Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Maldives

Contexte politique

La scène politique aux Maldives continue d'être largement dominée par le Président Maumoon Abdul Gayoom, au pouvoir depuis 1978. En 2006, ce dernier s'était engagé en faveur d'un programme de réformes politiques et judiciaires en vue de l'avènement d'une démocratie moderne, devant donner lieu aux premières élections multipartites en octobre 2008. Cependant, en 2007, le Président a ralenti le processus de réformes. En outre, face à une contestation croissante de l'opposition, le chef de l'État a préféré gouverner avec les conservateurs, ce qui a conduit à la démission de plusieurs ministres.

D'autre part, les libertés d'expression, d'association et de réunion ont continué de faire l'objet de nombreuses restrictions. En particulier, les autorités ont à plusieurs reprises réprimé des rassemblements organisés par l'opposition, le plus souvent appelant à une accélération des réformes, et la police a parfois battu des manifestants. Les autorités reprochent aux manifestants de gêner le processus de réformes par leurs rassemblements qui, selon le Gouvernement, menacent de façon inutile l'ordre public.

Par ailleurs, la société civile est principalement caractérisée aux Maldives par l'absence d'un cadre juridique dans lequel elle serait à même d'évoluer, ce qui explique, en partie, l'absence d'une société civile solide et fortement active, notamment dans le domaine des droits de l'Homme. En effet, s'il existe un certain nombre de structures qui se dénomment "ONG", elles regroupent principalement des clubs sportifs ou culturels ou des comités mis en place par le Gouvernement.

Absence de reconnaissance légale de la plupart des organisations de défense des droits de l'Homme1

Aux Maldives, les organisations de défense des droits de l'Homme rencontrent de nombreuses difficultés afin d'obtenir une reconnaissance légale, à l'exemple du Réseau de la société civile aux Maldives (Maldivian Civil Society Network – MCSN), qui regroupe depuis 2006 plusieurs ONG indépendantes et fonctionne de façon informelle. En conséquence, le MCSN fait face à de multiples obstacles, en particulier en ce qui concerne la recherche de fonds : depuis le début de ses activités, le MCSN n'a ainsi été en mesure que de mener un nombre restreint d'activités en raison des financements limités auxquels il a accès. De même, "Maldives Aid", une ONG locale enregistrée auprès de l'association caritative britannique Les amis des Maldives (Friends of Maldives – FOM), qui a notamment apporté un soutien au redressement du pays après le passage du tsunami en décembre 2006, s'est également vu refuser son enregistrement. Enfin, la demande d'enregistrement de l'Association pour les droits de l'Homme aux Maldives (Human Rights Association of Maldives) est restée sans réponse depuis qu'elle a été déposée, en 2005.

Obstacles à l'encontre de la liberté de la presse : les journalistes en première ligne de la répression

Alors que la société civile continue de rencontrer un certain nombre de difficultés pour s'organiser, ce sont bien souvent les journalistes qui prennent le relais lorsqu'il s'agit de dénoncer les violations des droits de l'Homme. Ces derniers se retrouvent alors en première ligne de la répression exercée par les autorités afin de les empêcher de publier des articles critiques à l'égard du Gouvernement.

Le 21 janvier 2007, le Gouvernement des Maldives a adopté la Loi sur la diffamation, qui sanctionne d'une amende de 5 000 rufiyaas (environ 247 euros) un journal qui se rendrait coupable de diffamation. Présenté par le Gouvernement comme permettant de mieux protéger l'honneur et la réputation de ses concitoyens, cette loi, qui définit la diffamation de façon extrêmement large, incluant par exemple la publication de faits véridiques qui blesseraient "l'honneur" ou la "réputation" d'une personne, permet avant tout de mieux restreindre la liberté d'expression et de réduire au silence toute critique.2 Par ailleurs, en août 2007, la Loi sur la liberté de la presse a été adoptée, comportant de nombreuses restrictions à l'égard de cette dernière. En particulier, la loi dispose que les propos qui sont à même de menacer la "souveraineté de la nation" ou qui pourraient empiéter sur le maintien de "l'ordre public" ne rentrent pas dans le cadre de la liberté d'expression.

Dans un tel contexte, les journalistes font régulièrement l'objet d'actes de harcèlement. Ainsi, le 19 janvier 2007, le reporter américain Phillip Wellman, correspondant de Minivannews.com, a été expulsé et interdit de séjour dans le pays pour une période de deux ans, sous prétexte qu'il n'avait pas une "autorisation en règle".3 En avril 2007, MM. Zeena Zahir, du journal pro-gouvernemental Miadhu, Adam Miqdad, rédacteur en chef du site e-Sandhaanu, et Mohamed Nasheed, photographe pour Minivan, ont été arrêtés lors de l'enterrement de M. Hussein Salah, un ancien prisonnier retrouvé mort, le visage et le corps tuméfiés.4 Par ailleurs, les journalistes travaillant pour le journal d'opposition Minivan ont continué en 2007 de faire l'objet de multiples formes de représailles, en premier lieu desquelles des poursuites judiciaires, à l'exemple de M. Imran Zahir et de Mme Aminath Najeeb, rédactrice en chef. Ainsi, cette dernière a été convoquée devant la justice à maintes reprises en 2007. Elle est en effet accusée de "désobéissance civile" après avoir publié un article, en septembre 2006, dans lequel un journaliste avait dénoncé les travers du système judiciaire.5

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).


1 Cf. Réseau des détenus aux Maldives (Maldivian Detainee Network).

2 Cf. Centre asiatique pour les droits de l'Homme (Asian Centre for Human Rights).

3 Cf. communiqué du Centre asiatique pour les droits de l'Homme, 24 janvier 2007.

4 Cf. Reporters sans frontières (RSF).

5 Cf. Réseau des détenus aux Maldives.

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