CRR, SR, 17 octobre 2003, Mlle M.; Nature et auteurs des persécutions

Considérant que des persécutions exercées par des particuliers peuvent être retenues, dès lors qu'elles sont en fait encouragées ou tolérées volontairement par l'autorité publique, de sorte que l'intéressé n'est pas effectivement en mesure de se réclamer de la protection de celle-ci ; que dans le cas de persécutions exercées par des particuliers et fondées sur l'un des motifs énumérées à l'article 1er A 2 de la convention de Genève, la reconnaissance de la qualité de réfugié n'est pas subordonnée à ce que le refus de protection des autorités soit lui-même inspiré par un tel motif ; qu'en revanche, lorsque de telles persécutions ne reposent sur aucun fondement conventionnel, celles-ci ne peuvent être retenues que si l'attitude des autorités publiques encourageant ou tolérant volontairement ces agissements est inspirée par l'un des motifs énumérés par la convention de Genève ; 

Considérant que les pièces du dossier et les déclarations faites en séance publique devant la Commission permettent de tenir pour établi que Mlle M., qui est ressortissante de la République dominicaine et appartient à la minorité noire de Saint Domingue, a été abandonnée à sa naissance et élevée dans une famille blanche qui l'a exploitée ; qu'elle a été victime d'un réseau de prostitution qui l'a conduite de force à Haïti où elle a été contrainte de se prostituer de juin 1997 à octobre 1998 ; qu'à plusieurs reprises, elle a tenté de demander la protection des autorités dominicaines ; qu'il ressort de l'instruction que c'est en raison de ses origines ethniques que ces autorités n'ont pas assuré sa protection ; qu'il en a été notamment ainsi, aux mois de juin et octobre 1998, lors de sa présence sur le territoire haïtien ; que ces démarches, loin de lui apporter la protection sollicitée, ont été à l'origine du meurtre d'une de ses compagnes et de persécutions sévères sur sa personne, perpétrés par des proxénètes, informés de ses demandes de protection ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, le refus des autorités dominicaines à l'étranger d'assurer la protection de la requérante doit être regardé comme ayant été inspiré par l'un des motifs de la Convention de Genève ; qu'il suit de là qu'elle peut craindre avec raison d'être victime de nouvelles persécutions volontairement tolérées par les autorités publiques en cas de retour dans son pays ; que dès lors, Mlle M. est fondée à se prévaloir de la qualité de réfugiée ; ...(Annulation de la décision du directeur de l'OFPRA et reconnaissance de la qualité de réfugiée).

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