AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COMMISSION DES RECOURS DES REFUGIES

demeurant

CHEZ M. KANAGASABAI Uthayamen 11. Rue Dezobry

 

3ème Etage

 

93200 SAINT-DENIS

ledit recours

enregistré le 19 janvier 1994

au secrétariat de la Commission des Recours des Réfugiés et tendant à l'annulation de la décision par laquelle le directeur de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (O.F.P.R.A)

a, le 13 décembre 1993, cessé de lui reconnaître la qualité de réfugié;

Par les moyens suivants:

-           l'infraction à la législation sur les stupéfiants pour laquelle il a été condamné, le 23 juin 1989, par la Cour d'Appel de Paris, à neuf ans d'emprisonnement ainsi qu'à l'interdiction définitive du territoire français ne peut ni entrer dans le champ d'application des stipulations de l'article 1 F b puisque le délit qui lui est reproché a été commis dans le pays d'accueil, ni dans celui de l'article 33-2, dès lors qu'une mesure d'expulsion ou de refoulement ne peut avoir d'effet sur une décision d'admission au statut de réfugié et encore moins de retrait dudit statut;

-           il a combattu les autorités sri-lankaises et craint d'être persécuté en cas de retour dans son pays d'origine;

Vu la décision attaquée;

Vu, enregistrées comme ci-dessus le 23 mars 1994,

les observations présentées par le directeur de l'O.F.P.R.A. tendant au rejet du recours;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier;

Vu la loi du 25 juillet 1952, modifiée relative à l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides et à la Commission des Recours;

Vu le décret du 2 mail 1953, modifié;

Après avoir entendu à l'audience publique du 10 mars 1995

Mme LAURENT-ATTHALIN, rapporteur de l'affaire, les observations de Maître LAURAIN, conseil du requérant, et les explications de ce dernier;

M. APPADOURAI, interprète assermenté;

Après en avoir délibéré;

Considérant qu'en vertu du paragraphe A, 2°, de l'article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays;

Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la Convention de Genève:

1.         Aucun des Etats Contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

2.         Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays;

Considérant que, pour demander l'annulation de la décision par laquelle le directeur de I'OFPRA a cessé de lui reconnaître la qualité de réfugié, M. SIVANADIYAN, qui est de nationalité sri-lankaise et d'origine tamoule, soutient que, s'il a fait l'objet en France d'une condamnation à neuf ans d'emprisonnement assortie d'une interdiction définitive du territoire français pour infraction à la législation sur les stupéfiants, une telle infraction de droit commun dans le Pays d'accueil ne peut motiver la cessation de la qualité de réfugié reconnue en vertu des stipulations de la Convention de Genève; qu'il a combattu les autorités sri-lankaises et craint d'être persécuté en cas de retour dans son pays d'origine;

Considérant, d'une part, que selon les stipulations précitées de l'article 33 de la Convention de Genève, le statut accordé en application de cette convention fait obstacle à ce qu'un réfugié soit remis, de quelque manière que ce soit, par le pays qui lui reconnaît cette qualité, aux autorités de son pays d'origine, sous la réserve que ce réfugié n'ait pas été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave qui fasse de Cette personne une menace pour la communauté du pays d'accueil; que doit être regardé comme constituant une menace pour la communauté française un réfugié ayant fait l'objet d'une condamnation définitive pour infraction grave à la législation sur les stupéfiants, eu égard, comme dans le présent cas, à l'importance de la peine prononcée, dont l'interdiction définitive du territoire français; que si l'exception au principe de non-expulsion et de non-refoulement visée par l'alinéa 2 de l'article 33 prévoit qu'un réfugié, dès lors que sa situation relève du champ d'application de cette stipulation, peut être remis aux autorités de son pays d'origine, ce réfugié peut ainsi être regardé comme étant déchu des droits que procure le statut de réfugié, en particulier de la protection du pays d'accueil assurée par la Convention de Genève qui se trouve dans ce cas vidée de sa substance juridique; qu'il suit de là que les stipulations de l'article 33-2 impliquent nécessairement la possibilité de cesser de reconnaître la qualité de réfugié à l'intéressé par une décision prise par l'autorité compétente;

Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort ni des pièces du dossier ni des déclarations faites en séance publique devant la Commission que les craintes énoncées par le requérant, en cas de retour au Sri-Lanka, présentent un caractère personnel et actuel de nature, eu égard à la menace sus-décrite qu'il constitue pour sa communauté d'accueil à s'opposer à ce que la qualité de réfugié cesse de lui être reconnue;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours ne peut être accueilli;

DECIDE

ARTICLE 1er : Le recours de M. SIVANADIYAN Nagasamy est rejeté

ARTICLE 2 : La présente décision sera notifiée à M. SIVANADIYAN Nagasamy et au directeur de l'O.F.P.R.A.

Délibéré dans la séance du 10 mars 1995 où siégeaient:

M. de BRESSON, Président de la Commission des Recours des Réfugiés, Président;

M. GISERT, Conseiller d'Etat honoraire;

M. KALCK, Président de Section honoraire au tribunal administratif de Paris;

MM. GUIGNABAUDET, CHAMBAULT, Mme TEITGEN-COLLY, Représentants du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés;

MM. LEFEUVRE, LEBOT, Mme GOURDON, Représentants du Conseil de l'O.F.P.R.A.

Lu en séance publique le 24 avril 1995

Le Président: J.J. de BRESSON

Le Secrétaire Général de la Commission des Recours des Réfugiés: C. JOUHANNAUD

POUR EXPEDITION CONFORME: C. JOUHANNAUD

La présente décision est susceptible d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat qui, pour être recevable, doit être présenté par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la cour de Cassation. Il doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Aucune autre voie de recours n'est ouverte contre les décisions de la Commission des Recours des Réfugiés devant d'autres juridictions.

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