un gouvernement ou d'un pouvoir central, il n'existe aucun mécanisme qui permette d'assurer l'application des lois fondamentales ou de réprimer les violations des droits (Country Reports 1992 1993, 236; Country Reports 1993 1994, 258-259). Selon Safia Shire, ex-diplomate au service du ministère des Affaires étrangères de la Somalie, « avec la désintégration graduelle de la société et des institutions somaliennes, puis la destruction et l'émergence de la violence, les femmes somaliennes se sont vues de plus en plus privées de leurs droits et ont été reléguées au rang de minorité silencieuse » [traduction] (Shire 1993, 71).

La BBC indique qu'un projet de constitution provisoire a récemment été rédigé par un comité de travail somalien, créé dans le cadre de l'entente de réconciliation nationale de mars 1993, en collaboration avec l'Opération des Nations Unies en Somalie (ONUSOM). Ce document comporte des clauses notamment sur les droits de la personne, le maintien de l'ONUSOM en Somalie pendant une période provisoire de deux ans et la participation de la mission à la relance de l'économie somalienne au cours de cette période (BBC Summary 13 nov. 1993). Toutefois, on ne dispose d'aucune information à l'heure actuelle sur la mise en oeuvre de cette constitution provisoire.

En janvier 1993, la Somalie n'avait pas encore signé la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ni aucune autre grande convention internationale sur les droits des femmes. Elle est cependant partie du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (signés en 1990), et de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (Human Rights Law Journal janv. 1993, 62-63).

2.2         Le droit de la famille : la loi de 1975 et la loi musulmane

Le gouvernement dirigé par Siad Barre a affirmé avoir apporté de grandes améliorations aux lois relatives aux femmes en Somalie (Laitin et Samatar 1987, 87). Dans son étude de 1988, Ahmed Samatar indique que « les droits des femmes ont suscité davantage d'intérêt sous le régime militaire qu'à toute autre époque de l'histoire contemporaine de la Somalie » (Samatar 1988, 106). Par contre, selon Lula Hussein, docteure somalienne, les améliorations apportées sous Barre se sont limitées à de belles paroles, et en réalité, aucun progrès n'a été réalisé (Hussein1er nov. 1993). De même, Pr I. M. Lewis, anthropologue britannique qui a beaucoup écrit sur la Somalie, qualifie les modifications législatives effectuées sous Barre de geste politique purement symbolique (Lewis 22 avr. 1994). La loi sur la famille adoptée en 1975 (Family Law) a accordé aux femmes les mêmes droits qu'aux hommes en matière de divorce, de propriété et de succession, et a aboli les pratiques traditionnelles du paiement de la diya (voir la sous-section 3.1) et de la polygamie, sauf dans certaines circonstances (Samatar 1988, 107; Nelson 1981, 99). Cependant, la mise en oeuvre de cette nouvelle loi a soulevé un tollé de protestations, notamment chez les musulmans orthodoxes(ibid.; Laitin et Samatar 1987, 24).

Selon une spécialiste de la Somalie, la loi sur la famille de 1975 a eu très peu d'incidence sur les droits des femmes dans ce pays (Aden 20 nov. 1993). Dans bien des cas, les Somaliens n'ont pas mis les nouvelles dispositions à l'épreuve,particulièrement dans le domaine de l'éducation (Laitin et Samatar 1987, 87). Le fait que la population soit majoritairement rurale a rendu difficiles la diffusion de l'information et la sensibilisation par le gouvernement des Somaliens à cette nouvelle loi (Samatar 1988, 103).

Si la nouvelle loi sur la famille n'a pas eu l'effet escompté, c'est peut-être aussi à cause du fait que la majorité des mariages en Somalie sont contractés sous le régime de la loi musulmane, la Sharia (Women's Movements of the World 1988, 238), 98 p. 100 des Somaliens étant musulmans. Les dispositions relatives à la polygamie, au divorce et à la succession sont bien différentes selon la loi musulmane et contredisent parfois les dispositions de la loi laïque sur la famille. La loi musulmane autorise la pratique de la polygamie et, selon un communiqué de presse de la Women's International Network (WIN), cette pratique est la règle plutôt que l'exception (WIN 3 déc. 1992; Shire 21 juin 1990; Samatar 1988, 107). Selon Asha Samad, professeure d'études africaines et directrice des études féminines au City College de New York, la polygamie se répand parce que la guerre a fait beaucoup de victimes chez les hommes (Samad 27 oct. 1993).

La loi sur la famille de 1975 accorde aux femmes les mêmes droits qu'aux hommes en matière de divorce; toutefois, en vertu de la loi musulmane, le divorce peut être accordé à l'homme s'il en fait la demande au tribunal, alors que la femme doit obtenir le consentement de son mari (Hussein 1er nov. 1993). Elle peut contester le refus de son mari de lui accorder le divorce devant les tribunaux, mais s'abstient dans la plupart des cas (Aden 20 nov. 1993). A l'occasion d'un divorce, le mari doit rembourser à sa femme le montant du meher, ou la dot, que lui a remis la famille de celle-ci au moment du mariage (ibid.)[ Le contenu du meher est déterminé par le couple avant le mariage. Autrefois, le meher comportait des chameaux ou des meubles, mais aujourd'hui on y retrouve souvent des bijoux, de l'argent, bien que les montants soient peu élevés. Il faut pas confondre le meher avec la somme payée par le futur gendre à la famille de la future mariée, dont une partie est souvent remise au couple pour leur nouveau départ (Lewis 22 avr. 1994).]. Bien que les enfants demeurent habituellement avec leur mère jusqu'à l'âge de 15 ans, une femme peut perdre ses droits de garde à l'occasion d'un divorce, les enfants étant considérés comme étant la propriété du père (ibid.; Osman 21 avr. 1994). Le divorce serait relativement courant (Shire 21 juin 1990; Aden 20 nov. 1993; WIN News automne 1990, 51). Un article sur les femmes somaliennes indique qu'une divorcée ou une veuve se retrouve automatiquement sous la protection de son père, de son frère ou du plus proche parent de sexe masculin, à moins qu'elle ne se remarie (INSCAN nov. 1992, 1). Hibaaq Osman, directrice du programme des femmes du Fund for Peace à Washington, souligne qu'une Somalienne qui demande le divorce sans le consentement de son mari est tenue à l'écart de sa communauté. Osman ajoute toutefois que la situation s'est améliorée au cours des dernières années, du moins pour les femmes éduquées des centres urbains (Osman 21 avr. 1994). Selon Samad, une divorcée somalienne est « harcelée, battue, violée, privée de nourriture et [perd tout], même son statut de citoyenne somalienne » [traduction] (Human Rights Tribune nov. 1993, 26).

Il est rare qu'une femme qui vit en milieu rural possède du bétail de valeur (Lewis 22 avr. 1994; Aden 20 nov. 1993); en conséquence, le bétail dont elle est responsable doit être rendu au mari en cas de divorce. Dans les villes, toutefois, où elles commencent à gagner leur vie, les femmes ont maintenant accès à la propriété (Hussein 1er nov. 1993; Lewis 1969, 128).

Contrairement à la loi sur la famille de 1975, qui donne aux femmes les mêmes droits successoraux que ceux conférés aux hommes, la loi musulmane stipule que les femmes n'ont droit qu'à la moitié de ce qui revient aux hommes (Samatar 1988, 107; Aden 20 nov. 1993). Les Mijertein, un sous-clan de la famille des Darod, font exception à cette règle en accordant aux femmes les mêmes droits qu'aux hommes en matière de succession (Lewis 1969, 128).

2.3             Le code pénal, les tribunaux et la police.

L'information sur l'application du code pénal et sur les possibilités de recours à la police ou aux tribunaux se limite le plus souvent à des données d'ordre général[ Pour plus d'information sur les démarches entreprises pour le rétablissement des tribunaux et des forces de police en Somalie, veuillez consulter le rapport de Martin Ganzglass intitulé « Evaluation of the Judicial, Legal and Penal Systems of Somalia, April 8-22, 1993 ».], et non sur les femmes en particulier. L'un des objectifs prioritaires de l'intervention américaine en Somalie, en 1993, était de restaurer les forces policières et l'appareil judiciaire (Los Angeles Times 1er mai 1993). Selon plusieurs sources, certains indices donnent à penser que la situation revient tranquillement à la normale : dans certaines régions, et notamment à l'extérieur de Mogadiscio (Country Reports 1993 1994, 259) et dans le sud du pays (NPR 10 sept. 1993), les tribunaux sont rétablis, les forces de police reprennent leurs fonctions et quelques prisons leurs activités (ibid.). Le Dallas Morning News a même signalé l'existence, à Mogadiscio, d'un corps policier embryonnaire financé et entraîné par les Nations Unies (Dallas Morning News 26 mars 1994). L'agence de presse américaine National Public Radio (NPR) a signalé dans un compte rendu que les Nations Unies avaient rappelé dans les rangs de la police 5 000 des 20 000 membres qui composaient son effectif avant la guerre et avaient rouvert 15 postes de police. Les policiers appliquent le code criminel qui était en vigueur avant la guerre (NPR 29 juin 1993). Dans le Nord, le gouvernement de fait a également constitué une force de police civile (The Guardian 15 oct. 1993). Un système judiciaire est en place dans cette région (ibid.; Aden 20 nov. 1993) et des tribunaux ont été établis dans d'autres régions du pays (Los Angeles Times 1er mai 1993; Country Reports 1993 1994, 259). Les Nations Unies ont pris les choses en main dans ce domaine, ce que les Somaliens, selon certaines sources, n'acceptent pas facilement (BBC Summary 19 mai 1993; Aden 20 nov. 1993). Toutefois, la population préfère souvent recourir au conseil des anciens de son clan[ Selon le Middle East Report, le processus de réconciliation inter-clan s'effectue en groupe, au sein desquels chacun a la chance d'exprimer son point de vue, et les décisions se prennent d'un commun accord (Middle East Report mars-avril 1993,41).] (ibid.; The Boston Globe 27 juin 1993; AP 1er janv. 1994) ou aux chefs religieux musulmans, qui appliquent parfois la Sharia (Reuters 26 mars 1994). L'hebdomadaire américain The Nation signale que « contrairement à la caricature qui en est donnée dans les médias, la société somalienne possède effectivement les mécanismes traditionnels nécessaires au règlement des litiges... » (The Nation 8 févr. 1993).

Dans le Nord, le groupe provisoire qui dirige la « République du Somaliland », le Mouvement national somalien (MNS), aurait adopté la Sharia, bien que l'on ne connaisse pas encore les conséquences de cette décision (Country Reports 1992 1993, 236). Toutefois, selon un rapport publié par Amnesty International en avril 1993, le MNS a mis en application la loi islamique, et des femmes ont été « fouettées pour avoir enfreint le rigoureux code vestimentaire de l'islam, pour avoir vendu de l'alcool et pour avoir commis des délits sexuels » (Amnesty International 30 avr. 1993, 6). En janvier 1993, cinq femmes auraient été lapidées à mort pour adultère et prostitution à Hargeisa, dans le nord de la Somalie (Middle East Report mars-avr. 1993, 42). Arrêtées par un groupe islamique, elles ont été emmenées au poste de police et ont été jugées par un tribunal religieux, devant lequel elles n'ont pu se faire représenter ni en appeler du verdict ou de la peine. Trouvées coupable en vertu des dispositions de la Sharia, ces femmes ont été enterrées jusqu'au cou et lapidées à mort par le groupe qui les avait arrêtées. Bien qu'aucune autorité ne soit intervenue à ce moment, le MNS a arrêté les coupables après coup. Amnesty International signale que les chefs religieux arrêtés à cette occasion ont bénéficié d'un certain appui populaire en faveur de leur libération (Amnesty International 30 avr. 1993, 6). Le New York Times a signalé en outre l'arrestation, le 15 décembre 1992, d'une autre femme. Battue en pleine rue pour être montée à bord de la jeep d'un soldat français, Sadiq a été accusée de prostitution, un crime sanctionné par la peine de mort (The New York Times 16 déc. 1992). Dans la ville de Kismayu, au sud du pays, le chef militaire Omar Jess aurait donné l'ordre de tirer à vue sur toute femme qui se ferait prendre à fréquenter les casernes abritant les forces étrangères (The Independent 5 janv. 1993). Plus récemment, on a appris que le gouvernement en place dans le Nord (Somaliland) a remis en vigueur le code pénal de 1962, après l'avoir légèrement modifié pour apaiser les leaders musulmans (The Guardian 15 oct. 1993).

3.  LE STATUT SOCIO-ECONOMIQUE ET LE STATUT CULTUREL

[Pour plus d'information sur les pratiques socio-économiques et culturelles en Somalie, voir le document publié par le CDCISR en juin 1991, intitulé Somalie : Profil culturel, que l'on peut se procurer dans les centres de documentation régionaux de la CISR.]

3.1       Le système des clans

Environ 75 p. 100 de la population somalienne est rurale ou nomade (Amnesty International 1988, 5; PNUD 1993, 159). Cette population serait plus attachée aux traditions que la population citadine, bien que certaines traditions soient toujours en usage dans la société urbaine (Samad 27 oct. 1993).

La structure de la société somalienne est de type clanique : les Somaliens appartiennent tous à l'un des six clans principaux - les Daarod, les Hawiye, les Issaq, les Dir, les Rahanwein et les Digil, ces deux derniers étant des clans principalement agricoles (MRG 1991, 12). D'ailleurs, comme le mentionnent les Country Reports 1993, avec la crise sociale que traverse le pays en raison de la guerre civile, l'allégeance aux clans est devenue encore plus importante qu'elle n'était (Country Reports 1993 1994, 263).

Comme il s'agit de clans patrilinéaires, ou patriclans, le clan d'une femme est déterminé par celui de son père. La position sociale d'une femme dépend de celle de son père et, plus tard, de celle de son mari (ibid.). Lorsqu'elle se marie, elle n'adopte ni le nom ni le clan de son mari, mais ses enfants appartiennent au clan de ce dernier (ibid.).

Les femmes ont traditionnellement pu compter sur la protection et l'appui du clan de leur famille immédiate et, souvent, de leur belle-famille également (Lewis 22 avr. 1994; Nelson 1981, 99; Aden 20 nov. 1993). Selon Lewis, le bien-être des Somaliennes dépend en quelque sorte de cette protection (Lewis 22 avr. 1994). Toutefois, comme le mentionne Osman, il y a des moments où les femmes ne peuvent se promouvoir ou très peu de cette protection (Osman 21 avr. 1994). Par exemple, une femme accusée d'adultère se verra refuser toute protection parce qu'elle aura déshonoré sa famille. Par contre, un homme qui commet l'adultère n'est pas victime d'un tel rejet (ibid.). Osman ajoute qu'une femme qui demande le divorce sans le consentement de son mari est étiquettée nashiz et personne ne voudra l'approcher (ibid.). Cependant, la situation s'est améliorée pour les femmes des régions urbaines au cours des dernières années (ibid.). En outre, une veuve qui refuse d'épouser le frère ou le plus proche parent de son défunt mari, pratique musulmane connue sous le nom de lévirat, sera tenue à l'écart de sa communauté (ibid.). Lewis souligne toutefois que dans de telles situations,une femme a le droit de refuser (22 avr. 1994). Selon Osman et Aden, les structures traditionelles dans le cadre desquelles les femmes peuvent jouir d'une certaine protection sesont écroulées en raison de la guerre (Osman 21 avr. 1994; Aden 20 nov. 1993).

Selon le Minority Rights Group (MRG), dans le système clanique, « le sentiment de culpabilité individuel n'existe pas » (MRG 1991, 13). Par exemple, le paiement de la diya, banni en 1975, continue d'être pratiqué. La diya est réclamée par un clan lorsque l'un de ses membres est blessé ou tué aux mains d'un membre d'un autre clan. Le premier peut exiger une telle compensation du second. Un groupe d'anciens de sexe masculin en négocie le montant. Lorsqu'une femme est tuée ou blessée, le montant de la compensation équivaut à la moitié de ce qui est exigé lorsque la victime est un homme et c'est au clan auquel appartient son père qu'il doit être versé (ibid., 12; Lewis 1988, 8).

Lewis note que les coutumes de ce pays sont inextricablement liées aux traditionsislamiques (ibid., 16; voir aussi MRG 1991, 10). En Somalie, l'islam serait tempérée par les rigueurs de la vie nomade : par exemple, les femmes ne sont ni voilées ni tenues hors de la vue des hommes (MRG 1991, 10; Shire 21 juin 1990). Par contre, certains observateurs de la scène somalienne estiment que la crise qui sévit actuellement en Somalie a rendu la pratique de l'islam plus orthodoxe, particulièrement dans le nord du pays, de sorte que les femmes pourraient se voir obligées de porter le voile et d'être vues moins souvent en public (Samad 27 oct. 1993; Hussein 1er nov. 1993). Une spécialiste de la Somalie fait observer toutefois que si la religion officielle dans la république du Somaliland est l'islam, comme c'était le cas sous le régime de Barre, il ne s'agit pas pour autant d'une république islamique (Aden 20 nov. 1993).

3.2               Le rôle des femmes

Plusieur sources, dont le Minority Rights Group, notent qu'en Somalie, les hommes et les femmes des régions rurales ont tendance à mener leur vie de façon tout à fait indépendante en société, bien que leurs activités à l'extérieur les réunissent (MRG 1991, 10; Shire 21 juin 1990). Selon une spécialiste de la Somalie, les femmes et les hommes interagissent très librement dans le cadre des échanges commerciaux et les femmes sont libres de leurs allées et venues, c'est-à-dire qu'elles peuventse déplacer seules, même parmi les hommes (Aden 20 nov. 1993; voir aussi Lewis 22 avr. 1994). L'interaction se limite aux paroles, toutefois : les contacts physiques ne sont pas permis entre les hommes et les femmes célibataires, particulièrement pour les jeunes (Shire 21 juin 1990). La société somalienne attache beaucoup de prix à la chasteté, et une jeune fille qui a perdu sa virginité n'est pas jugée mariable (ibid.; African Rights sept. 1993, 13).

L'âge légal minimum pour se marier est de 18 ans chez les femmes (Nations Unies 1990, 105). La moyenne d'âge des femmes au premier mariage était de 20,1 ans entre 1980 et 1985 (PNUD 1993, 151). Les femmes issues du milieu rural agricole ont tendance à se marier plus tôt que celles des centres urbains, soit entre 15 ans et 18 ans environ (Hussein 1er nov. 1993; Aden 20 nov. 1993). Les femmes nomades se marient généralement plus tard (ibid.). Un mariage précoce peut nuire à la santé et à l'éducation des femmes des régions rurales, car une fois mariées, elles commencent souvent très jeunes à avoir des enfants. Il est également peu probable qu'elles quittent le village pour continuer leurs études (Hussein 1er nov. 1993). Certaines unions sont arrangées par les parents, et la plupart des mariages nécessitent des négociations financières complexes entre familles et, parfois, entre clans (Aden 20 nov. 1993).

Selon les Country Reports 1993, les femmes sont strictement subordonnées aux hommes dans la société somalienne, et la culture somalienne constitue un contexte restrictif et patriarchal (Country Reports 1993 1994, 263). Le rôle de la femme somalienne est de s'occuper de la maison et de la famille (ibid.; Mondes en développement 1989, 85). Elle a la responsabilité d'élever ses enfants (Hussein 1er nov. 1993). En milieu rural, les femmes sont aussi généralement responsables du petit bétail, comme les chèvres et les moutons (Aden 20 nov. 1993), alors que les hommes s'occupent du gros bétail (Lewis 1969, 128). Selon plusieurs sources, bien que les femmes somaliennes sembleraient jouir de peu d'influence dans la vie publique et au sein de leur société, elles auraient une influence considérable dans la vie privée, notamment dans la gestion des affaires domestiques et auprès de leur époux en ce qui concerne diverses décisions (ibid., 129; Hussein 1er nov. 1993; Lewis 22 avr. 1994).

Shire fait observer que l'usage traditionnel en Somalie veut que les meilleurs aliments soient réservés aux hommes (Shire 21 juin 1990); toutefois, selon Hussein, d'autres croient plutôt que la tradition veut tout simplement que les femmes prennent leurs repas séparément des hommes (Hussein 1er nov. 1993). Une telle pratique risque de favoriser la malnutrition chez la femme, particulièrement lorsque les approvisionnements sont minimes et en cours de grossesse, période où les besoins nutritifs de la femme sont plus importants (Working with Refugee Women sept. 1989).

En 1991, une femme somalienne avait, en moyenne, sept enfants, ce qui n'a pas changé depuis 1980 (UNICEF 1993, 32, 34). En 1991, la Somalie arrivait en troisième position quant au taux de mortalité maternelle, soit 1 100 décès sur 100 000 naissances (ibid., 38-39). Selon un rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le taux de mortalité maternelle était plus bas en 1988, soit 900 décès sur 100 000 naissances (PNUD 1993, 151).

3.3       L'éducation, la vie politique et l'emploi

Bien que la durée des études scolaires obligatoires soit de huit ans en Somalie (The New York Times 14 janv. 1993; Aden 20 nov. 1993), on estime que 96 p. 100 des femmes de ce pays ne savent pas lire, que le niveau de scolarisation des filles équivaut au tiers de celui des garçons (Country Reports 1991 1992, 350; PNUD 1993, 153) et que le niveau d'alphabétisation des femmes équivaut à 39 p. 100 de celui des hommes (ibid.). En 1988, on n'avait encore déployé que peu d'efforts pour combler ce fossé entre les sexes sur le plan de l'éducation (Samatar 1988, 107).

En Somalie, les femmes ont le droit de vote depuis 1958 dans le sud du pays et depuis 1961 dans le nord (Women's Movements of the World 1988, 238; Nelson 1981, 99). Toutefois, elles ne peuvent prendre part aux assemblées des anciens du clan ou du sous-clan, où sont prises les décisions (Lewis 1969, 128; Shire 21 juin 1990). Selon deux sources, certains clans n'accepteraient jamais d'être représentés par une femme, les conseils des anciens étant composés uniquement d'hommes (Hussein 1er nov. 1993; Aden 20 nov. 1993). Au lendemain des élections de 1984, les femmes détenaient 25 des 177 sièges du Parlement somalien, l'Assemblée nationale du peuple, mais en décembre 1987, tous les membres de l'appareil exécutif du gouvernement, le Conseil des ministres, étaient des hommes (Women's Movements of the World 1988, 238). Selon un rapport du PNUD, la proportion des femmes au Parlement équivalait à 4 p. 100 de celle des hommes en 1990 (PNUD 1993, 145), et les Country Reports 1992 publiés par le département d'Etat des Etats-Unis indiquent qu'en 1992, la participation des femmes à la vie politique était faible (Country Reports 1992 1993, 239).

Les Country Reports 1992 signalent également que les femmes somaliennes sont victimes de discrimination en matière d'emploi et dans la vie familiale (ibid.). Dans les sociétés rurales et agricoles, les femmes accompliraient l'essentiel du travail nécessaire sans bénéficier d'une quelconque reconnaissance (Shire 21 juin 1990; Dallas Morning News 8 mars 1993). Depuis peu, les femmes somaliennes commencent à prendre part à la commercialisation des produits agricoles (Aden 20 nov. 1993). Il semblerait qu'il existe une économie parallèle dans laquelle les femmes échangent entre elles des « articles pour femmes » (Samad 27 oct. 1993). Selon le PNUD, les femmes constituaient 39 p. 100 de la population active en 1990 (PNUD 1993, 151).

La situation des femmes somaliennes des centres urbains qui ont fait des études, soit un faible pourcentage de la population, se serait améliorée sous le régime de Barre sur le plan des possibilités d'emploi et du libre choix dans le mariage (Shire 21 juin 1990, 3, 4). Elles poursuivent leurs études au niveau supérieur pour s'engager dans l'enseignement ou dans une profession libérale, et jouent un rôle important dans les milieux intellectuels (ibid., 4; ibid., 1993, 71). Ce phénomène est toutefois relativement récent, bien qu'il y ait des femmes médecins en Somalie depuis quelque temps déjà (Samad 27 oct. 1993; Hussein 1er nov. 1993). Les femmes des villes qui sont moins éduquées demeurent dépendantes des hommes de la famille et ne travaillent en dehors de la maison que si les circonstances matérielles l'exigent. Il semble que la plupart des hommes somaliens considèrent le fait que leur femme doive travailler comme un échec de leur part (Shire 21 juin 1990).

3.4                L'impact de la guerre sur les femmes

Toute la population somalienne subit les conséquences de la guerre civile qui sévit dans le pays. On indique, toutefois, que ce sont les femmes et les enfants qui en souffrent le plus : ...La destruction et la violence qui règnent actuellement dans notre pays est une tragédie dont les femmes somaliennes subissent les conséquences de façon disproportionnée. Il n'est pas surprenant qu'il en soit ainsi, étant donné que les femmes sont depuis longtemps marginalisées et sans pouvoir dans notre société (Shire 1993, 70).

La guerre a grandement déstabilisé la vie sociale et familiale en Somalie et les femmes se retrouvent souvent déconcertées et sans ressources devant l'éclatement des familles (Country Reports 1993 1994, 263; Horn Reports 25 janv. 1993, 9; Samad 27 oct. 1993; The Washington Post 18 févr. 1993).

Les familles somaliennes ont toujours été dirigées par les hommes : qu'une famille soit dépourvue d'un chef de famille masculin était inconcevable avant la guerre (Samad 27 oct. 1993). La majorité des 30 000 personnes tuées au combat qui ont été recensées par le Comité international de la Croix Rouge (CICR) entre les mois de novembre1991 et février 1992 étaient des hommes (News From Africa Watch 26 mars 1992, 6). Les femmes sont généralement plus présentes dans les services de soutien que sur le front (Samad 27 oct. 1993; Orbinski 1er nov. 1993), et l'on ne sait pas si celles qui sont dans l'armée ont été ou non enrôlées par conscription, même si l'on sait que le service militaire vise les femmes âgées de 18 ans à 30 ans (Amnesty International 1988, 16). Bien des femmes sont devenues chefs de famille après avoir perdu leur mari au combat (Horn Reports 25 janv. 1993, 9), un rôle pour lequel elles ne sont généralement pas préparées (Hussein 1er nov. 1993; Samad 27 oct. 1993; The Washington Post 18 févr. 1993). Comme le mentionne la section 3.1, bien que les femmes aient bénéficié de la protection traditionnelle de leur clan et du clan de leur époux (Lewis 22 avr. 1994), ces structures traditionnelles se sont écroulées pendant la guerre (Osman 21 avr. 1994; Aden 20 nov. 1993).

Les mariages entre clans qui étaient parfois arrangés pour favoriser la paix (ibid.; Middle East Report mars-avr. 1993, 39) peuvent maintenant devenir une source de tensions entre familles : « ...en situation de guerre civile, elles [les femmes] doivent choisir entre le clan du père, et celui du mari et des enfants » (Human Rights Tribune nov. 1993, 24). Selon Dr Hussein, si les mariages entre clans étaient assez courants avant la guerre, ils sont moins facilement acceptés aujourd'hui (Hussein 1er nov. 1993).

La majorité des victimes de la famine de 1992 ont été des femmes et des enfants (Country Reports 1992 1993, 235). Les Country Reports 1992 indiquent que, à la fin de 1992, environ 3 000 personnes mouraient chaque jour de la famine et de maladies connexes (ibid.). Selon plusieurs sources, bien que la famine se soit en partie résorbée, la maladie et la malnutrition sévissent encore dans certains endroits (African Rights mai 1993, 8-10; The Ottawa Citizen 13 sept. 1993; HCR oct. 1993, 3). Toutefois, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) indique que « la récolte de cette année semble prometteuse » (ibid., 4).

En plus du stress associé à la nécessité de protéger leur vie et celle de leurs enfants, les femmes souffrent de problèmes de santé particuliers, causés principalement par l'anémie et une carence en protéines (Gutale 1993, 75). Selon l'organisation African Rights, les problèmes de nature gynécologique, de plus en plus nombreux, qui ont été signalés résultent surtout de la malnutrition et des traumatismes et déplacements associés à la guerre. Il n'y a ni services de gynécologie ni d'autres services spécialisés (African Rights mai 1993, 15; Orbinski 1er nov. 1993). Le manque de services de santé rend la tâche difficile aux femmes qui ont des enfants, surtout lorsqu'elles sont déplacées et ne peuvent alors plus compter sur l'appui de leur famille élargie (ibid.).

Depuis quelques années, les services de santé en Somalie sont rudimentaires : les hôpitaux ont été détruits, les approvisionnements sont quasiment inexistants, et le personnel médical a fui le pays. Selon le Dr James Orbinski, qui a travaillé en Somalie au sein de l'équipe de Médecins Sans Frontières (MSF) de septembre 1992 à janvier 1993, le peu d'installations qui existaient alors offraient uniquement les services essentiels : premiers soins, chirurgie d'urgence et traitements des traumatismes (ibid.).

4. LES ENJEU

4.1 La violence conjugale

Il est difficile d'obtenir des renseignements sur la violence conjugale en Somalie. Dr Hussein et Pr Samad s'entendent pour dire que la violence conjugale est un sujet tabou (Hussein 1er nov. 1993; Samad 27 oct. 1993). Selon deux spécialistes de la Somalie, comme la coutume veut que la femme bénéficie de la protection de la famille élargie, en cas de conflits au sein du ménage, le mari peut être puni par sa belle-famille (Lewis 22 avr. 1994; Aden 20 nov. 1993). Par ailleurs, comme le souligne Osman, une femme qui ne bénéficie pas de l'appui d'une famille influente a plus de chances de tomber victime d'un mari violent (Osman 21 avr. 1994). En l'absence de refuges pour les femmes victimes de violence conjugale, c'est auprès de la famille que les femmes vont habituellement chercher recours (Hussein 1er nov. 1993).

Selon deux sources, l'absence d'alcool dans la communauté musulmane et la traditionnelle protection que la famille somalienne accorde à une fille après le mariage aident à réduire ou à prévenir les cas de violence conjugale. « Il semble toutefois que ces coutumes religieuse et sociale se relâchent sous l'effet de la guerre civile, de l'anarchie et de la vie en milieu urbain » (Country Reports 1991 1992, 350; Aden 20 nov. 1993).

Selon Pr Samad, il y a toujours eu différents types et degrés de discipline au sein de la famille somalienne. Par exemple, la population nomade est habituellement très stricte (Samad 27 oct. 1993). Samad croit que les hommes somaliens utilisent parfois la force, des gifles ou des coups, pour discipliner leur femme et leurs enfants, une pratique qui n'est pas jugée inhabituelle. Les Somaliens qui vivent dans des cultures occidentales sont souvent surpris d'apprendre qu'ils n'ont pas le droit de recourir à la force pour se faire obéir (ibid.).

4.2           La mutilation génitale féminine

La mutilation génitale féminine (MGF), gudnin en somalien, également connue sous l'appellation erronée de « circoncision féminine » (Toubia 1993, 9), a été interdite par la loi en Somalie en 1947 (The Vancouver Sun 11 févr. 1993). Néanmoins, la MGF continue d'être pratiquée (Dallas Morning News 18 avr. 1993; The Orlando Sentinel 25 mars 1994). Selon The Orlando Sentinel, les lois interdisant la mutilation génitale féminine en Somalie et au Soudan ont eu peu d'impact (ibid.). On estime qu'en 1992, 98 p. 100 des femmes somaliennes ont subi ce genre d'intervention, ce qui classe la Somalie en tête de liste, aux côtés de la république voisine de Djibouti, des pays où cette pratique est en usage (University of Toronto Faculty of Law Review 1993, 280; Toubia 1993, 25).

Bien que l'on ne sache rien de ses origines, on croit que cette pratique existe depuis2 500 ans (Human Rights Quaterly 1988, 443). L'infibulation, dont la pratique remontrait à l'époque de l'Egypte ancienne (d'où l'expression « circoncision pharaonique »), est la forme la plus radicale de MGF et elle peut laisser de graves séquelles physiques et psychologiques (ibid., 441-444). C'est aussi la forme de MGF la plus coura pratiquée en Somalie (Toubia 1993, 25). Elle consiste à exciser le clitoris, les petites lèvres et une grande partie des grandes lèvres de la vulve et à recoudre partiellement l'entrée du vagin (et parfois même de l'urêtre). L'intervention est souvent pratiquée dans des conditions non hygiéniques, par une femme plus âgée du village, et peut provoquer, immédiatement ou plus tard, des problèmes d'infection et d'hémorragie. Le risque de traumatisme est également élevé : la douleur, la peur et le stress de la mère peuvent provoquer l'évanouissement ou un état de choc parfois mortel chez l'enfant (ibid., 14).

En Somalie, les filles subissent normalement l'infibulation entre l'âge de cinq et dix ans (ibid., 9). Les conséquences médicales de cette intervention se font également sentir plus tard, lorsqu'il faut pratiquer une incision du vagin recousu en vue des relations sexuelles (Human Rights Quarterly 1988, 452-453). L'accouchement est une nouvelle épreuve : les tissus cicatrisés et durcis de la vulve bloquent souvent le passage de l'enfant, dans lequel cas les parois du vagin risquent d'être déchirées et l'utérus perforé (ibid., 453). Il s'agit de la complication la plus courante associée aux accouchements en Somalie (New Scientist févr. 1991, 43). On signale que les femmes se font souvent recoudre l'entrée du vagin après un accouchement et à l'occasion d'un remariage (MRG 1992, 13; Human Rights Quarterly 1988, 454).

Dans les régions où la mutilation génitale féminine est pratiquée, dont la Somalie, la principale raison invoquée pour justifier une telle pratique est qu'il s'agit d'une tradition (ibid., 448). La pratique en soi est considérée comme une source d'identité culturelle qui cimente la communauté (ibid., 449) et comme un « critère d'admission » au sein de cette communauté, de laquelle dépend la survie de chaque individu (New Scientist févr. 1991, 44). On dit que la pression sociale en faveur de cette pratique est parfois si forte qu'en refusant de s'y plier, une fille risque d'être ridiculisée et bannie de la communauté, même si elle est encore vierge. Une femme ainsi marginalisée n'a souvent d'autre choix que de se prostituer (ibid., 45; MRG 1985, 7; Human Rights Quarterly 1988, 440, 479). Il arrive que l'on mesure la valeur d'une « future mariée » en fonction de la taille de l'ouverture pratiquée lors de l'infibulation, que la famille de l'éventuel époux est autorisée à inspecter (ibid., 446; WIN 3 déc. 1992).

Certains partisans de la MGF insistent sur le fait qu'une telle pratique leur est imposée par la religion; toutefois, selon Nahid Toubia, docteure et auteure d'une étude sur le sujet, l'islam n'exige pas que les femmes subissent ce genre d'intervention (Toubia 1993, 31). L'importance accordée par l'islam à la virginité et à la filiation patrilinéaire favoriserait néanmoins la pratique de l'infibulation, laquelle est censée réduire le risque de promiscuité et de relations sexuelles avant le mariage (ibid., 37;University of Toronto Faculty of Legal Review 1993, 282; The Vancouver Sun 11 févr. 1993). En outre, on invoque souvent la nécessité d'atténuer les pulsions sexuelles des femmes pour justifier cette pratique traditionnelle (MRG 1992, 13; Human Rights Quarterly 1988, 445) : La [mutilation génitale féminine], par exemple, résulte de la croyance stéréotypée selon laquelle les femmes sont les principales gardiennes de la moralité...d'une collectivité et qu'elles sont également les principales instigatrices de la luxure [traduction] (Studies in Family Planning 1993, 78).

Plusieurs croyances très répandues au sujet de la sexualité et de la MGF encouragent cette pratique. Par exemple, certains croient que le clitoris est empoisonné et qu'un contact avec ce dernier peut être fatal pour le bébé (University of Toronto Faculty of Law Review 1993, 283). On croit également que la MGF accroît la fertilité chez les femmes et qu'elle a des vertus thérapeutiques (Human Rights Quarterly 1988, 459; Toubia 1993, 37).

Il existe un mouvement en faveur de l'abolition de la MGF en Afrique (New Scientist 2 févr. 1991, 45; MRG 1992, 21; The Jerusalem Post 10 mai 1992; Dallas Morning News18 avr. 1993). Le Comité interafricain pour l'abolition des pratiques traditionnelles touchant les femmes (Interafrican Committee on the Abolition of Traditional Practices Affecting Women) a été créé en 1984 par les délégués à la conférence sur les pratiques traditionnelles organisée par le groupe de travail des ONG des Nations Unies sur les pratiques traditionnelles (MRG 1992, 21). En Somalie, l'Organisation démocratique des femmes somaliennes (Somali Women's Democratic Organization - SWDO) (voir la section 5) est devenue l'organisme d'exécution de la commission gouvernementale responsable de l'abolition de ces interventions (Commission Concerned with the Abolishment of the Operations) (ibid. 1985, 31). En 1987, la SWDO a amorcé, en collaboration avec un groupe italien, une campagne de lutte contre la mutilation génitale féminine, mais le projet a avorté lorsque la guerre a éclaté (ibid. 1992, 31). L'hebdomadaire américain The Nation signale que l'Iida, une organisation féminine (voir la section 5), entreprendra une nouvelle campagne contre la MGF au début de 1994 (The Nation 8 févr. 1993). Selon Drs Orbinski et Hussein, avant que la guerre n'éclate dans la région de Bay et à Mogadiscio, le mouvement abolitionniste semblait l'emporter et le nombre d'interventions de ce genre était en baisse (Orbinski 1er nov. 1993; Hussein 1er nov. 1993). Pr Samad ajoute que, à cette époque, les femmes des centres urbains commençaient à mener leurs filles à une clinique pour subir l'intervention (Samad 27 oct. 1993).

En dépit de la guerre et du bouleversement de la vie quotidienne qu'elle a entraîné, on signale que les femmes continuent d'imposer cette tradition à leurs filles pour tenter de les protéger du risque de viol (Toronto Women's Health Network Newsletter déc. 1992, 2; Hussein 1er nov. 1993). Toutefois, le viol est très douloureux pour les femmes qui ont subi l'infibulation parce que leur agresseur les taillardent à coups decouteau ou de baïonnette (African Rights sept. 1993, 13; News From Africa Watch 4 oct. 1993, 4; Samad 27 oct. 1993).

4.3                La guerre civile et la violence contre les femmes

Le nombre de viols perpétrés par des soldats et des bandits en Somalie au cours de la guerre civile est très élevé (Country Reports 1990 1991, 344-345; Amnesty International 1993, 258; Country Reports 1992 1993, 236) et, selon une source, ils sont commis de façon systématique (Country Reports 1993 1994, 263). Le viol est devenu « monnaie courante » dans les villages (ibid., 239). Selon l'équipe d'Africa Watch, qui a interviewé des victimes de viol dans les camps de réfugiés en juillet 1993, près de la moitié des femmes interviewées avaient également été attaquées en Somalie (News From Africa Watch4 oct. 1993, 8). Un chercheur du US Bureau for Refugee Programs a signalé que sur les seize cas de viol qu'il a recensés, la moitié avaient causé la mort de la victime (International Journal of Refugee Law 1990, 27).

Lorsqu'une femme est violée, elle porte les stigmates culturels de la perte de savirginité (News From Africa Watch 4 oct. 1993, 17; HCR oct. 1993, 3). En outre, sa famille doit endurer la « honte » de ne pas avoir su la protéger et risque de ne pouvoir la marier (ibid., 3; News From Africa Watch janv. 1990, 124). La victime est souvent condamnée à vivre dans la honte et l'ostracisme jusqu'à la fin de ses jours (Calgary Herald 13 sept. 1993; HCR oct. 1993, 3); s'il s'agit d'une femme plus âgée, elle peut se sentir obligée de ne plus paraître en public (African Rights sept. 1993, 13). Le HCR indique qu'une femme qui se retrouve enceinte à la suite d'un viol, ne reçoit aucun soutien de sa famille et vit dans l'isolement (HCR oct. 1993, 4). Pr Samad note que lorsque l'attaque n'a pas lieu en public, on n'y fait pas la moindre allusion, même si la victime est hospitalisée. De cette manière, la famille a une chance d'éviter que sa fille ne soit ostracisée et que la honte ne rejaillisse sur tous ses proches (Samad 27 oct. 1993).

Si le violeur appartient à un autre clan, l'affaire est souvent réglée entre clans au moyen du paiement de la diya. Ce sont les hommes du clan qui en négocient le montant, parfois contre le gré de la victime, et l'argent revient souvent aux hommes de la famille de lavictime (News From Africa Watch 4 oct. 1993, 18).

Selon les Country Reports pour 1993 et 1992, la guerre civile a fait beaucoup de morts et de blessés chez les femmes et les enfants, ce qui pourrait révéler un « mode de vengeance entre clans » (Country Reports 1993 1994, 263; Country Reports 1992 1993, 236). La fréquence des cas de viol perpétrés contre des femmes de clans opposés serait élevée (The Ottawa Citizen 13 sept. 1993), et les agresseursagissent souvent en public (News From Africa Watch janv. 1990, 124; Samad 27 oct. 1993) afin d'humilier et de rabaisser le clan dont la victime est issue (The Independent 5 janv. 1993; Country Reports 1993 1994, 263). Selon Osman, le viol d'une femme est ressenti comme un affront à la virilité ou à l'honneur par le mari et tous les hommes de son clan (Osman 21 avr. 1994). Les Country Reports 1991 signalent en outre des cas de jeunes filles violées, devant leurs parents, par des miliciens du Congrès de la Somalie unifiée (CSU), et dont certaines ont été enlevées par ces derniers et jamais revues (Country Reports 1991 1992, 347). En outre, les Country Reports 1993 indiquent que les femmes de la minorité ethnique Brava ont été particulièrement touchée par cette violence et que des femmes avaient été utilisées par des troupes des Nations Unies comme « bouclier » dans des embuscades tendues par l'Alliance somalienne Nationale (ASN) (Country Reports 1993 1994, 259).

Dans le centre-sud du pays, où les fermiers ont toujours été défavorisés, la famine a fait des ravages « sans précédent », les femmes et les fermiers devenant alors des ciblesfaciles pour les bandits et les pillards (Africa Report 1993, 63; News From Africa Watch 13 févr. 1992, 42). Africa Watch mentionne le cas de femmes qui se sont souvent fait voler leurs vêtements, et dont certaines sont devenues si démoralisées qu'elles ont refusé de sortir, quitte à mourir de faim (ibid.).

On a affirmé que les troupes de l'ONUSOM avait commis des violations des droits de la personne en Somalie. On signale que les troupes étrangères manquent de respect envers les femmes somaliennes. Par exemple, les troupes belges ont fouillé des femmes, à la recherche d'armes. Il est « extrêmement humiliant » pour une femme somalienne de se faire fouiller par des soldats, même si la fouille est faite de façon respectueuse. Selon l'organisation britannique African Rights, les fouilles ont été effectuées de manière « brutale, indiscrète et humiliante » (African Rights juill. 1993, 26).

4.4        Les cas d'arrestation et d'emprisonnement

Dans son rapport de mars 1991, intitulé Women in the Front Line: Human Rights Violations Against Women, Amnesty International décrit le cas de plusieurs femmes arrêtées en Somalie pour des motifs politiques ou pour des infractions criminelles, et décrit la façon dont elles sont traitées en prison. Selon cette organisation, il est arrivé que des soldats soient autorisés à entrer dans les cellules occupées par des femmes pour les « caresser », ou que des femmes se plaignant des rudes conditions carcérales soient forcées à se déhabiller et à rester allongées sur le sol d'une cour, nues et les mains liées, exposées au regard des soldats et des prisonniers de sexe masculin (Amnesty International mars 1991, 22).

Amnesty International signale également que des femmes et des enfants qui tentaient de fuir les combats dans le nord-ouest ont été arrêtés, détenus et exécutés sommairement (ibid., 46). Dans une publication antérieure, l'organisation britannique indique que la torture des prisonniers politiques, y compris le viol des détenues, est devenue une pratique « courante et systématique » au cours des années 1980 (ibid. 1988, 3). Selon une autre source, le viol est devenu un moyen de torture utilisé pour humilier les femmes dans les prisons et dans les centres de détention (Shire 1990, 2).

5.              LES RECOURS A LA DISPOSITION DES FEMMES

Il existe peu d'organismes en Somalie qui peuvent offrir refuge et assistance. En 1977, le gouvernement de Siad Barre a fondé l'Organisation démocratique des femmes somaliennes (Somali Women's Democratic Organization - SWDO), le seul groupe féminin officiel dans ce pays (Women's Movements of the World 1988, 238). Cette organisation a pris part à de nombreuses campagnes d'information et de défense des droits de la personne, dont une campagne éducative en faveur de l'abolition de l'excision génitale (ibid.). Au lendemain de la chute du gouvernement, en 1991, la SWDO a été dissoute et une nouvelle organisation a vu le jour, Iida, une organisation qui vient en aide aux femmes à faibles revenus et qui dirige une école élémentaire mixte, ainsi qu'une coopérative de tissage et d'artisanat. Iida fournit également de la nourriture et d'autres services de soutien aux hôpitaux (News from Africa Watch 7 mars 1993, 21). Les fonds dont dispose l'organisation proviennent d'organisations religieuses de bienfaisance, et d'un modeste don de la mission américaine (Los Angeles Times 31 janv. 1993). Selon une spécialiste de la Somalie, il y a actuellement beaucoup de groupes féminins en Somalie qui oeuvrent principalement dans le domaine des services sociaux (Aden 20 nov. 1993). Selon un article publié dans The Washington Post, les Somaliennes sont très en vue dans les opérations d'aide familiale communautaires telles la gestion des centres d'aide alimentaire et la comptabilité (The Washington Post 18 févr. 1993).

Selon les Country Reports 1992, vu l'absence d'un gouvernement national ou d'un système judiciaire pleinement fonctionnel, il n'existe aucun mécanisme qui garantisse l'application des lois fondamentales ou qui permette de traduire en justice les responsables de violations des droits de la personne (Country Reports 1992 1993, 236). On signale en particulier que « même la protection sur laquelle les Somaliennes pouvaient compter au sein du système traditionnel a disparu dans la surenchère de violences en 1992 » (ibid., 239). En temps normal, les femmes somaliennes comptent beaucoup sur leur famille élargie pour obtenir protection et soutien (Nelson 1981, 99), un réseau familial qui s'est, dans bien des cas, désintégré sous l'effet de la guerre civile et des tensions et de la violence entre clans qu'elle a déclenchées (Samad 27 oct. 1993; AP 3 mars 1993).

5.1         Possibilités de fuite intérieure

Selon une spécialiste de la Somalie, les déplacements d'une région à l'autre du pays ne sont pas sans dangers dans la situation actuelle. Il faut de l'argent, ce que la plupart des Somaliens, les femmes en particulier, n'ont pas (Aden 20 nov. 1993). De plus, les voies de communication ne sont pas fiables (The Boston Globe 27 juin 1993; Country Reports 1992 1993, 236). Mais surtout, ajoute la spécialiste, on doit tenter de se rendre dans un secteur contrôlé par son propre clan : il est dangeureux de traverser le territoire d'un autre clan (Aden 20 nov. 1993). Pour beaucoup de Somaliens, les femmes en particulier, la seule façon d'échapper à une situation intenable, c'est de se rendre dans l'un des camps de réfugiés situés en bordure du pays (Hussein 1er nov. 1993). Le HCR signale qu'un grand nombre de femmes qui choisissent cette option sont attaquées en cours de route (HCR juin 1993, 10). En outre, le directeur du Clinical Psychology Community Programme de l'université de Boston, un Somalien d'origine, a indiqué au cours d'un entretien avec le CDCISR en 1991, que les femmes somaliennes qui retournent en Somalie pour y chercher des documents courent le risque d'être battues, violées, emprisonnées ou même tuées (févr. 1991, 9). La situation des Somaliens, et des femmes en particulier, dans les camps de réfugiés est également difficile. Les problèmes de santé et de violence auxquels sont confrontés les femmes dans ces camps font l'objet de rapports publiés par African Rights, Africa Watch et le HCR[ On peut se procurer ces rapports auprès des centres de documentation régionaux de la CISR.].

5.2  Rapatriement

On a tenté à plusieurs reprises de rapatrier de force des réfugiés qui avaient fui au Kenya. Le gouvernement du Kenya, notamment, aurait tenté de rapatrier un grand nombre de réfugiés somaliens en 1991. En mai 1991, au moins 37 personnes ont péri noyées, la plupart des femmes et des enfants, lorsque le bateau dans lequel on les a forcées à s'entasser a chaviré. Les survivants ont précisé que « plutôt de porter secours aux réfugiés qui s'agrippaient à l'embarcation, les marins kényans ont arraché les bracelets d'or des poignets des femmes et ont abandonnées ces dernières à leur sort » (African Rights sept. 1993, 5).

Après les premières interventions internationales en Somalie et la signature d'un accord de paix à Addis Abeba, au printemps de 1993, la communauté internationale a encouragé la mise en oeuvre d'un programme de rapatriement rapide (African Rights sept. 1993, 46; HCR juin 1993, 2). Selon le HCR et African Rights, certains réfugiés somaliens commencent à retourner volontairement dans les secteurs considérés comme étant relativement sécuritaires (ibid.). En octobre 1993, le HCR indiquait que plus de 32 000 Somaliens étaient rentrés au pays depuisle mois de janvier 1993 (ibid., oct. 1993, 2). Inter Press Service signale qu'environ la moitié des réfugiés somaliens ayant fui au Kenya s'étaient inscrits au programme de rapatriement (IPS 2 juill. 1993). Dans certains cas, les Somaliens choisiraient de retourner dans leur pays parce qu'ils ne sentent pas en sécurité au Kenya (African Rights sept. 1993, 47; HCR oct. 1993, 4). Bien que le HCR juge que la vallée de Juba est suffisamment sécuritaire pour envisager un rapatriement dans ce secteur, African Rights signale que « les réfugiés qui [y] ont été rapatriés...sont victimes de violence, y compris de viol, et veulent retourner au Kenya » (African Rights sept. 1993, 49).

6.             PERSPECTIVES D'AVENIR

L'avenir des femmes somaliennes dépend dans une large mesure de l'issue ou de l'évolution du conflit. Bien que Pr Samad croit que les femmes somaliennes soient les mieux à même de rétablir la paix et de relancer le développement du pays (Samad 27 oct. 1993), African Rights laisse entendre qu'elles sont tenues à l'écart des négociations officielles en faveur de la paix (African Rights mai 1993, ii). Par exemple, aucune femme n'était présente de façon officielle à la réunion organisée à Addis Abeba en vue de réconcilier les factions rivales du Congrès de la Somalie unifiée (CSU) (Los Angeles Time 31 janv. 1993).

Au moment de la rédaction du présent rapport, les combats se poursuivaient dans la région de Mogadiscio. La situation politique qui règne dans le Nord (Somaliland) serait stable, et la région-même est plus calme. L'Agence France Presse signale que le calme est plus ou moins revenu à Baidoa, qui a déjà porté le nom de « cité la mort » (AFP 15 nov. 1993).

Un article publié dans The Ottawa Citizen indique que dans l'ensemble du pays, « les activités reprennent, et la vie a presque repris son cours normal » (The Ottawa Citizen 13 sept. 1993). Le Dallas Morning News parle en fait d'une amélioration de la situation, même à Mogadiscio (Dallas Morning News 26 mars 1994). Bien que la famine se soit plus ou moins résorbée, la malnutrition et la maladie persistent (African Rights mai 1993, 8-10). Quelques écoles auraient rouvert leurs portes, mais certaines femmes, en particulier les membres de l'organisation Iida, s'inquiètent du fait que jusqu'ici, toutes ces écoles soient musulmanes orthodoxes (The New York Times 14 janv. 1993). En outre, comme Osman le fait remarquer, ces écoles, démunies de meubles et de matériel scolaire, ne constituent en fait qu'un toit sous lequel se rencontre les gens (Osman 21 avr. 1994).

Même si la guerre a fait énormément de victimes chez les femmes en Somalie, certains croient que, par la force des choses, les femmes sont devenues plus indépendantes et sont en train de s'organiser et de se prendre en mains (Osman 21 avr. 1994). Dr Orbinski témoigne d'une manifestation organisée par des femmes pour protester contre la guerre, une manifestation que les hommes ont prise au sérieux. Orbinski croient que les femmes ont le contrôle sur la vie sociale (Orbinski 1er nov. 1993). Selon les Country Reports 1992, « par une ironie du sort, [les femmes] ont vu leur situation s'améliorer un peu en 1992, en dépit de l'anarchie qui règne en Somalie », particulièrement dans ce qui subsiste de l'activité économique (Country Reports 1992 1993, 239). Depuis ces dernières années, elles ont plus ou moins le monopole de l'économie de troc, qui est axée sur la nourriture, les vêtements, l'or et le qat (une drogue douce) (AP 3 mars 1993). En 1992, les femmes dirigeaient des services d'aide humanitaire et des hôpitaux, tandis qu'à Mogadiscio, elles dominaient le marché immobilier et le milieu des opérations de change (Country Reports 1992 1993, 239; Hussein 1er nov. 1993). Selon un article publié dans The Gazette, les coopérants de l'aide internationale croient que les femmes constituent ce qu'il y a de plus solide pour reconstruire la Somalie (The Gazette 14 févr. 1994).

Toutefois, seul l'avenir dira si le nouveau gouvernement qui sera constitué inscrira les droits des femmes parmi ses priorités et s'il s'emploiera plus activement que son prédécesseur à mettre en oeuvre les décisions législatives adoptées sous le régime de Barre.

REFERENCES

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