Directives données par la présidente en application du paragraphe 65(3) de la Loi sur l'immigration: Directives No 1 - Civils non combattants qui craignent craignent d'être persécutés dans des situations de guerre civile

DIRECTIVES
DONNÉES PAR LA PRÉSIDENTE
EN APPLICATION DU PARAGRAPHE 65(3)
DE LA LOI SUR L 'IMMIGRATION

CIVILS NON COMBATTANTS QUI CRAIGNENT D'ÊTRE PERSÉCUTÉS DANS DES SITUATIONS DE GUERRE CIVILE

Commission de l'immigration et du statut de refugié
Ottawa (Canada)
7 mars 1996

LA QUESTION QUI SE POSE

La Section du statut de réfugié est régulièrement saisie de revendications présentées par des civils non combattants qui craignent de retourner dans des pays où la guerre civile fait rage. Les présentes directives portent sur les difficultés particulières que présentent de telles revendications. Les personnes qui présentent ces revendications doivent, comme toutes celles qui demandent le statut de réfugié, remplir toutes les conditions énoncées dans la définition légale de réfugié au sens de la Convention[1] Dans l'analyse de ces revendications, une des principales difficultés est de démontrer l'existence d'un lien entre la persécution redoutée et l'un ou plusieurs des motifs énoncés dans la Convention.

La Section du statut de réfugié a conclu à de nombreuses reprises que la définition de réfugié au sens de la Convention s'applique à des civils non combattants qui craignent de retourner dans des pays où la guerre civile fait rage. Elle est par contre arrivée à une conclusion opposée dans un nombre limité de décisions. Le paragraphe 164 du Guide du HCNUR[2] prévoit que les personnes qui sont contraintes de quitter leur pays d'origine à la suite de conflits armés nationaux ou internationaux ne sont pas normalement considérées comme des réfugiés au regard de la Convention. Bien que persuasif, ce paragraphe n'engage pas la Section du statut de réfugié. La Cour fédérale a établi certains principes qui permettent de trancher les revendications où il est question d'une situation de guerre civile; toutefois, une certaine incertitude persistant dans l'analyse de ces revendications, les présentes directives s'imposaient.

La proposition générale suivante sert de fondement à l'analyse des questions à régler dans les revendications liées à la guerre civile.

Proposition générale

Rien dans la définition de réfugié au sens de la Convention n'exclut son application aus demandeurs qui craignent de retourner dans des pays où la guerre civile fait rage[3]. En revanche, ces personnes ne sont pas, de ce seul fait, des réfugiées au sens de la Convention.

Sont exarninées dans les présentes directives les questions suivantes qui se posent dans le contexte des revendications présentées par des civils non combattants qui craignent de retourner dans des pays où la guerre civile fait rage:

Première question

Le préjudice redouté constitue-t-il de la «persécution» suivant la définition de réfugié au sens de la Convention?

Deusième question

Quels principes les décideurs devraient-ils appliquer pour déterminer si le demandeur craint d'être persécuté pour l'un ou plusieurs des motifs énoncés dans la définition de réfugié au sens de la Convention?

Troisième question

Quels facteurs faudrait-il examiner pour déterminer si la crainte de persécution du demandeur est fondée?

Quatrième question

Quels sont les principaux éléments de preuve que doivent prendre en considération les décideurs saisis d'une revendication où il est question d'une situation de guerre civile?

L 'ANALYSE

I. ÉVALUATION DU PREJUDICE REDOUTE

Il convient d'évaluer les circonstances particulières qui ont suscité la crainte de persécution du demandeur. La crainte éprouvée par le demandeur constitue-t-elle de la persécution aux termes de la définition de réfugié au sens de la Convention?

Les combattants devraient traiter avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable, les personnel qui ne participant pas activement aux hostilités dans une guerre civile[4] Ils doivent respecter à leur égard les droits de la personne. Si les combattants traitent ces personnes d'une manière contraire à ces principes, ce traitement pourrait, selon les circonstances propres à la situation de l'intéressé, constituer de la persécution. Pour déterminer s'il s'agit d'un cas de «persécution», il faut examiner si les violations des droits de la personne sont suffisamment importantes pour constituer de la persécution[5]. Ce n'est pas parce que le traitement redouté par le demandeur découle de l'hostilité ressentie ou de la violence exercée par des combattants directement impliqués dans la guerre civile qu'il ne s'agit pas de persécution.

La Section du statut de réfugié ntest pas liée par les instruments internationaux à moins que ceux-ci ne soient incorporés dans les lois canadiennes[6] Toutefois, même si un instrument particulier n'est pas ainsi incorporé, les principes qui y sont énoncés peuvent faciliter l'application de la définition de réfugié au sens de la Convention. En outre, les normes contenues dans un instrument peuvent aider la Section du statut de réfugié à déterminer ce qui constitue un comportement permis, même si cet instrument ne lie pas les parties à un conflit. En définissant ce qui constitue un comportement permis, ces instruments pourraient aider la Section du statut de réfugié à déterminer si le traitement constitue de la persécution selon le sens donné à ce terme dans la jurisprudence canadienne.

En conséquence, afin d'établir quels sont les droits fondamentaux de la personne dont il faut tenir compte pour apprécier s'il y a persécution dans une situation de guerre civile, il faut se reporter aux instruments internationaux sur les droits de la personne, dans lesquels sont exposées les normes internationales servant à déterminer les besoins de protection des personnes. Font partie de ces instruments les documents suivants:

i) Déclaration universelle des droits de l'homme;

ii) Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

iii) Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels;

iv) Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

En outre, certains instruments internationaux concernent la protection des civils en temps de guerre. Ils peuvent adopter à l'endroit des non-combattants et, ainsi, à établir si les comportements en cause constituent de la pers§écution. Ces instruments comprennent, notamment:

i) Convention de Genève relative à la protection des personnel civiles en temps de guerre, du 12 août 1949 (la "Convention de 1949");

ii) Protocole II de la Convention de 1949 ("Protocole II").

L'article 3 de la Convention de Genève de 1949 interdit certains actes par rapport aux non combattants, dont:

      les atteintes portées à la vie et à l'intégrite corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices;

      les prises d'otages;

      les atteintes à la dignité des personnel, notamment les traitements humiliants et dégradants.

L'article 4 du Protocole II interdit certains actes par rapport aux non combattants, par exemple:

·     les atteintes portées à la vie, à la santé et au bien-être physique ou mental des personnel, en particulier le meurtre, de même que les traitements cruels tels que la torture, les mutilations ou toutes formes de peines corporelles;

      les punitions collectives;

      les prises d'otages;

      les atteintes à la dignité des personnel, notamment les traitements humiliants et dégradants, le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à la pudeur.

L'article 13 du Protocole II prévoit que «la population civile et les personnel civiles jouissent d'une protection genérale contre les dangers résultant d'opérations militaires». En vue de rendre cette protection effective, certaines regles, y compris les règles suivantes doivent être observées:

      Ni la population civile en tant que telle ni les personnes civiles ne devront être l'objet d'attaques

      Sont interdits les actes ou menaces de violence dont le but principal est de répandre la terreur parmi la population civile.

Des extraits de ces deux instruments sont reproduits dans les présentes directives[7] .

II. LA PERSECUTION EST-ELLE FONDEE SUR UN MOTIF ENONCE DANS LA CONVENTION?

Principes généraux - Cour d'appel fédérale

L'application de la définition aux revendications liées à la guerre civile constitue généralement la plus grande difficulté lorsque vient le moment de déterminer s'il existe un lien entre la persécution subie ou redoutée par le demandeur ou le groupe auquel il appartient et les motifs de persécution énumérés dans la définition[8] . Il convient donc, pour commencer l'analyse de cette question, de se reporter aux deux arrêts faisant autorité de la Cour d'appel fédérale. Le premier de ces arrêts est Salibian c M.E.I.[9]; la Cour y formule quatre principes généraux à la p. 258:

A la lumière de la jurisprudence de cette Cour relative à la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention, il est permis d'affirmer

1)   que le requérant n'a pas à prouver qu'il avait été persécuté lui-même dans le passé ou qu'il serait lui-même persécuté à l'avenir,

2)   que le requérant peut prouver que la crainte qu'il entretenait résultait non pas d'actes répréhensibles commis ou susceptibles d'être commis directement à son égard, mais d'actes répréhensibles commis ou susceptibles d'être commis à l'égard des membres d'un groupe auquel il appartenait,

3)   qu'une situation de guerre civile dans un pays donné ne fait pas obstacle à la revendication pourvu que la crainte entretenue soit non pas celle entretenue indistinctement par tous les citoyens en raison de la guerre civile, mais celle entretenue par le requérant lui-même, par un groupe auquel il st associé ou, à la rigueur. par tous les citovens en raison d'un risque de persécution fondé sur l'un des motifs énoncés dans la définition, et

4)   que la crainte entretenue est celle d'une possibilité raisonnable que le requérant soit persécuté s'il retournait dans son pays d'origine [...][Non souligné dans l'original.]

La Cour fait ensuite sien l'énoncé suivant du professeur Hathaway:[10]

[TRADUCTION] En somme, tandis que le droit des réfugiés moderne s'attache à reconnaître la protection dont doivent bénéficier des revendicateurs pris individuellement, la meilleure preuve qu'une personne risque sérieusement d'être persécutée réside généralement dans le traitement accordé à des personnel placées dans une situation semblable dans le pays d'origine. Par conséquent, lorsqu'il s'agit de revendications fondées sur des situations où l'oppression est généralisée, la question n'est pas de savoir si le demandeur est plus en danger que n'importe qui d'autre dans son pays, mais plutôt de savoir si les manoeuvres d'intimidation ou les mauvais traitements généralises sont suffisamment graves pour étayer une revendication du statut de réfugié. Si des personned comme le requérant sont susceptibles de faire l'objet d'un grave préjudice de la part des autorités de leur pays, et si ce risque est attribuable à leur état civil ou à leurs opinions politiques, alors elles sont à juste titre considérées comme des réfugiés au sens de la Convention. [Non souligné dans l'original.]

La deuxième décision applicable est le très bref arrêt Rizkallah c. M.E.I.[11] où la Cour d'appel a statué ce qui suit:

Pour avoir gain de cause, les demandeurs du statut de réfugié doivent établir qu'ils font eux-mêmes l'objet de persécution pour un motif visé par la Convention. Cette persécution doit être dirigée contre eux, soit personnellement, soit en tant que membres d'une collectivité.

[...] la preuve qui nous a été présentée ne permet pas d'établir que les Chrétiens du village libanais des demandeurs étaient collectivement persécutés d'une manière qui pourrait les distinguer de l'ensemble des victimes de la terrible guerre civile que se livrent les nombreuses parties. [Non souligné dans l'original.]

La Cour d'appel a commenté, dans l'arrêt Hersi, Nur Dirie c. M.E.I.[12], le troisième principe général formulé dans l'arrêt Salibian; elle a statué, sur consentement, que la Section du statut de réfugié avait commis une erreur lorsqu'elle a conclu que les demandeurs du statut de réfugié doivent être capables de prouver qu'ils courent un risque distinctif plus grand que les autres membres de leur groupe, ce qui, selon elle, est incompatible avec la décision qu'elle avait rendue dans Salibian.

Méthodes d'analyse des revendications liées à la guerre civile

Il semble ressortir des décisions qu'elle a rendues que la Section de première instance de la Cour fédérale a adopté deux méthodes différentes d'analyse des revendications liées à la guerre civile. L'une des méthodes consiste à déterminer s'il existe un lien entre le préjudice redouté et l'un des motifs énoncés dans la Convention, et l'autre, à appliquer les arrêts Salibian et Rizkallah.

Méthode non comparative

Les présentes directives recommandent la méthode non comparative pour apprécier une revendication, laquelle se rapproche davantage du troisième principe formulé dans l'arrêt Salibian, des arrêts Rizkallah et Hersi, Nur Dirie de la Cour d'appel ainsi que du libellé de la définition de réfugié au sens de la Convention[13]. Selon cette méthode, la Cour examine la situation particulière du demandeur, et celle du groupe auquel il appartient, de la même manière que toute autre revendication du statut de réfugié au sens de la Convention, au lieu de comparer les risques de persécution que courent l'intéressé et d'autres personnes (notamment des membres du groupe anquel appartient le demandeur) ou groupes.

Il ne s'agit pas de comparer le risque auquel s'expose le demandeur et le risque auquel doivent faire face d'autres personnes ou d'autres groupes pour un motif énoncé dans la Convention; il s'agit plutôt de déterminer si le risque que court le demandeur constitue un préjudice suffisamment grave et est lié à un motif énoncé dans la Convention par rapport aux conséquences générales de la guerre civile[14] II ne faudrait pas accorder à un demandeur le statut de «victime générale» d'une guerre civile sans avoir pleinement analysé sa situation personnelle et celle du groupe auquel il peut appartenir. La méthode non comparative permet de porter toute l'attention sur la question de savoir si la crainte de persécution du demandeur repose sur l'un des motifs prévus dans la Convention.

Méthode comparative

L'autre méthode utilisée pour apprécier les revendications est la méthode comparative. Cette méthode détermine si le demandeur, ou le groupe auquel il appartenait, courait un «risque distinctif» auquel n'étaient pas exposés les autres citoyens ou groupes de son pays d'origine[15] Cette méthode comporte une comparaison de la situation difficile à laquelle doit faire face le demandeur, ou le groupe auquel il appartient, et de celle d'autres personnes de son pays d'origine qui peuvent faire l'objet d'un préjudice de la part des mêmes ou d'autres agents de persécution. En d'autres termes, il faut se demander si la situation du demandeur, ou du groupe auquel il appartient, est pire que celle de ses compatriotes dans son pays d'origine[16], ou si elle est différente.

C'est dans l'affaire Isa, Sharmarka Ahmed c. S.E.C.[17] qu'il est le plus clairement indiqué que la méthode comparative a été adoptée.

Conclusion

Les présentes directives recommandent la méthode non comparative, étant donné que celle-ci applique la jurisprudence dans Salibian, Rizkallah et Hersi, Nur Dirie. Ces directives ne recommandent pas d'appliquer la notion de «risque distinctif» comme méthode d'analyse. En effet, cette notion peut mener à l'application d'une méthode comparative alors que l'exigence selon laquelle le demandeur, ou le groupe auquel il appartient, soit exposé à des risques plus importants que ceux des autres habitants du pays d'origine peut être difficile à concilier avec certains extraits des arrêts Salibian, Rizkallah et Hersi, Nur Dirie. En outre, la méthode comparative peut être difficile à concilier avec la définition de réfugié au sens de la Convention.

Principes pertinents pour l'application de la méthode non comparative

Pour avoir gain de cause, les demandeurs du stalut de réfugié doivent démontrer qu'ils font l'objet de persécution pour l'un des motifs prévus dans la Convention. En d'autres termes, cette persecution doit être dirigée contre eux, soit individuellement soit en tant que membres d'un groupe[18] Étant donné que les actes de persécution visent souvent des groupes plutôt que des individus, il n'est pas nécessaire que le demandeur soit la cible particulière de la persécution pour que le statut de réfugié au sens de la Convention lui soit reconnu[19]

Lorsque la persécution ou la possibilité de persécution future vise le groupe auquel appartient le demandeur plutôt que chacun de ses membres, c'est l'appartenance au groupe qui donne lieu à la crainte. Lorsque des personnes sont ciblées parce qu'elles possèdent une certaine caractéristique liée à l'un des motifs énoncés dans la Convention, toutes les personnes qui possèdent cette caractéristique[20] peuvent alors être visées en raison de cette caractéristique. Dans un tel cas, ce n'est pas parce que l'auteur de la persécution ne «fait pas de distinction» entre une personne qui possède cette caractéristique et une autre personne qui possède également celle-ci qu'il n'y a pas de lien avec l'un des motifs énoncés dans la Convention. L'important est que le groupe soit visé, ou qu'il existe une possibilité raisonnable que le demandeur ou le groupe soit visé dans l'avenir. En outre, le nombre de personnes qui appartiennent au groupe importe peu.

Les mesures de persécution ciblée doivent être examinées en fonction du point de vue de l'agent de persécution, c'est-à-dire qu'il faut tenir compte de l'intention de ce dernier. La Cour suprême du Canada a précisé que les circonstances d'une affaire, y compris l'intention de l'agent de persécution, devraient être examinées du point de vue de l'agent de persécution puisque c'est ce qui est «déterminant lorsqu'il s'agit d'inciter à la persécution»[21]

Lorsqu'il ressort clairement de la preuve que l'agent de persécution avait l'intention de prendre pour cible un demandeur, ou le groupe auquel il appartient, il est facile de déterminer s'il y a un lien avec l'un des motifs énoncés dans la Convention. Lorsque cette intention n'est pas claire d'après les faits de l'espèce, on peut déduire qu'il y a persécution pour l'un des motifs énoncés dans la Convention d'après l'effet des actes de l'agent de persécution sur le demandeur ou sur le groupe auquel il appartient.

II ne faudrait pas attribuer à une personne civile non combattante une part de la «culpabilité collective» parce que les membres combattants du groupe auquel appartient le demandeur causent un préjudice à des membres d'autres groupes.[22] De tels actes ne devraient pas empêcher un demandeur d'obtenir le statut de réfugié s'il satisfait par ailleurs aux autres exigences de la définition. Comme on l'a fait remarquer dans l'affaire Isa, il faut reconnaître que des motifs énoncés dans la Convention sont souvent à l'origine des guerres civiles. Les présentes directives recommandent que les décideurs qui appliquent les arrêts Salibian et Rizkallah fassent preuve de circonspection avant de conclure à l'inexistence d'un lien en l'espèce avec l'un des motifs énoncés dans la Convention. Ce n'est pas parce que toutes les personnes appartenant à l' un ou l'autre des camps opposés dans un conflit pourraient être visées par la définition qu'un demandeur ne peut pas obtenir le statut de réfugié lorsqu'il craint avec raison d'être persécuté pour l'un des motifs énoncés dans la Convention.

Pour déterminer s'il existe un lien avec l'un des motifs énoncés dans la Convention, il serait utile que les décideurs considèrent les commentaires suivants de M. Joachim Henkel, juge à la cour fédérale administrative allemande, au sujet de la persécution par rapport aux conséquences générales d'une guerre civile[23]

[TRADUCTION] La règle générale suivant laquelle la Convention de Genève sur le statut de réfugié n'assure aucune protection contre les conséquences générales d'une guerre civile est correcte, mais elle est souvent appliquée d'une maniere trop générale. Certes, le risque de se retrouver au coeur de combats et de mourir plus ou moins par accident est une conséquence générale de la guerre civile. De plus, le risque de perdre un membre en marchant sur une mine terrestre est une conséquence générale d'une guerre civile. Le manque de nourriture et d'eau, d'électricité et de chauffage, l'absence de traitements médicaux ainsi que de nombreuses autres souffrances sont des conséquences générales d'une guerre civile. Mais, à mon avis, il y a persécution si l'un des belligérants, dans le cadre de sa stratégie, viole systématiquement les femmes de la communauté ennemie; si les belligérants s'adonnent à la «purification ethnique»; si les belligerents détiennent tous les hommes de la communauté ennemie dans des camps de concentration où ceux-ci font l'objet de sévices; si après avoir capturé une ville, l'un des belligerents tue chacun des civils de la communauté ennemie. Même si de telles atrocités sont aujourd'hui fréquentes dans les guerres civiles, elles sont manifestement dirigées contre des personnes en tant qu'individus; elles ne sont pas les conséquences inévitables, plus ou moins anonymes, d'une guerre. Ainsi, si l'un des belligérants prend pour cible particulière une personne ou un groupe de personnel en raison de la race, des opinions politiques ou de l'un des autres élements énonces dans la définition de réfugié, et commet des atteintes graves aux droits de la personne, il s'agit manifestement de persécution [...]

Catégories De Revendications

Avant de déterminer si la crainte de persécution est fondée sur l'un des motifs énoncés dans la Convention, il convient de signaler les catégories de revendications où il est question de pays aux prises avec une guerre civile. Ces revendications peuvent être divisées en trois grandes categories:

1.   Crainte de persécution dans une situation de guerre civile généralisée:

a) Préjudice individuel distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile.

b) Préjudice collectif distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile.

c) Préjudice non distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile.

2.   Crainte de persécution découlant d'une guerre civile visant directement un groupe auquel le demandeur est affilié.

3.   Crainte de persécution découlant de circonstances sans rapport avec la guerre civile.

Ces catégories indiquent les circonstances réelles donnant lieu à la majorité des revendications liées à la guerre civile. Ces catégories permettent de déceler plus facilement le lien entre le préjudice redouté et le motif de la Convention qui est applicable. Les exemples fournis ci-dessous ne comprennent pas toutes les situations qui pourraient se présenter dans une catégorie donnée.

1. Crainte de persécution dans une situation de guerre civile généralisée

A) Préjudice individual distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile

Certains individus, sans participer aux hostilités, peuvent néanmoins devoir faire face à une possibilité raisonnable de persécution[24] à cause de leur état civil ou de leurs opinions politiques, ou à cause d'une caractéristique qui leur est attribuée par les combattants dans la guerre civile. Par exemple:

1)   Les personnes qui risquent d'être persécutées parce qu'elles refusent de joindre les rangs de l'une ou de l'autre des parties au conflit armé parce qu'elles veulent demeurer neutres, par choix politique délibéré ou pour une autre raison de conscience valable.[25]

2)   Les activistes en matière de droits de la personne, les joumalistes ou les autres citoyens qui sont menacés de mesures de persécution soit parce qu'ils enquêtent sur des activités et des atrocités attribuables à l'armée, aux groupes paramilitaires ou aux guérilleros, soit parce qu'ils critiquent ces activités et atrocités, ou les deux.

3)   Les personnes qui craignent d'être persécutées pour des points de vue qui leur sont imputés, comme le fait de «saboter l'effort de guerre» ou de «collaborer avec l'ennemi».[26]

B) Préjudice collectif distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile

Même si l'ensemble de la population subit le contrecoup de la guerre civile, il peut exister une possibilité raisonnable qu'un groupe racial, national, religieux, social ou politique soit persecuté du fait de certaines caractéristiques qui lui sont propres. Par exemple:

1)   Les membres d'un groupe ethnique peuvent être persécutés notamment parce qu'on leur refuse sélectivement la protection de l'État en raison même de leur origine ethnique.

2)   Les femmes et les enfants, en raison de leur rôle social et politique ou des rapports qu'ils ont avec certains individus (y compris des parents), peuvent être la cible d'actes de violence et être victimes de sévices.[27]

3)   Les membres d'un clan percu comme ayant des liens avec un autre clan ayant gouverné le pays avant la guerre civile peuvent être persécutés en raison de l'association ainsi faite.[28]

C) Préjudice non distinguable des périls généraux créés par une situation de guerre civile

Comme il a été mentionné plus haut, il est possible que certaines personnes et certains groupes risquent raisonnablement d'être persécutés pour l'un des motifs énoncés dans la Convention, même si l'ensemble de la population subit le contrecoup de la guerre civile. Par contre, dans d'autres circonstances, aucun lien ne pourra être établi avec l'un de ces motifs. On parle alors des conséquences inévitables, plus ou moins anonymes, de la guerre civile. Par exemple:

1)   Les civils qui sont accidentellement victimes des combats opposant des milices rivales; en raison de l'absence d'une intention de l'une ou l'autre des parties d'atteindre les civils, ces derniers sont de «simples victimes» de la guerre civile, car il n'y a aucun lien entre le préjudice redouté et l'un des motifs énoncés dans la Convention.[29]

2)   Les civils qui sont des victimes accidentelles d' attaques au mortier et de bombardements arbitraires, généralisés ou aveugles, ou qui se trouvent dans une région où des mines ont été enfouies dans les cas où la crainte de subir un tel traitement ntest pas liée à l'un des motifs de la Convention.[30]

3)   Les civils qui sont la cible d'actes de violence commis au hasard, comme c'est le cas du pillage, lorsque la violence n'est pas liée à l'un des motifs de la Convention.[31]

2. Crainte de persécution découlant d'une guerre civile visant directement un groupe auquel le demandeur est affilié

La violence est dirigée contre un groupe qui se distingue du reste de la population du fait de caractéristiques ayant trait à sa race, à sa nationalité, à son appartenance sociale ou à ses opinions politiques. Par exemple:

1)   Les membres d'un groupe ethnique visé par une campagne de génocide.

2)   Les membres d'un groupe religieux expulsés de leurs domiciles et victimes d'autres formes de persécution, dans le cadre d'une stratégie de «purification ethnique».[32]

3. Crainte de persécution découlant de circonstances sans rapport avec la guerre civile

Même si le demandeur de statut vient d'un pays ravagé par la guerre civile, les risques qu'il court ne sont pas liés, directement ou indirectement, à cette guerre. Cependant, il peut quand même être un réfugié au sens de la Convention si sa crainte est liée à l'un des cinq motifs. Dans un tel cas, la revendication devrait être tranchée sans utiliser le cadre d'analyse applicable aux situations de guerre civile. Par exemple:

1)   Les dirigeants syndicaux qui sont menacés de mesures de persécution parce qu'ils appuient le syndicalisme.

2)   Les membres d'un groupe minoritaire victimes de persecution, dans les cas où ce traitement ou l'absence de protection est sans rapport avec la guerre civile.

III. Y-T-IL UNE CRAINTE FONDEE DE PERSECUTION?

Selon la jurisprudence, le demandeur doit établir que sa crainte est fondée, et il faut examiner à ce stade de l'analyse de la revendication l'incapacité de l'Etat à le protéger. En outre, la Cour suprême du Canada a confirmé dans l'arrêt Ward que le demandeur ne doit solliciter la protection internationale que lorsqu'il lui est impossible d'obtenir la protection de l'État dont il est un ressortissant.[33] Le demandeur doit demander la protection de son pays d'origine avant de solliciter la protection internationale à moins qu'il ne lui soit objectivement déraisonnable de le faire.[34]

La Section du statut de réfugié doit déterminer s'il existe une possibilité raisonnable que le demandeur soit persécuté pour l'un des motifs énoncés dans la Convention: existe-t-il une crainte subjective fondée sur un élément objectif? Comme il en a été question plus haut dans les présentes directives, il n'est pas nécessaire que le risque de persécution que court le demandeur, individuellement ou en tant que membre d'un groupe, soit plus grand que celui auquel doivent faire face d'autres personnes dans une situation de guerre civile; il n'est pas non plus requis que la persécution redoutée par le demandeur soit plus grave que celle qui est redoutée par d'autres personnel.

Protection de l'État

La capacité de l'État de protéger le demandeur constitue un élément crucial lorsqu'il s'agit de déterminer si la crainte éprouvee par ce dernier est justifiée, et elle ne constitue pas un élément indépendant de la définition de réfugié au sens de la Convention. Dans l'arrêt Ward, la Cour suprême du Canada a statué que deux présomptions entrent en jeu dans la détermination du statut de réfugié. En ce qui concerne la première présomption, la Cour a conclu que l'on peut présumer que la persécution sera probable et la crainte justifiée si la crainte de persécution est crédible et qu'il y a absence de protection de l'État. Quant à la deuxième présomption, la Cour a statué que, sauf en cas d'effondrement complet de l'État, il y a lieu de présumer qu'il peut protéger ses citoyens. La Cour a conclu que cette présomption peut être réfutée par une preuve «claire et convaincante» de l'incapacité de l'État d'assurer la protection.[35]

La présomption suivant laquelle il y a lieu de présumer qu'un Etat est capable de protéger ses citoyens peut être réfutée lorsqu'il y a effondrement complet de l'appareil étatique, comme cela a été reconnu dans l'arrêt Zalzali c. M.E.I.[36] où il était question de la guerre civile faisant alors rage au Liban. Toutefois, même lorsqu'il y a effondrement de l'appareil étatique[37] , il peut y avoir plusieurs autorités établies qui soient en mesure, sur une partie du territoire qu'elles contrôlent, de fournir une protection[38] . Par conséquent, la Section du statut de réfugié doit examiner s'il y a une autorité établie à laquelle il est possible de demander protection et si une protection adéquate peut être fournie.[39]

Possibilité de refuge intérieur

Lorsqu'un demandeur satisfait à tous les éléments de la définition de réfugié au sens de la Convention dans la région où il habite dans son pays d'origine[40] , il se peut qu'il existe une possibilité de refuge intérieur (PRI) ailleurs dans ce pays: lorsqu'il existe une PRI, le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention. La question de l'existence d'une PRI est inhérente à la définition de réfugié au sens de la Convention.[41] Lorsqu'il est nécessaire de déterminer s'il existe une PRI, l'Observation sur cette question[42] peut être consultée.

Les éléments essentiels relativement à la PRI ont été formulés dans deux décisions: Rasaratnam et Thirunavukkarasu.[43] Il ressort de ces décisions que le critère à appliquer pour déterminer s'il existe une PRI comporte deux volets auxquels il doit être satisfait pour conclure à l'existence d'une PRI. Dans l'arrêt Rasaratnam, aux p. 709 à 711, la Cour d'appel a adopté le critère en deux volets:

1.   La Commission doit être convaincue selon la prépondérance des probabilités que le demandeur ne risque pas sérieusement d'être persécuté dans la partie du pays où, selon elle, il existe une possibilité de refuge.

2.   De plus, les conditions dans la partie du pays où l'on juge qu'il existe une possibilité de refuge sont telles que, compte tenu de toutes les circonstances, dont celles lui étant particulières, il ne serait pas déraisonnable pour le demandeur d'y chercher refuge.[44]

Les facteurs examinés pour déterminer s'il existe une possibilité raisonnable de persécution dans la PRI éventuelle sont les mêmes que lorsque le tribunal arrive à cette conclusion relativement à la région du pays où habite le demandeur. Toutefois, certains éléments sont différents afin de tenir compte du fait qu'on s'attend que le demandeur tente de trouver un autre lieu de refuge dans le pays d'ongine.[45]

En ce qui a trait au deuxième volet du critère de la PRI, soit le caractère raisonnable «compte tenu de toutes les circonstances», la Cour d'appel a statué que les circonstances doivent être pertinentes à la question de la PRI: «On ne peut en dresser une liste hors contexte. Elles varient dans chaque cas.»[46]

La Section de première instance a toutefois formulé certains principes qui permettent d'apprécier le caractère raisonnable d'une PRI. En cas de guerre civile, la Cour a indiqué que font partie des facteurs pertinents l'état des infrastructures et de l'économie dans la région de la PRI (c.-à-d. subsistent-elles encore) et la stabilité ou l'instabilité du gouvemement en place.[47] En outre, la difficulté qu'il faut surmonter pour se rendre dans une region offrant une PRI peuvent être prises en considération.

Il ne faudrait pas exiger du demandeur qu'il mette sa propre personne en péril ou subisse un préjudice excessif pour se rendre dans la région de la PRI ou y rester.[48]48 Toutefois, lorsqu'il existe une possibilité de refuge intérieur, le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.

IV. QUESTIONS RELATIVES A LA PREUVE

La personne qui craint de retourner dans un pays où la guerre civile fait rage et qui dit craindre d'être persécutée doit présenter des éléments de preuve établissant qu'elle craint avec raison d'être persécutée pour l'un des motifs prévus par la Convention. Il incombe au demandeur de présenter à la Section du statut de réfugié des éléments de preuve dignes de foi établissant que toutes les exigences de la définition sont remplies, notamment l'existence de mesures de persécution dirigées contre un individu ou un groupe pour des motifs énoncés dans la Convention.

Cette preuve peut être faite par le témoignage de l'intéressé. Elle peut aussi être faite par des témoins (y compris des experts) déposant sur les conditions qui, dans le pays visé, se rapportent à la persécution ciblée; cette preuve peut être faite par voie d'affidavits plutôt qu'oralement.[49] La Section du statut de réfugié peut admettre d'office les faits ainsi admissibles en justice de même que, sous réserve d'un avis suffisant, les faits généralement reconnus et les renseignements ou opinions qui sont du ressort de sa spécialisation.[50]

Le demandeur peut établir le bien-fondé de sa revendication en apportant la preuve de l'existence d'une possibilité raisonnable que d'autres personnes se trouvant dans la même situation que lui soient persécutées, que cette possibilité puisse ou non être rattachée soit à un groupe particulier uniquement, soit à d'importantes couches de la population.[51]

Les agents chargés de la revendication, sous la direction du tribunal et du conseil, devraient présenter en preuve, relativement aux conditions dans les pays, des documents objectifs traitant de la persécution ciblée. La Section du statut de réfugié devrait reconnaître qu'il est souvent difficile d'obtenir de l'information sur les conditions qui existent dans un pays lorsque celui-ci est ravagé par une guerre civile. Même s'il incombe au demandeur de démontrer le bien-fondé de sa revendication, les tribunaux de la Section du statut de réfugié devraient tenir compte des principes énoncés au paragraphe 196 du Guide du HCNUR relativement à l'obligation conjointe qu'ont les parties de rechercher les faits pertinents.

[...] Aussi, bien que la charge de la preuve incombe en principe au demandeur, la tâche d'établir et d'évaluer tous les faits pertinents sera-t-elle menée conjointement par le demandeur et l'examinateur. Dans certains cas, il appartiendra même à l'examinateur d'utiliser tous les moyens dont il dispose pour réunir les preuves nécessaires à l'appui de la demande.[52]

De plus, il faut reconnaître qu'en raison des changements rapides de situation qui sont habituellement associés aux guerres civiles, la pertinence de la preuve et l'obtention d'informations récentes sur ces changements peuvent poser problème. Par conséquent, les agents chargés de la revendication, sous la direction du tribunal et du conseil, devraient chercher à obtenir. pour les présenter à l'audience, les informations les plus récentes qui sont pertinentes à la situation dans un pays.

CADRE D'ANALYSE

1.   Il faut évaluer les circonstances particulières ayant suscité une crainte de persécution chez le demandeur. Le préjudice redouté constitue-t-il de la persécution?

Pour que le traitement constitue de la persécution, il doit s'agir d'un préjudice grave qui constitue une violation des droits de la personne et des libertés fondamentales reconnus au demandeur. L' importance de la violation doit être évaluée à la lumière de la définition de la notion de persécution dans la jurisprudence canadienne. Une norme objective est foumie dans les instruments internationaux sur les droits de la personne et les instruments internationaux qui traitent spécifiquement de la situation des civils en cas de conflits armés non internationaux. Toutefois, la jurisprudence canadienne qui porte sur la définition de la persécution n'est pas limitée à la violation de droits ou d'intérêts protégés par de tels instruments internationaux.

2.   Le préjudice redouté découle-t-il de mesures de persécution dirigées contre le demandeur ou le groupe auquel il appartient, pour un ou plusieurs des motifs énoncés dans la définition de réfugie au sens de la Convention? Subsidiairement, le demandeur craint-il d'être persecuté pour l'un ou plusieurs des motifs énoncés dans la définition de réfugié au sens de la Convention?

·     Il est nécessaire d'evaluer l'intention de l'agent de persécution. L 'intention peut être déterrninée d'après l'effet des actes de l'agent de persécution sur l'intéressé ou le groupe auquel il appartient.

·     Il n'est pas nécessaire que le demandeur soit persécuté individuellement.

·     Il faut déterminer la caractéristique qui fait en sorte que le demandeur ou les membres de son groupe courent un risque et établir un lien entre celle-ci et un motif énoncé dans la Convention.

·     Il ne faut pas faire de comparaison entre le risque de persécution du demandeur et celui que courent d'autres individus ou groupes dans le pays d'origine.

·     Comme la guerre civile est souvent le résultat de conflits fondés sur des motifs énoncés dans la Convention, il faut faire preuve de circonspection avant de conclure à l'inexistence d'un lien avec l'un des motifs prévus dans la Convention.

3.   II faut déterminer si, compte tenu de toutes les circonstances, le demandeur craint avec raison d'être persécuté. À cette fin, il faut apprecier les éléments de preuve se rapportant à la possibilité d'obtenir une protection adéquate de l'État et détemminer si la revendication a un fondement objectif.

·     Il faut déterminer s'il existe une autorité établie à laquelle il est possible de s'adresser pour obtenir une protection adéquate.

·     Il importe de reconnaître les difficultés liées à la collecte de renseignements sur les conditions dans les pays.

4.   Il faut déterminer s'il existe une possibilité de refuge intérieur (PRI), s'il y a lieu, ou préciser les autres questions qui doivent être analysées.

·     L'état des infastructures et de l'économie dans la région de la PRI (c-a-d subsistent-elles encore?) et la stabilité ou l'instabilité du gouvernement en place

·     Il faut déterminer si le demandeur subira un préjudice excessif à la fois pour se rendre à l'endroit de la PRI et pour y établir sa résidence.

·     S'il existe une PRI, le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.

PRINCIPES INTERNATIONAUX PERTINENTS

Convention de 1949 relative à la protection des personnel en temps de guerre

L'article 3 de chacune des quatre Conventions de Genève de 1949 qui figurent dans l'annexe de la Loi sur les Conventions de Genève, L.R.C. (1985), chap. G-3, est ainsi rédigé:

3. En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des Hautes Parties contractantes, chacune des Parties au conflit sera tenue d'appliquer au moins les dispositions suivantes:

1) La personnes qui ne participaient pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractere défavorable basée sur la race, la couleur, la religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre critère analogue.

À cet effet, sont et demeurent prohibés, en tout temps et en tout lieu, à l'égard des personnes mentionnées ci-dessus:

a) les atteintes portées à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, la mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices;

b) les prises d'otages;

c) les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants;

d) les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires reconnues comme indispensables par les peuples civilisés.

Protocole II de la Convention de 1949 relative à la protection des personnes en temps de guerre (Annexe vi de la Loi sur les Conventions de Genève, modifiée par S.C. 1990, ch. 14, art. 1)

Article 4

1. Toutes les personnes qui ne participent pas directement ou ne participent plus aux hostilités, qu'elles soient ou non privées de liberté, ont droit au respect de leur personne, de leur honneur, de leurs convictions et de leurs pratiques religieuses. Elles seront en toutes circonstances traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable. Il est interdit d'ordonner qu'il n'y ait pas de survivants.

2. Sans préjudice du caractère général des dispositions qui précèdent, sont et demeurent prohibés en tout temps et en tout lieu à l'égard des personnes visées au paragraphe 1:

a) la atteintes portées à la vie, à la santé et au bien-être physique ou mental des personnes, en particulier le meurtre, de même que les traitements cruels tels que la torture, la mutilations ou toutes formes de peines corporelles;

b) les punitions collectives;

c) la prise d'otages;

d) les actes de terrorisme;

e) la atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants, le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à la pudeur;

f) l'esclavage et la traite des esclaves sous toutes leurs formes;

g) le pillage;

h) la menace de commettre les actes precites.

3 Les enfants recevront les soins et l'aide dont ils ont besoin et, notamment:

...

c) les enfants de moins de quinze ens ne devront pas être recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilités;

Artide 13 - Protection de la population civile

1. La population civile et les personnes civiles jouissent d'une protection générale contre les dangers résultant d'opérations militaires. En vue de rendre cette protection effective, la règles suivantes seront observées en toutes circonstances.

2. Ni la population civile en tant que telle ni les personnes civiles ne devront être, l'objet d'attaques. Sont interdits la actes ou menaces de violence dont le but principal at de répandre la terreur parmi la population civile.

3. Les personnes civles jouissent de la protection accordée par le présent Titre, sauf si elles participent directement aux hostilités et pendant la durée de cette participation.

Article 14 - Protection des biens indispensables à h survie de la population civile

Il est interdit d'utiliser contre les personnes civiles la famine comme méthode de combat. Il est par conséquent interdit d'attaquer, de détruire, d'enlever ou de mettre hors d' usage à cette fin des biens indispensables à la survie de la population civile, tels que les denrées alimentaires et les zones agricoles qui la produisent, les récoltes, le bétail, les installations et réserves d'eau potable et les ouvrages d'irrigation.



[1]1 Il n'est pas rare que soient abordées dans les revendications du statut de réfugié au sens de la Convention dont est saisie la Section du statut diverges questions qui font partie de l'appréciation de telles revendications. Font partie de ces questions le changement de situation dans le pays d'origine, le refuge intérieur et l'application des sections E ou F de l'article premier de la Convention (les «clauses d'exclusion»). Ces questions devraient être tranchées en appliquant les principes juridiques appropriés. Le paragraphe 2(1 ) de la Loi sur l'immigration (la «Loi») prévoit que les personnes visées par les clauses d'exclusion sont exclues de la définition de réfugié au sens de la Convention. De même, la définition ne s'applique pas aux personnes qui ont perdu le statut de réfugié au sens de la Convention en vertu du paragraphe 2(2) de la Loi. Même si les présentes directives ne traitent pas de l'application des clauses d'exclusion, raison pour laquelle il n'est pas question de celles-ci dans le cadre d'analyse, il convient de signaler que, dans certaines circonstances, un demandeur, même s'il est un civil non combattant, peut être visé par les clauses d'exclusion et, de ce fait, exclu de la définition de réfugié au sens de la Convention.

[2]2 Le paragraphe 164 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, Genève, janvier 1988 (le «Guide du HCNUR»), bien qu'il ait un certain poids mais ne lie pas la Section du statut de réfugié, porte ce qui suit:

Les personnes qui sont contraintes de quitter leur pays d'origine à la suite de conflits armés nationaux ou internationaux ne sont pas normalement considérées comme des réfugiées au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967. Elles jouissent, cependant, de la protection prévue par d'autres instruments internationaux, tels que les Conventions de Genève de 1949 sur la protection des victimes de guerre et le Protocole additionnel de 1977 aux Conventions de Genève de 1949 relatif à la protection des victimes de conflits armés internationaux.

En ce qui concerne l'intention des auteurs de la Convention, James C. Hathaway cite, à la p. 185 de The Law of Refugee Status (Toronto, Butterworths, 1991), la déclaration de M. Robinson d'Israël (U.N. Doc. A/CONF.2SR.2/SR22, à la p. 6, 16 juillet 1951):

[TRADUCTION] Le texte [...] ne visait manifestement pas les réfugiés fuyant des désastres naturels, car on pouvait difficilement imaginer qu'un incendie, une inondation, un tremblement de terre ou une éruption volcanique, par exemple,fassent, entre les victimes, des distinctions fondées sur la race, la religion ou les opinions politiques. Le texte ne visait pas non plus tous les événements causés par l'homme. Par exemple, il n'y avait pas de dispositions applicables aux réfugiés fuyant des hostilités à moins que celles-ci ne soient par ailleurs visées par l'article premier de la Convention. [Italique ajouté par le professeur Hathaway.]

[3]3 La question sousjacente à ce problème est examinée par la délégation du HCNUR à Ottawa dans une note intitulée Refugees in Civil War Situations, Ottawa, novembre 1990:

[TRADUCTION] Il convient dès le départ de souligner que sont considérées comme des réfugiées les personnes qui, pour des raisons pertinentes au statut de réfugié, fuient un pays ou demeurent à l'extérieur de celui-ci. Le fait que ces motifs prennent naissance soit dans le contexte d'une guerre civile ou d'un conflit armé international, soit en temps de paix n'a aucune pertinence. En effet. rien dans la définition elle-même n'exclut son application aux personnel qui se trouvent au milieu d'une guerre civile. [Non souligné dans l'original.]

[4]4 Voir le paragraphe 3(1) qui est commun à chacune des quatre Conventions de Genève de 1949 dont il est question plus loin. Les présentes directives concernent les civils qui ne participe nt pas directement aux hostilités. Lorsqu'un demandeur foumit une aide indirecte aux combattants, par exemple en leur fournissant de la nourriture, de l'argent ou un abri, il ne devrait pas cesser de faire partie de la catégorie des non-combattants en raison de ces actes. Toute sanction infligée, ou que l'on menace d'infliger, au demandeur devrait être examinée en regard de l'activité dans laquelle celui-ci s'est engagé; une peine disproportionnée pourrait être considérée comme de la persécution parce que l'on pourrait juger qu'il ne s'agit pas de l'infliction légitime d'une sanction. En regle générale, les menaces contre la vie, la liberté ou la sécurité d'une personne constituent de la persécution, peu importe le contexte dans lequel elles sont faites. (Toutefois, pour que la définition s'applique, il doit exister un lien avec l'un des motifs énoncés dans la Convention.) Par ailleurs, dans l'affaire Antonio, Pacato Joao c. M.E.I. (C.F. 1re inst., IMM-1072-93), Nadon, le 27 septembre 1994, la Cour, saisie d'une revendication concernant l'Angola, n'était pas disposée à conclure que la peine de mort infligée pour tranison et sabotage constituait de la persécution

 

 

[6]6 Pour plus de détails sur cette question, voir Bayefsky, Anne F., International Human Rights Law - Use in Canadian Charter of Rights and Freedoms Litigation, (Markham, Butterworths, 1992).

[7]7 L'article 3, qui est commun à chacune des quatre Conventions de Genève de 1949, expose les normes de comportement minimales que chacun des belligérants dans un conflit armé ne présentant pas un caractère international doit respecter pendant le conflit. Lorsqu'un demandeur fournit une preuve digne de foi qu'il existe une possibilité raisonnable que l'une des dispositions de cet article soit violée à son endroit, le tribunal devra apprécier si l'acte constitue un traitement équivalant à de la persécution. Les violations des droits inaliénables en vertu de l'article 3 amèneraient vraisemblablement le tribunal à conclure à l'existence de persécution. Voir aussi le rapport du représentant du sous-secrétaire général, M. Francis Deng, présenté conformément à la résolution de la Commission des droits de l'homme 1993/1995, «Legal Analysis based on the needs of Internally Displaced Persons», préparé par Diller, Janelle M., Goldman, Robert K. et Meijer, Cecile E.M. pour le compte de la American Society of International Law et le International Human Rights Law Group, Washington D.C., É.-U. (document de travail en cours de préparation), 30 janvier 1995, U.N. Doc. E/CN.4/1995/CRP.1, p. 47 à 54.

Pour plus de renseignements sur le Protocole II, voir Lysaght, Charles, «The Scope of Protocol II and its Relation to Common Article 3 of the Geneva Conventions of 1949 and other Human Rights Instruments», The American Universitv Law Review, vol. 33, 1983, p. 9, et Junod, Sylvie, «Additional Protocol II: History and Scope», The American Universitv Law Review vol. 33, 1983, p. 29.

En ce qui concerne les instruments internationaux et les enfants en situation de guerre civile, consultez le paragraphe 4(3) du Protocole II et l'article 38 de la Convention relative aux droits de l'enfant. Pour plus de renseignements à cet égard, voir Cohn, Ilene, «The Convention on the Rights of the Child: What it means for Children in War», International Journal of Refugee Law vol. 3, n° 1, 1991, p. 100.

Si la revendicatrice fait état d'une crainte de persécution du fait de son sexe, il y aurait lieu de se reporter aux autres instruments internationaux énumérés dans les Directives de la présidente concernant les revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être persécutées en raison de leur sexe, Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Ottawa, Canada, le 9 mars 1993 (les «Directives sur la persécution fondée sur le sexe»). Il pourrait être nécessaire d'analyser la revendication d'une femme qui craint d'être persécutée dans une situation de guerre civile à la lumière des principes énoncés dans les présentes directives ainsi que dans les Directives sur la persécution fondée sur le sexe.

[8]8 Pour savoir quelles méthodes sont utilisées aux Etats-Unis pour évaluer les revendications liées à la guerre civile, voir Butcher, Peter, «Assessing Fear of Persecution in a War Zone», Georgetown Immigration Law Journal, vol. 5, n° 1, 1991, p. 435. Voir aussi Heyman, Michael G., «Redefining Refugee: A Proposal for Relief for Victims of Civil Strife», San Diego Law Review, vol. 24, 1987, p. 449; Aleir~koff, T. Alexander, «The Meaning of "Persecution" in U.S. Asylum Law», Refugee Policy - Canada and the United States, Toronto, York Lanes Press Ltd., 1991, p. 292; Kalin, Walter, «Refugees and Civil Wars: Only a Matter of Interpretation», International Journal of Refugee Law, vol. 3, n° 3, 1991, p. 435; Von Sternbert, Mark R., «Political Asylum and the Law of Internal Armed Conflict: Refugee Status, Human Rights and Humanitarian Law Concerns», International Journal of Refugee Law, vol. 5, n° 2, 1993, p. 153.

[9]9 Salibian c. M.E.I., [1990] 3 C.F. 250 (C.A.).

[10]10 Salibian, p. 259.

[11]11 Dans l'arrêt Rizkallah c. M.E.I. (1992), 156 N.R. 1 (C.A.F.), la Cour a statué que les appelants etaient simplement des victimes de la guerre civile et qu'il nty avait aucun lien entre le préjudice qutils craignaient et le fait qu'ils étaient des Libanais de foi chrétienne. Lord Waldman dans Immigration Law and Practice, Toronto, Butterworths, 1992, n° 5-12/93, à la p. 8.45, compare la décision rendue dans Rizkallah à celles rendues dans Salibian et dans Ovakimoglu c. M.E.I. (1983), 52 N.R. 67 (C.A.F), de manière à illustrer à quel point il est difficile de distinguer entre un préjudice commun à toutes les personnes vivant dans une situation de guerre civile et un préjudice lié à un motif énoncé dans la Convention.

[12]12 Hersi, Nur Dirie c. M.E.I. (C.A.F., A-1231-91), MacGuigan, Linden, McDonald, le 4 novembre 1993.

[13]13 L'alinéa 3g) de la Loi porte que la politique canadienne d'immigration ainsi que les règles et règlements pris en vertu de la Loi doivent être conçus et mis en oeuvre de manière à remplir, envers les réfugiés, les obligations imposées au Canada par le droit international et à continuer à faire honneur à la tradition humanitaire du pays à l'endroit des personnes déplacées ou persécutées. L'interprétation de la définition de réfugié au sens de la Convention devrait cadrer avec ces objectifs.

[14]14 Dans l'arrêt Hersi, Ubdi (Ubdi) Hashi c. M.E.I. (C.F. 1re inst., 92-A-6574), Joyal, le 5 mai 1993, la Cour fédérale a souscrit à l'argument suivant du ministre:

[...] les éléments de preuve présentés par les requérants ont trait au bombardement général des villes et des villages. Les membres des divers clans deviennent des victimes, que ces clans puissent être considérés amis ou ennemis des agresseurs.

Une décision semblable a été rendue dans l'affaire Siad c. M.E.I. (1993), 21 Imm.L.R (2d) 6 [(C.F. lre inst., 92-A-6820), Rothstein, le 13 avril 1993], où la Cour a confirmé la décision de la Section du statut de réfugié:

Il est évident que la Section du statut de réfugié a conclu que la crainte qu'éprouvait la requérante était ressentie, sans distinction, par tous les citoyens [de la Somalie], du fait de la guerre civile et des actes de violence commis au hasard, et que cette crainte n'était pas liée à l'appartenance à un groupe social.

Dans Khalib c. M.E.I. (1994), 24 Imm.L.R (2d) 149 [(C.F. lre inst., A-656-92), MacKay, le 30 mars 1994], la Cour a confirmé la décision de la Section du statut de réfugié qui avait conclu que la crainte éprouvée par les intéressés relativement au danger que présentaient les mines terrestres était celle ressentie, sans distinction, par l'ensemble de la population de la région malgré le fait que les membres du clan Issaq habitaient dans cette région et y formaient la majorité. I1 semble que la Section du statut de réfugié n'était pas convaincue que «les mines ont été posées dans l'intention de blesser uniquement ou même principalement les Isseqs vivant dans la région de Hargeisa, et que ces mines, qui ont été placées par l'ancien gouvemement et qui n'ont pas été enlevées, constituent un motif, reconnu par la Convention, de crainte d'être persecuté par un gouvernement qui n'est plus au pouvoir» (p. 4 et 5).

Dans la brève décision qu'elle a rendue dans l'affaire Shereen, Agha Agha c. M.E.I. (C.A.F., A-913-90), Mahoney, MacGuigan, Linden, le 21 mars 1994, la Cour d'appel fédérale a statué qu'il ne faut pas attribuer une opinion politique à toutes les personnes qui sont victimes de persécution par les forces gouvemementales dans une guerre civile, même si elles habitent dans une zone d' insurrecti on. Cette cause illustre la nécessité de fournir des preuves pour démontrer que la persécution est ciblée. Il ressort des décisions Ahmed, Faisa Talarer c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-1017-92), Noël, le 2 novembre 1993, et Abdi, Jama Osman c. M.E.I. (C.F. lre inst., A-1089-92), Simpson, le 18 novembre l993, qu'il est nécessaire d' analyser la question de la persécution qui est ciblée . Dans ces deux causes, il a été déterminé que la Section du statut de réfugié avait commis une erreur en n'analysant pas les preuves documentaires à l'appui de la position de l'intéressé, soit que sa crainte n'était pas celle ressentie par l'ensemble de la population en Somalie.

[15]15 De même, la Section du statut de réfugié a appliqué les notions de «risque distinctif» et de «risque distinctif comparatif» dans l'analyse des revendications liées à la guerre civile. Étant donné les réserves émises dans les présentes directives, il n'est pas recommandé d'utiliser l'une ou l'autre de ces méthodes. Voir SSR T93-11627 et T93-11628, James, Band, le 29 mars 1994, dans laquelle la question est examinée en profondeur et la jurisprudence canadienne est passée en revue.

Dans les motifs suivants, le tribunal a adopté l'approche comparative: SSR T92-05687, Davis, Thomas, le 9 février 1993 (le tribunal a statué que le groupe auquel appartenait l'intéressé, les Hazara, n'était pas visé de facon distincte par rapport aux autres groupes ethniques d'Afghanistan. Lors du contrôle judiciaire, la demande a été accueillie sur consentement et la décision défavorable a été infirmée - IMM-836-93, Reed, le 23 mars 1994. Une décision favorable a été rendue lors du réexamen de la revendication.) SSR T93-09000, T93-09143, Davis, Grice, le 14 janvier 1994 (une décision favorable a été rendue, car le tribunal a conclu que les mernbres du groupe religieux auquel appartenait l'intéressé faisaient l'objet, de façon distincte, de violations atroces des droits de la personne plus fréquemment que les membres des autres groupes); et SSR T93-09464, T93-09465, Davis, Wolman, le 6 janvier 1994 (le statut de réfugié n'a pas été reconnu aux demandeurs, membres de l'ethnie croate, parce qu'ils n'ont pas établi qu'ils couraient un risque distinctif par rapport aux autres groupes ethniques du pays. Aucune dernande de contrôle judiciaire n'a été déposée.)

Dans l'affaire Abdi, Jama Osman c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-1089-92), Simpson, le 18 novembre 1993, la Cour a statué à la p. 4: «En règle générale, lorsque de grands nombres de civils sont tués sans égard à leurs croyances ou à leur appartenance, il est difficile de démontrer l'existence d'une crainte d'être persécuté du fait d'une croyance personnelle ou de l'appartenance à un groupe particulier. La présente espèce est toutefois inhabituelle en ce que certains éléments de preuve documentaire corroboraient la crainte du requérant d'être persécuté par le sou-clan Abagal». Cette déclaration fait ressortir l'importance de soumettre des éléments de preuve qui font état de la persécution dirigee contre l'intéressé, son groupe, ou les deux. De plus, il en ressort que, même dans les cas où de nombreuses personnes subissent un préjudice pour des raisons sans rapport avec les motifs de la Convention, elles peuvent être la cible de persécution pour des motifs prévus par la Convention.

[16]16 En exigeant que le préjudice auquel doit faire face le demandeur soit plus grave, on pourrait notamment obliger celui-ci, pour avoir gain de cause, à établir les éléments suivants: (i) que le risque que court le dernandeur, ou le groupe auquel il appartient, est plus grand que celui des membres d'autres groupes (principe qui a été rejeté dans l'affaire Janjicek Davorin c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-2242-94), Richard, le 24 mars 1995, mais accepté dans d'autres décisions de la Section de première instance), (ii) que le risque que court le demandeur est plus grand que celui d'autres membres du groupe anquel il appartient (principe rejeté par la Cour d'appel dans l'arrêt Hersi, Nur Dirie) ou (iii) que le préjudice que pourrait subir le

demandeur est plus grand que celui qui menace d'autres personnes.

En ce qui concerne le troisième élément, la Section du statut de réfugié doit déterminer si le traitement redouté correspond aux conditions requises pour qu'il y ait persécution et non si le préjudice que le demandeur pourrait subir est plus grand que celui qui pourrait être infligé à un autre groupe ou à un membre du groupe auquel il appartient. De plus, ces conditions ne devraient pas être plus sévères parce que la revendication découle d'une situation de guerre civile; en règle générale, on ne peut pas affirmer que des actes qui constitueraient de la persécution en temps de paix ne satisfont pas à ces normes en temps de guerre. En outre, ce n'est pas parce que la persécution est commise dans le contexte d'une guerre civile qu'il n'y a aucun lien avec l'un des motifs énoncés dans la Convention.

Dans Janjicek, la Section de première instance de la Cour fédérale a, sur consentement, ordonné qu'une revendication fasse l'objet d'une nouvelle audition pour le motif qu'un demandeur du statut de réfugié au sens de la Convention n'a pas à démontrer que son groupe ethnique est plus en danger que les membres d'autres groupes ethniques, conformément à la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Salibian c. M.E.I. Toutefois, dans l'affaire Barisic, Rajko c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-7275-93),Noël, le 26 janvier 1995, la Cour a statué qu'elle ne pouvait pas conclure que la Section du statut de réfugié avait agi déraisonnablement en concluant que, comme tous les Croates, le demandeur était une victime de la guerre civile. La Section du statut de réfugié a jugé que le demandeur était dans la même situation que tous les citoyens de la Croatie et n'avait pas démontré l'existence d'un risque grave de persécution pour l'un des motifs énoncés dans la Convention. Le demandeur avait été contraint de quitter son village lorsque celui-ci avait été occupé par l'armée serbe, et il avait produit la preuve qu'il y avait eu "purification ethnique". La Cour a fait remarquer que les Croates, par esprit de vengeance, commettaient des actes tout aussi répréhensibles.

[17]17 Dans Isa c. S.E.C. (1995), 28 Imm.L.R (2d) 68 [(C.F. 1re inst., IMM-1760-94), Reed, le 16 février 1995], la Section de première instance a confirmé une décision de la Section du statut de réfugié de réfugié (SSR T93-01998, Mojgani, Cole, le 8 mars 1994) dans laquelle le tribunal avait conclu:

[TRADUCTION] I1 ressort de l'ensemble des preuves documentaires produites que tous les clans et sous-clans sont à la fois auteurs et victimes des actes de violence continue. Nous ne trouvons pas que le clan du demandeur ait été marqué pour la persécution séparément des autres clans ni que lui-même ait été marqué séparément d'autres Somaliens

La Cour a statué que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention malgré la preuve qui décrivait les attaques dont avait fait l'objet le clan dont il faisait partie. La Cour n'a pas trouvé à redire à la conclusion de la Section du statut de réfugié suivant laquelle la crainte du demandeur était semblable à celle qu'éprouvaient tous les citoyens somaliens et était le résultat du conflit civil se poursuivant en Somalie. La Cour a dit notamment à la page 4:

Les guerres civiles sont pour la plupart, sinon toutes, causées par un conflit racial ou ethnique. Si les attaques motivées par la haine raciale dans une situation de guerre civile devaient constituer un motif de revendication du statut de réfugié, il s'ensuivrait que tous les individus appartenant à l'un et l'autre camp se qualifient comme réfugiés. Le passage [du paragraphe 164] du Guide des Nations Unies (supra) que cite la Commission indique que tel n'est pas l'objectif de la Convention de 1951.

Voir aussi Ali, Farhan Omar c. M.C.I. (C.F. 1re inst., A-1652-92), McKeown, le 26 juin 1995, où la Cour a cité avec approbation la décision rendue dans Isa, mais n'a fait référence à aucun passage particulier. Elle a confirmé la décision de la Section du statut de réfugié qui avait conclu que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention parce qu'ils n'avaient pas prouvé qu'ils couraient «un risque différent d'être persécutés, et ce, malgré la situation de guerre civile». L'affaire Isa a été appliquée dans SSR T94-06601, T94-06602, T94-06603, T94-06604, T94-06605, T94-06606, Davis. Bubrin, le 2 août 1995, où le tribunal, examinant s'il existait une PRI pour les demandeurs, a statué à la p. 10 que les Hazaras chiites ne devaient pas faire face à plus de difficultés ou à des problèmes différents en Afghanistan. (Demande de contrôle judiciaire déposée sous le numéro de greffe IMM-2456-95; autorisation accordée.) Voir SSR T95-02614, Davis, Hope, le 24 novembre 1995, dans laquelle une analyse semblable est faite relativement aux Pashtouns en Afghanistan. Voir aussi SSR T95-02034, Davis, Bubrin, le 13 octobre 1995, où la Section du statut de réfugié a conclu, après avoir effectué une analyse similaire, que les membres du clan Majerteen de la tribu Darod ne courent pas un risque différent des autres citoyens Somaliens. (Demande de contrôle judiciaire déposée sous le numéro de greffe IMM-3170-95.)

[18]18 Dans l'affaire Ali, Hassan Isse c. M.E.I. (C.F. 1re inst., IMM-39-93), MacKay, le 9 juin 1994, la Cour souligne, après s'être reportée aux affaires Salibian et Rizkallah, que Rizkallah ne permet pas de conclure que «la situation de guerre civile en Somalie affecte tous les Somaliens au même degré» (p. 8) comme 1'avait jugé la Section du statut de réfugié. De plus, la Section du statut de réfugié avait conclu que «la situation prévalant en Somalie est à toute fin pratique une situation de guerre civile, et que le demandeur n'est pas, personnellement ou par son aapartenance à un groupe, une victime différente des autres victimes de la guerre civile» Le tribunal n'a pas expliqué sur quelles preuves il s'était fondé pour en arriver à cette conclusion. La Cour a statué que le tribunal avait commis une erreur en omettant d'évaluer le bien-fondé de la crainte de persécution de l'intéressé du fait de son appartenance à un clan et de tenir compte des circonstances propres à l'intéressé. Dans cette affaire, la Cour a concentré son attention sur le lien entre la crainte et l'un des motifs de la Convention plutôt que sur la notion de «risque distinctif» soulevée dans Abdulle, Sadia Mohamed c. M.E.I. (C F 1re inst., 1440-92), Nadon, le 16 septembre 1993, et Mohamud,

Nasra Ali c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-614 92), Nadon, le 21 janvier 1994.

Dans l'affaire T-94-05955, Rucker, Cram, le 7 mars 1995 (signé le 11 octobre 1995), la Section du statut de réfugié a conclu que le demandeur, qui était un Darod/Magerteen de Mogadiscio en Somalie, était un réfugié au sens de la Convention du fait de la lutte de clans en raison de son effet préjudiciable sur lui-même et sur son clan.

[19]19 Voir Egan, Suzanne J. Civil War Refugees and the Issue of "Singling Out" in a State of Civil Unrest, Toronto, The Centre for Refugee Studies, 1991. Voir aussi, Matas, David «Innocent Victims of Civil War as Refugees», vol. 22, automne 1993, Manitoba Law Journal, p. 1.

Dans l'affaire Osman, Ashu Farah c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-1295-94), Cullen, le 25 janvier 1995, la Cour a confirmé la décision de la Section du statut de réfugié qui avait conclu que la revendicatrice, une femme somalienne dont le défunt mari faisait partie d'un autre clan, ne craignait pas avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance à son clan. Elle a toutefois infirmé la décision parce que le tribunal n'avait pas tenu compte de la situation particulière de la revendicatrice qui, par suite de son mariage, se trouvait à être «davantage en danger». La Cour a statué (à la p. 5) que la «Commission ne peut pas invoquer la guerre civile et conclure automatiquement que les demandeurs qui viennent de la Somalie ne sont pas des réfugiés». Dans l'affaire Hotaki, Khalilullah c. M.E.I. (C.F. 1re inst., IMM-6659-93), Gibson, le 22 novembre 1994, la Cour a conclu que la Section du statut de réfugié avait commis une erreur en refusant de reconnaître que «[le requérant] était personnellement ou distinctement persécuté [et ne] partageait [pas] simplement une crainte ressentie indistinctement par tous les citoyens d'Afghanistan du fait de la guerre civile» (p. 4).

[20]20 Même si l'appartenance d'une personne civile non combattante à un groupe qui participe à la guerre civile est fréquemment invoquée comme fondement à la crainte de persécution, il ne s'agit pas d'un élément déterminant, car l'intéressé doit quand même démontrer qu'il est la cible particulière de persécution pour l'un des motifs énoncés dans la Convention. Dans l'affaire Abdulle, Sadia Mohamed c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-1440-92), Nadon, le 16 septembre 1993, la Cour a rejeté l'argument de la requérante suivant lequel l'appartenance à l'un des deux groupes s'affrontant dans un conflit était déterminante pour trancher l'affaire. La Cour, analysant le «risque distinctif», méthode d'analyse non recommandée dans ces directives, a exigé la preuve de l'existence d'une persécution dirigée contre la requérante ou le groupe auquel elle appartenait, conformément aux Directives. Dans l'affaire Farah, Ali Said c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-1141-94), Dubé, le 13 janvier 1995, la Cour qui a conclu que la Section du statut de réfugié n'avait pas eu tort de statuer que le demandeur n'avait pas démontré qu'il serait persécuté d'une manière différente des autres victimes de la guerre civile en Somalie, a fait remarquer que «[l]e simple fait que M. Farah soit membre d'une tribu ou d'un clan de la Somalie n'implique pas nécessairement qu'il éprouve une crainte objective de persécution» (p.1).

[21]21 Ward, p. 747.

[22]22 Toutefois, voir l'affaire Barisic, Rajko c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-7275-93), Noël, le 26 janvier 1995, où la Cour a fait remarquer, en rejetant la demande de contrôle judiciaire, que les Croates, par esprit de vengeance, commettaient des actes tout aussi répréhensibles que ceux commis par l'armée serbe.

[23]23 Monsieur Joachim Henkel, juge à la cour fédérale administrative allemande. Extrait de sa contribution à la conférence judiciaire internationale sur le droit et les procédures concernant l'asile, qui s'est tenue à Londres, Angleterre, en novembre 1995, «Qui est un refugié? (Les réfugiés et la guerre civile et autres conflits armés internee)», dans la section intitulée «La persécution et les conséquences générales de la guerre civile» (aux p. 3 et 4 du texte anglais).

 

[25]25 Le demandeur qui se trouve dans une telle situation pourrait craindre d'être persécuté par les membres de son propre groupe parce qu'il tente de rester neutre dans le conflit. Par ailleurs, il pourrait craindre des groupes qui sont en conflit avec le groupe auguel il appartient, car ceux-ci pourraient le considérer comme un partisan de son propre groupe.

Comme l'a signalé la Cour suprême du Canada à la p. 750 de l'arrêt Canada (procureur général) c. Ward, [1993] 2 RC.S. 689: «Le fait pour une personne d'être en dissentiment avec une organisation ne lui permettra pas toujours de chercher asile au Canada; le désaccord doit être fondé sur une conviction politique.» À la p. 749, la Cour a mis en contraste sa décision avec un arrêt récent de la Cour suprême des États-Unis, I. N. S. v. Elias Zacarias, 112 S.Ct. 812 (1992), où les juges de la majorite n'étaient pas convaincus que le motif du demandeur pour refuser de joindre les rangs de guérilleros antigouvemementaux, ou celui que les guérilleros lui attribuaient, avait un fondement politique.

[26]26 Dans l'affaire Antonio, Pacato Joao c. M.E.I. (C.F. 1re inst., IMM-1072-93), Nadon, le 27 septembre 1994, la Cour, saisie d'une revendication concemant ['Angola, n'était pas disposée à conclure que la peine de mort infligée pour trahison et sabotage, constituait de la persecution. Même si le fait de fournir un appui indirect aux forces dissidentes peut faire l'objet de poursuites par le gouvemement, ces poursuites ne doivent pas être effectuées d'une manière équivalant à de la persécution.

[27]27 Si la revendicatrice fait état d'une crainte de persécution du fait de son sexe, il pourrait être nécessaire d' examiner les Directives de la présidente concernant les revendicatrices du statut de réfugié craignant d'être persécutées en raison de leur sexe, Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Ottawa, Canada le 9 mars 1993 (les «Directives sur la persécution fondée sur le sexe»). Il pourrait donc être nécessaire d'analyser la revendication d'une femme qui craint d'être persécutée dans une situation de guerre civile à la lumière des principes énoncés dans les présentes directives ainsi que dans les Directives sur la persécution fondée sur le sexe. Voir Hazarat, Ghulam c. S.E.C. (C.F. 1re inst., IMM-5496-93), MacKay, le 25 novembre 1994, affaire soulevant une situation de guerre civile dans laquelle le tribunal n'a pas tenu compte des Directives sur la persécution fondée sur le sexe. Toutefois, dans Narvaez, Cecilia c. M.C.I. (C.F. 1re inst., IMM-3660-94), McKeown, le 9 février 1995, portant sur la violence familiale, la Cour a dit ce qui suit concernant les Directives sur la persécution fondée sur le sexe: «Celles-ci n'ont certes pas force de loi, mais elles sont autorisées aux termes du paragraphe 65(3) de la Loi et sont censées êtres suivies, à moins qu'une analyse différente ne convienne dans les circonstances» (p. 7). En ce qui concerne la situation des enfants, voir la note 7 précitée.

[28]28 Voir Shirwa, Mohamed Mahmoud c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-1290-92), Denault, le 16 décembre 1993. De plus, les membres du clan ayant gouverné le pays avant la guerre civile pourraient être persécutés du fait de leur appartenance à ce clan.

[29]29 I1 est admis que, pendant une guerre civile, les combats entrainent des pertes parmi les civils; bien que cela soit regrettable, les décès ou les blessures ainsi causés se distinguent de ceux découlant d'une attaque dirigée contre des civils non combattans ou lorsque les combattants ne se soucient nullement de la sécurité des civils. La preuve d'une telle attitude pourrait amener la Section du statut de réfugié à conclure à l'existence d'un lien entre la persécution redoutée et un motif énoncé dans la Convention. Pour des exemples de cas illustrant ce problème, voir la note 14 précitée.

[30]30 Voir Khalib c. M.E.I. (1994), 24 Imm.L.R. (2d) 149 [(C.F. 1re inst., A-656-92), MacKay, le 30 mars 1994], à la note 14 precitée. On peut mettre en contraste cet exemple avec un cas où l'un des belligérants dans une guerre civile bombarde et attaque au mortier un secteur d'une ville où habitent principalement des civils non combattans qui font partie d'un autre groupe impliqué dans la guerre civile. Les combattans ne devraient pas attaquer directement les civils qui ne se trouvent pas à proximité des objectifs militaires. Toutefois, lorsque des civils se trouvent dans des objectifs militaires ou à proximité de ceux-ci, on peut conclure qu'ils ont assumé le risque d'être tués ou blessés par suite des attaques sur ces objectifs militaires.

[31]31 On peut mettre cette situation en contraste avec l'intention d'infliger un préjudice qui est décrite par M. Joachim Henkel. Dans l'affaire Abdi, Ascia Hassan c. M.C.I. (C.F. 1re inst., A-1016-92), Noël, le 27 octobre 1994, la Cour, qui a rejeté la demande, a conclu que son examen de la preuve ne justifiait pas qu'elle modifie la conclusion de la Section du statut de réfugié suivant laquelle «les membres des tribus Darod et Hawiye, dont les requérants, sont exposés au même risque de violence généralisée que tous ceux qui vivent en Somalie» (p. 6).

[32]32 Dans l'affaire SSR T92-03148, Miller, Shatzky, le 9 septembre 1992, la Section du statut de réfugié a reconnu le statut de réfugié à un Bosniaque musulman parce que «les musulmans ne sont pas simplement des victimes de la guerre, mais [...] ils sont visés directement en tant que groupe à éliminer en raison de son [sic] appartenance religieuse» (p. 6).

[33]33 Ward, p. 709.

[34]34 Ward, p. 724.

[35]35 Voir Ward, p. 722-726.

[36]36 Zakalic. M.E.I., [1991] 3 C.F. 605 (C.A.). Comme la Cour l'a signalé à la p. 614 de sa décision, la non-existence d'un gouvernement ne saurait faire obstacle à une revendication du statut de réfugié. Le résultat serait absurde si plus grand serait le chaos dans un pays donné, moins les actes de persécution seraient susceptibles de donner ouverture à une revendication du statut de réfugié. Toutefois, pour que le principe formulé dans l'arrêt Zakali s'applique, le demandeur doit démontrer l'existence d'un risque prospectif de persécution; ainsi, dans l'affiaire Roble, Abdi Burale c. M.E.I. (CA.F., A-1101-91), Heald, Stone, Mcdonald, le 25 avril 1994, où l'agent de persécution (le NSS en Somalie) ne constituait plus un facteur pertinent, la Cour a statué, à la p. 7, que «le fait que l'État ne soit pas en mesure d'assurer la protection de l'appelant ne suffit pas en soi à fonder sa demande de statut».

 

 

[39]39 Dans l'arrêt Ward, la Cour suprême du Canada n'a pas examiné la norme de protection qu'un pays doit offrir à ses ressortissants. Pour déterminer ce qui constitue une protection adéquate, la Section du statut de réfugié peut notamment examiner si l'autorité établie est capable de fournir au demandeur une protection contre les actes interdits par l'article 3 de la Convention de 1949. Pour une analyse de la norme appropriée, voir M.E.I. c. Villafranca (1992), 18 Imm.L.R (2d) 130 (C.A.F.); Velarde-Alvarez c. S.E.C. (1995), 27 Imm.L.R (2d) 88 (C.F. 1re inst.); Bobrik, Iowi c. M.C.I. (C.F. 1re inst, IMM-5519-93), Tremblay-Lamer, le 16 septembre 1994; Smirnov c. S.E.C. [1995] 1 C.F. 780 (1re inst.).

[40]40 Dans Kanagaratnam, Parameswary c. M.E.I. (C.A.F., A-356-94), Strayer, Linden, McDonald, le 17 janvier 1996, la Cour d'appel a statué à la p. 2 (texte anglais) dans sa réponse négative à la question certifiée: [TRADUCTION NON OFFICELLE] «Le fait de déterminer si un demandeur craint avec raison d'être persécuté dans la région du pays dont il est originaire est-il une condition préalable à l'examen de la possibilité de refuge intérieur?» que «bien que la Commission puisse évidemment procéder de cette façon si elle le désire, il n'est pas nécessaire, sur le plan juridique, qu'elle détermine si l'intéressé était persécuté dans une région de son pays d'origine avant d'examiner une PRI.» (C'est la Cour qui souligne)

[41]41 Rasaratnam c. M.E.I., [1992] 1 C.F. 706 (C.A.), p. 710.

[42]42 Le refuge intérieur: Quand est-il possible?, Services juridiques, CISR, avril 1994. Cette Observation examine cette question en détail et propose un cadre d'analyse.

[43]43 Thirunavukkarasu c. M.E.I., [1994] 1 C.F. 589 (C.A ).

[44]44 Pour une analyse plus approfondie de cette déclaration, il faut se reporter à l'arrêt Thirunavukkarasu, p. 596 à 599.

[45]45 En particulier, pour déterminer si la crainte de persécution dans la région de la PRI a un fondement objectif, la Section du statut de réfugié doit examiner la situation personnelle du demandeur et non pas uniquement les éléments de preuve généraux relatifs aux autres personnel qui y habitent.

[46]46 M.E.I. c. Sharbdeen (1994), 23 Imm.L.R. (2d) 300 [(C.A.F., A-488-93). Mahoney, MacGuigan, Linden, le 21 mars 1994, p. 2]

[47]47 Farrah, Sahra Said c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-694-92), Reed, le 5 octobre 1993, p. 3. Voir aussi Megag, Sahra Abdilahi c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-822-92), Rothstein, le 10 décembre 1993, à la p. 3, où la Cour conclut que la seule instabilité ne constitue pas le critère permettant de déterminer le caractère raisonnable. Dans l'affaire Irene, Steve Albert c. MC.I. (C.F. 1re inst., IMM-6275-93), Rothstein, le 6 octobre 1994, la Cour, qui examinait s'il existait une PRI dans une région contrôlée par l'un des groupes engagés dans le conflit, n'était pas en désaccord avec l'argument du requérant qui soutenait que le groupe n'était pas reconnu sur le plan international, qu'il avait perdu du territoire, qu'il ne représentait pas une force établie dans le pays (le Libéria) et que le requérant ne pouvait pas raisonnablement solliciter la protection de ce groupe. Compte tenu des circonstances, la Cour a rejeté la conclusion de la Section du statut de réfugié suivant laquelle il existait une PRI.

[48]48 La Section de première instance a expressément examiné la question de savoir à quel moment il faut examiner s'il existe une PRI. Dans l'affaire Dubravac c. M.C.I. (1995), 29 Imm.L.R. (2d) 55 [(C.F. 1re inst., IMM-839-94), Rothstein, le 1er février 1995], où la ville natale des demandeurs avait été encerclée par les forces serbes ennemies, la Cour a dit que «les requérants ne seraient [...] pas tenus de se rendre dans la zone sécuritaire de la Croatie à partir de leur ville natale, mais [...] à partir de l'endroit où on les aurait réinstallés à leur retour» (IMM-839-94, p. 1).

[49]49 Le paragraphe 68(2) de la Loi prévoit que, dans la mesure où les circonstances et l'équité le permettent, la Section du statut fonctionne sans formalisme et avec célérité.

[50]50 Conformément aux exigences de la justice naturelle, le paragraphe 68(5) de la Loi prévoit que, sauf pour les faits qui peuvent être admis d'office en justice, la Section du statut de réfugié informe la personne visée par la procédure (et le ministre, s'il est present à l'audience) de son intention d'admettre d'office des faits, renseignements ou opinions et lui donne la possibilité de présenter des observations à cet égard.

[51]51 En rejetant la demande de contrôle judiciaire dans l'affaire Ahmed, Mohamed Hassan c. M.E.I. (C.F. 1re inst., A-818-92), McKeown, le 20 mai 1994, la Cour a souligné que «[i]l appartient au requérant de prouver qu'il se trouve dans la même situation que les membres d'un groupe social qui a connu la persécution» (p.2).

[52]52 Voir aussi les paragraphes 195 à 205. La Section du statut de réfugié a tenu compte de la nécessité de vérifier et d'évaluer tous les faits pertinents dans certaines des améliorations qu'elle a apportées en octobre 1995 au traitement des revendications du statut de réfugié au sens de la Convention.

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